Carlos Varela a disputé 45 matchs européens dans sa carrière de haut niveau. L'ancien joueur de Servette, de Bâle et des Young Boys a donc l'expérience des voyages. Quand on lui demande s'il lui est déjà arrivé de ne pas s'entraîner dans un stade adverse la veille du match, il répond que «non, jamais». C'est pourtant ce que va faire Braga cette semaine: le club portugais a décidé de ne pas fouler la pelouse du Stade de Genève à la veille du 3e tour préliminaire retour de Ligue Europa (0-0 à l'aller), prévu ce jeudi soir au bout du lac.
Carlos Varela, le choix de Braga vous surprend-il?
Oui, parce que je me suis toujours entraîné dans le stade adverse et que mes coéquipiers et moi avons toujours été contents de le faire. Cela nous permettait d'acquérir des repères visuels qui peuvent être précieux en match. C'est d'ailleurs parce qu'elle a ces repères qu'une équipe à domicile est souvent plus forte que son adversaire. Tout le monde parle de l'importance du public, mais ce n'est pas seulement cela.
Comment ces repères vous aidaient-ils?
C'est assez simple: quand je jouais à domicile, il me suffisait de jeter un coup d'oeil à la tribune pour savoir exactement où je me trouvais sur le terrain, et combien de mètres me séparaient des lignes. Or dans le feu de l'action, quand le ballon vient très vite sur vous, c'est important d'avoir ces informations immédiatement, surtout que les terrains n'ont pas tous les mêmes dimensions. Et vous ne centrez pas de la même manière si vous êtes un mètre plus proche de la ligne que ce que vous imaginiez.
Que fait exactement une équipe qui s'entraîne dans le stade adverse la veille d'un match?
Le premier objectif, c'est de voir comment le ballon réagit sur le gazon, parce qu'on peut dire ce qu'on veut, la pelouse n'est pas la même à Manchester United, à La Corogne ou dans les pays de l'Est. Il faut donc toucher le ballon, le faire circuler, pour soigner ses contrôles et savoir doser ses passes. Ça, c'est primordial. Ensuite, on règle les derniers aspects tactiques et on prend nos marques, sur la pelouse comme en dehors. On va dans le tunnel, puis dans le vestiaire, de sorte à ne pas être en terrain inconnu le lendemain.
Braga a changé d'entraîneur cette semaine, c'est peut-être la raison pour laquelle le club portugais a renoncé à son entraînement au Stade de Genève. À moins qu'il ne sous-estime son adversaire, ce dont pourraient se nourrir les Grenat.
Je pense sincèrement que les Servettiens se moquent de savoir si Braga s'est entraîné dans leur stade ou pas, ils n'en tireront aucun bénéfice.
C'est vrai que de plus en plus d'équipes ont pris l'habitude de s'entraîner chez elles avant chaque match européen à l'extérieur. C'était le cas de la Roma et de Tiraspol la saison dernière avant leur déplacement à Genève, et de Manchester City en Ligue des champions, à qui ça réussit plutôt bien.
Il y a un argument en faveur de ce type de préparation: imaginez qu'un entraîneur veuille faire une séance tactique très poussée à la veille du match, en préparant par exemple ses joueurs aux balles arrêtées. Vous savez que si vous allez dans un stade, vous serez observés même si vous réclamez le huis clos, car il y aura de toute façon des gens qui graviteront dans les tribunes et autour de la pelouse. C'est peut-être le raisonnement qu'a fait le nouveau coach de Braga, c'est même sûrement cela. Nous en tout cas, on faisait des mises en place très légères, on ne travaillait jamais les tactiques la veille de match à l'extérieur.
Lorsque vous jouiez au plus haut niveau (1995-2012), les stades se ressemblaient moins qu'aujourd'hui. Peut-être que les équipes perçoivent désormais moins l'intérêt de se déplacer?
Je ne crois pas. Si vous ne vous entraînez pas dans le stade adverse avant une partie européenne, il y aura forcément un moment où, le jour du match, vous allez voir quelque chose qui va vous surprendre, un détail que vous auriez pu observer la veille, et ce sera de l'énergie perdue.
Servette pourrait-il accentuer la surprise des Portugais qui découvriront son stade, en arrosant un peu plus la pelouse par exemple?
C'est tout à fait possible, c'est d'ailleurs ce qu'il nous est arrivé de faire quand je jouais à Bâle ou à Berne, je ne sais plus. On arrosait qu'une moitié du terrain en première mi-temps, de sorte à ce que les attaquants adverse aient des ballons qui fusent, et donc de la difficulté à les contrôler. Personne n'a jamais rien remarqué, mais je ne pense pas que ça se fait encore. Et puis, Servette et Braga savent très bien ce que l'autre équipe vaut.