Ça valait bien la peine de se dire que ce serait plus facile d'affronter le Brésil sans Neymar pour apprendre, quelques instants avant le coup d'envoi du match face au quintuple champion du monde ce lundi, que l'équipe de Suisse allait elle aussi être privée de son détonateur offensif; du joueur qui, sur un coup de patte ou de rein, était capable de faire basculer une rencontre: Xherdan Shaqiri.
Murat Yakin avait fait le choix de préserver «XS», légèrement touché à la cuisse, et il a eu doublement raison. D'abord parce qu'il fallait ménager le joueur de Chicago pour le match le plus important de la semaine (vendredi contre la Serbie), ensuite parce que l'absence du numéro 23 allait enfin nous permettre de confronter le fantasme à la réalité, et de savoir si cette équipe de Suisse pouvait être meilleure sans Shaqiri.
La réponse a sauté aux yeux en première mi-temps déjà, lorsqu'on a vu Vargas, Freuler ou Rieder préférer jouer prudemment vers l'arrière à chaque fois que l'équipe de Suisse avait l'occasion de se projeter vers l'avant. On peut imaginer qu'ils ont obéi aux consignes, mais ce n'est pas sûr; parce que si ce match contre le Brésil n'était pas décisif, si la Nati n'avait rien à perdre face aux Auriverdes, elle aurait dû oser davantage. Or elle n'a absolument rien tenté.
La vérité est qu'il a manqué un joueur suffisamment doué et audacieux pour faire le lien entre deux milieux d'abord soucieux de bien défendre (Xhaka et Freuler) et un attaquant de pointe sollicité dans un rôle de pivot (Embolo). Et ce joueur c'est Xherdan Shaqiri.
Murat Yakin l'a d'ailleurs reconnu en conférence de presse après la partie.
Le joueur le plus capé de la génération actuelle (110 sélections) a surtout manqué en fin de rencontre, lors des sorties hautes de la Suisse dans le camp adverse. Quand elle a récupéré le ballon dans les trente derniers mètres, la Nati n'a pas su qu'en faire.
Xherdan Shaqiri, «le facteur X» selon Djourou, devrait être de retour dans le onze vendredi contre la Serbie. Si lui n'aura pas changé, il est possible que le regard que le public pose sur lui si. Le souvenir du non-match offensif face au Brésil sera encore dans tous les esprits et la simple présence d'un joueur capable de débloquer une situation dans les grands tournois (8 buts inscrits en 18 rencontres en phase finale du Mondial et de l'Euro) sera source de joie et, évidemment, d'espoir.
Bien sûr, la Serbie est un autre adversaire que le Brésil. Mais il n'est pas certain que le Nati ait davantage d'espaces dans les trente derniers mètres vendredi, ni que nos jeunes talents (Vargas, Okafor s'il est apte à jouer, Rieder, Sow) soient en mesure d'assumer les responsabilités induites par un match capital en phase finale de Coupe du monde.
On pardonnera dès lors plus facilement à Xherdan Shaqiri son manque de rythme (il n'aura disputé que deux matchs en 53 jours avant celui de vendredi) et ses retards dans le placement en sachant qu'il est irremplaçable lorsque la Suisse aborde un grand rendez-vous.