À eux trois, le FC Bâle, l'Olympique Lyonnais et l'Ajax d'Amsterdam ont empilé pas moins de 28 titres nationaux au 21e siècle. Pourtant, ces trois géants du football de leur pays sont actuellement tous relégables dans leur championnat! Pour comprendre ce qui leur arrive, nous avons décidé de nous pencher sur chacun d'eux en vous expliquant la crise qu'ils traversent, pour quelles raisons, et ce qui les attend dans les semaines à venir.
Le FC Bâle vit sa pire saison depuis son retour dans l’élite il y a 27 ans. Les Rhénans sont 12èmes et derniers de Super League avec 5 misérables points en dix parties. Ils n’ont gagné qu’un match pour sept défaites. Ils ont aussi subi un camouflet en qualifs de Conférence League, avec une élimination contre les Kazakhs de Tobol Kostanay. Un début de saison catastrophique qui a coûté sa place à l’entraîneur Timo Schultz fin septembre. Les fans sont très fâchés et l’ont fait savoir, notamment après la claque 3-0 reçue à la maison contre le Stade Lausanne Ouchy le 1er octobre.
19 arrivées, 17 départs: tel est le bilan des transferts lors du dernier mercato estival. Cette instabilité de l’effectif, conséquence notamment de la spéculation faite sur les jeunes éléments étrangers par les dirigeants du club, joue certainement un rôle dans les mauvaises performances du FCB. Sans compter que celui-ci a perdu des hommes importants, notamment offensifs (par exemple Ndoye, Amdouni, Zeqiri, Males et Diouf), et qu’il n’a pas réussi à les remplacer. Une preuve: après 10 matchs, le meilleur buteur rhénan n’a inscrit que trois pions et il est… milieu défensif (Fabian Frei).
L’explication de cette faiblesse de contingent a sa source en 2020: cette année-là, Bâle annonçait un déficit de 20 millions de francs. Rebelote l’année suivante, avec une perte de 14 millions. Longtemps club le plus riche de Suisse, le FCB a dû revoir son budget à la baisse et est contraint, comme les autres équipes du pays, de lâcher chaque année ses meilleurs éléments. Et c’est incontestable: la mayonnaise n’a pas pris avec le coach allemand Timo Schultz, arrivé cet été. Le retour sur le banc de l’intérimaire Heiko Vogel n’a pas déclenché le choc psychologique espéré.
Mercredi, le FC Bâle a annoncé la création d’une commission sportive composée de sept membres, notamment le président David Degen et les anciens joueurs Marco Streller et Valentin Stocker. Elle doit trouver des solutions pour sortir de ce marasme. Cette commission remplace le poste de directeur sportif d’Heiko Vogel. L’Allemand est, lui, maintenu comme entraîneur. Les Rhénans joueront trois matchs cruciaux ces prochaines semaines, à commencer par celui de la peur contre l’avant-dernier, Lausanne, dimanche à la Tuilière (14h15). Ils enchaîneront les deux dimanches suivants face à Yverdon à la maison puis Servette à Genève. Pour embellir sa piteuse saison, le FCB mise encore sur la Coupe suisse: il se déplacera mercredi à Kriens pour son 8e de finale.
L’OL vit des heures sombres. Après neuf journées de championnat, le club est lanterne rouge de Ligue 1. Les Gones n’ont pas encore décroché la moindre victoire cette saison et totalisent trois maigres petits points au classement. Pire encore, ils se trouvent déjà à cinq unités du FC Metz, barragiste, et viennent d’être battus par un concurrent direct à domicile: le Clermont Foot.
Fin septembre, les Rhodaniens présentaient un triste record: ils étaient les seuls parmi les cinq grands championnats à n’avoir encore jamais mené au score en 2023/24. Laurent Blanc a été démis de ses fonctions, mais son successeur, Fabio Grosso, ne fait pas mieux. Il est même déjà fragilisé. Des taupes ont parlé, son management est décrié.
Cela fait plusieurs années que Lyon s’enfonce dans le marasme sans que personne ne puisse contrer cette dynamique. Sur les quatre dernières saisons, l’équipe s’est classée 7e à deux reprises, elle s’est aussi adjugée une 8e place. L’OL a longtemps été habitué à la Ligue des Champions et les non-qualifications successives ont impacté le porte-monnaie. Lyon descend progressivement dans la hiérarchie du foot français et l’on se demande jusqu’où cela ira.
