Dans le basket-ball européen, le rêve de Florentino Pérez en football, le président du Real Madrid, existe depuis longtemps: une Super League continentale plus ou moins fermée. Elle s'appelle Euroleague, elle est très attractive et un peu complexe à comprendre.
Les dix-huit équipes issues de neuf nations, d'Alba Berlin à Zalgiris Kaunas, ont attiré en moyenne plus de 10 000 spectateurs la saison dernière. A Belgrade, 21 000 billets ont été vendus en février: l'atmosphère dans la salle serbe est si légendaire qu'une visite s'y impose pour tous les passionnés de sport.
En bref: l'Euroleague est l'une des ligues indoor les plus populaires du monde, tous sports confondus. Mais on ne le réalise pas vraiment dans notre pays, car aucun Suisse n'y a participé depuis le Tessinois Anthony Polite, parti entre-temps au Japon, il y a trois ans avec Lyon.
La ligue fonctionne, elle est très divertissante et a survécu sans dommage à l'exclusion des équipes russes il y a trois ans. Dernièrement, elle a accueilli une nouvelle équipe à Paris et une formation de Dubaï devrait bientôt y être admise, même si l'émirat est loin des frontières européennes. En 2023, c'est le Real Madrid qui s'est imposé, le Panathinaïkos Athènes lui a succédé l'an dernier.
Les Grecs viennent d'ailleurs de prolonger le contrat de leur superstar Kendrick Nunn jusqu'en 2028 pour un total de 13 millions d'euros. Il s'agit de l'accord le plus lucratif de l'histoire du basket-ball européen. Nunn, 29 ans, a un long passé en NBA, et pourtant, il a renoncé à une clause de départ dans son nouveau contrat avec le Panathinaïkos.
C'est le signe de la grande attractivité de l'Euroleague. Même si son système de licence et de commercialisation peu clair la rend moins attrayante pour certains clubs. Le président du Partizan Belgrade vient, par exemple, de se plaindre des conditions selon lesquelles son club doit payer des frais de participation de 5 millions d'euros au cours des trois prochaines années, sans recevoir de recettes marketing. Une question de négociation et de libre arbitre.
Mais une chose est sûre: le basket-ball européen se débrouille très bien sans les Etats-Unis. Fin mars, la NBA et la Fédération internationale (Fiba), basée à Mies dans le canton de Vaud, ont signé une déclaration d'intention pour la création d'une nouvelle ligue. On ne sait pas encore de quelles équipes elle sera composée. Même si certaines des têtes d'affiche de l'Euroleague rejoignaient la nouvelle ligue, le projet semble trop ambitieux.
Avec quatre compétitions continentales (Euroleague, EuroCup, Ligue des champions et Europe Cup), la situation est déjà assez confuse. Et l'Europe ne dispose pas non plus d'un réservoir inépuisable de joueurs de qualité internationale. D'autant plus que les basketteurs européens n'ont jamais été aussi nombreux (63) en NBA. Parmi eux, il y a des superstars comme Luka Doncic (Slovénie, Los Angeles Lakers) et Giannis Antetokounmpo (Grèce, Milwaukee Bucks).
En 2024, la NBA a généré un chiffre d'affaires de 11,3 milliards de dollars, elle est une planche à billets pour les richissimes propriétaires d'équipes. Les 32 franchises ont réalisé un bénéfice moyen de plus de 70 millions de dollars et la ligue vient de conclure un nouveau deal médiatique de 76 milliards pour les onze prochaines années.
Mais pour ces milliardaires, ce n'est jamais assez, et l'Europe doit aider à remplir davantage les coffres-forts. Les Américains ont prouvé à maintes reprises qu'ils ne comprenaient pas la culture sportive européenne: la NFL Europe, ligue de football américain hautement déficitaire, a connu un échec cuisant et a été arrêtée en 2007.
Ces managers prétentieux ne comprennent pas que, contrairement à ce qu'il se fait aux Etats-Unis, on ne peut pas, en Europe, créer du jour au lendemain une équipe de remplacement dans n'importe quelle ville et remplir l'arène de spectateurs qui applaudissent avec des cartons mis à disposition par des sponsors.
En ce qui concerne la NBA, il suffit de regarder en Afrique. En 2019, elle a créé la «Basketball Africa League» et a fait appel, à grand renfort médiatique, à l'ancien président américain Barack Obama en tant que «conseiller stratégique».
Selon le portail d'information Bloomberg, cette ligue a perdu 17 millions de dollars au cours de l'exercice 2024. Et un parquet NBA exporté au Sénégal a été rongé par des termites pendant son transport. Un club du Burundi a été exclu du jour au lendemain parce que ses joueurs avaient refusé de porter les patchs obligatoires «Visit Rwanda» sur leurs maillots. Comme on le sait, le régime rwandais du président Paul Kagame pratique abondamment le sportwashing – en Europe également, où il sponsorise notamment le Bayern Munich, le PSG et Arsenal.
Les play-offs de l'Euroleague commencent le 22 avril. C'est une bonne occasion de se convaincre que le basket-ball européen n'a pas besoin des tentatives d'influence américaines motivées par la cupidité.
Traduction et adaptation en français: Yoann Graber