Comment vos youtubeurs préférés braquent les supermarchés
Kombucha de Squeezie, pizzas de Mister V, barres protéinées de Tibo InShape... Les produits lancés par les créateurs de contenus cartonnent en grandes surfaces, permettant aux stars du web de diversifier leurs revenus, et aux magasins traditionnels de rafraîchir leur image.
Comme d'autres fans de Squeezie, Iliane Menguelti, lycéen normand de 16 ans, n'a pas pu résister aux sirènes de Ciao Kombucha, marque lancée en mai par le vidéaste au 20 millions d'abonnés.
La pub costaude de Squeezie pour sa kombucha 👇🏼
«Dès qu'on peut, on en achète pour tester tous les goûts», abonde auprès de l'AFP son amie Yasmine Halet au sujet de ce breuvage fermenté à base de thé, riche en probiotiques présentés comme bénéfiques pour la santé.
Vendu à Carrefour, Monoprix ou encore Auchan, Ciao Kombucha a généré 2,6 millions d'euros de chiffre d'affaires en grande surface ses trois premiers mois de commercialisation, se hissant au 4e rang des meilleures innovations 2025, selon une étude du cabinet NielsenIQ.
Victime de son succès, la boisson est longtemps restée difficile à trouver en magasin. Cyrille Jacques, associé de Squeezie et directeur des opérations de Ciao, relate auprès de l'AFP:
La tendance dure depuis quelques années
L'incursion des influenceurs dans l'alimentaire «n'est pas complètement nouvelle», rappelle à l'AFP Nicolas Léger, de NielsenIQ, citant les pizzas surgelées Delamama lancées en 2022 par le youtubeur Mister V (6,4 millions d'abonnés), qui «fonctionnent encore aujourd'hui». Mais «la tendance s'est accélérée en 2025».
En mars dernier, les chocolats Feastables de l'Américain MrBeast ont ainsi débarqué dans l'Hexagone, le roi du Youtube mondial (453 millions d'abonnés) s'étant rendu pour l'occasion au Carrefour de Chambourcy dans les Yvelines.
MrBeast explique pourquoi son chocolat est le meilleur au monde 👇🏼
Et Tibo InShape, premier youtubeur de France (27 millions d'abonnés) et spécialiste du fitness, s'est installé en grande surface - en juin chez Carrefour et plus récemment chez Auchan - avec sa gamme de produits protéinés InShape Nutrition, lancée en ligne il y a six ans.
Conseiller en communication des créateurs sur internet Adam Bensoussan décrypte pour l'AFP:
Il note aussi «une volonté de devenir quasiment un business autosuffisant», avec des produits promus et intégrés dans leurs propres contenus.
Habitués à se passer des médias traditionnels, ces entrepreneurs se tournent en revanche vers la grande distribution classique pour toucher le plus grand nombre.
Pensée «comme une alternative saine au soda», Ciao Kombucha doit «se trouver n'importe où, comme une canette de Coca», justifie Cyrille Jacques, invoquant aussi des «contraintes» particulières (produit frais, bouteille en verre) peu adaptées au commerce en ligne.
Pour Tibo InShape, la présence en grandes surfaces «est une manière de se faire connaître du grand public», d'accroître la «confiance» accordée à sa marque et d'attirer de nouveaux clients sur son site internet, où «les marges sont plus importantes», confie le youtubeur à l'AFP.
Suivre les tendances
Côté grande distribution, «l'intérêt, c'est de se différencier» et de répondre aux «effets de mode», résume pour l'AFP Stéphane Demay, directeur de marchés épicerie et liquide du groupe Carrefour, qui a profité d'exclusivités temporaires sur les Feastables et InShape Nutrition.
Il s'agit aussi de «se renouveler auprès des jeunes», selon Cécile Guillou, la présidente de Picard, enseigne de surgelés qui a récemment «fait le buzz» sur les réseaux sociaux avec ses glaces insolites en partenariat avec le youtubeur Joyca (6,8 millions d'abonnés).
Malgré des prix souvent supérieurs à la moyenne dans leurs catégories respectives, ces produits répondent à «un besoin de nouveauté», estime Romain Pobé, directeur marketing chez Monoprix.
La promo déjantée de Mister V 👇🏼
Les influenceurs, «connectés à leurs communautés et aux tendances, ont potentiellement un train d'avance» par rapport aux acteurs traditionnels de l'agro-alimentaire, et aident à «réveiller les rayons», explique-t-il à l'AFP.
Au risque de «déranger» et de susciter des «attaques» de «lobbies», comme l'a affirmé ces derniers jours Squeezie sur Twitch? Sollicité par l'AFP, son associé Cyrille Jacques n'a pas explicité ces propos.