14 - 14 des 17 équipes qui n'ont compté que 3 points ou moins après leurs 9 premiers matches d'une saison de Ligue 1 ont été reléguées en fin d'exercice. Cauchemar. #OLCF63 pic.twitter.com/V1vPUraDyG
— OptaJean (@OptaJean) October 22, 2023
Ces dernières saisons, le mercato lyonnais n’a pas été une franche réussite. Les Gones ont dépensé sans compter pour des joueurs «âgés», s’avérant être des déceptions. On pense notamment à Xherdan Shaqiri ou Jérome Boateng. Les dirigeants ont ensuite essayé de reconstruire l’identité lyonnaise en allant chercher d’anciennes gloires. Problème: elles minent les finances du club. Le retour de Corentin Tolisso est un fiasco, celui d’Alexandre Lacazette bien meilleur. L’ancien gunner a porté son équipe la saison dernière, mais il est moins efficace devant le but depuis le début de l’exercice 2023/24.
L’OL se devait de vendre et a subi de nombreux départs à l’intersaison. Le club a dit adieu aux jeunes talents qu’il a formé (Aouar, Lukeba, Barcola, Malo Gusto) et à des joueurs confirmés comme Dembélé ou Toko-Ekambi pris en grippe par les supporters. Tout est à reconstruire dans un contexte particulier, qui a vu l’éternel Jean-Michel Aulas lâcher les rênes en mai.
On se dit qu’à court terme, la situation ne devrait qu’empirer. Le calendrier des Gones jusqu’à la trêve est compliqué, avec notamment un déplacement à Marseille dimanche (20h45). Les supporters sont pessimistes, car n’oublions pas que depuis que la Ligue 1 est passée à 18 équipes, il n’y a que 34 journées à disputer. Et donc moins de temps pour mettre fin à la crise, puis rattraper son retard.
Autre élément qui laisse perplexe, le fait que le nouveau président John Textor soit inexpérimenté. Lui pense aller chercher des Brésiliens cet hiver, alors qu’on le sait, lorsqu’on joue la relégation, il vaut mieux des pompiers de service qui connaissent le championnat. Ses dernières déclarations - lunaires - font craindre le pire, comme si l’Américain n’était pas conscient de l’enjeu. Faut-il lui rappeler qu’en Europe les ligues ne sont pas fermées?
Les «Godenzonen» (fils des dieux) sont avant-derniers de leur championnat. Une situation inquiétante pour un club qui n'a jamais été habitué à lutter contre la relégation.
La bonne nouvelle, c'est que l'Ajax a deux matchs de moins que les équipes qui le devancent et un meilleur goal-average; la mauvaise, c'est qu'il n'a plus gagné le moindre match depuis le 12 août et qu'il se déplace sur le terrain du leader (le PSV Eindhoven), dimanche à 14h30.
La vérité est que le demi-finaliste de la Ligue des champions 2019 a très mal digéré le départ de plusieurs personnalités fortes ces deux dernières saisons. Son coach Erik Ten Hag (avril 2022) n'a jamais vraiment été remplacé, pas davantage que les cadres du vestiaire partis en 2022 et 2023 comme Antony, Lisandro Martinez, Sébastien Haller, Ryan Gravenberch, Perr Schuurs, Nicolas Tagliafico, André Onana, Noussair Mazraoui, Danilo Pereira, Jurriën Timber, Mohammed Kudus, Edson Alvarez ou encore Calvin Bassey. Autant de départs qui ont marqué la fin d'un cycle dans la «Venise du Nord» et fragilisé l'ADN de l'équipe.
L'Ajax aurait pu se renforcer l'été dernier, il s'en est même donné les moyens (quelque 150 millions d'euros ont été dépensés) mais beaucoup considèrent qu'il a raté sa campagne de recrutement, et il est difficile de leur donner tort en voyant les résultats. Même sur le banc, la nomination de Maurice Steijn avait surpris et interrogé les médias. Le coach avait signé un contrat de trois ans l'été dernier malgré le fait qu'il n'avait jamais entraîné de clubs de premier plan. Il a été viré lundi.
Le club amstellodamois s'est progressivement enfoncé dans une crise de résultats, qui a eu des effets jusqu'au sein de la direction, puisque plusieurs hommes forts (parmi lesquels le directeur du football Sven Mislintat, le président de son conseil de surveillance Pier Eringa, le directeur sportif Sven Mislintat et le directeur général Edwin van der Sar) ont quitté le club.
C'est désormais le coach intérimaire Hedwiges Maduro qui est chargé d'inculquer un nouvel état d'esprit sur le terrain. En coulisses, Louis van Gaal (72 ans) doit amener son expérience. «La Tulipe de Fer», le surnom qui lui a été donné en référence à ses méthodes strictes, a été nommé conseiller du club au début du mois et ne manquera pas de travail. Car on le sait, les clubs qui disputent la Coupe d'Europe ont moins de temps que les autres pour préparer leurs matchs de championnat le week-end. Or c'est le cas de l'Ajax, engagé dans un groupe de surcroît très relevé en Ligue Europa: les Néerlandais, battus 2-0 à Brighton jeudi, sont les derniers de la poule (qui compte aussi l'OM et l'AEK Athènes) avec deux unités en trois matchs. La saison va être longue.