Reilly Opelka a pourtant remporté un tournoi de double (Atlanta 2021, avec Jannik Sinner), mais, le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il ne porte pas cette discipline dans son cœur.
Le tennisman américain (27 ans, ex-17e mondial) a fait une déclaration fracassante le mois passé sur Instagram, dans laquelle il propose rien de moins que de supprimer les tableaux de double du circuit. Avec, en prime, une attaque virulente sur les spécialistes. Voici ses propos, repris par le site spécialisé Tennis Temple:
«C’est (le double) pour les joueurs en simple qui ont échoué. Ils ne vendent pas de billets, ils occupent les terrains d'entraînement, les physios et les ressources, ils ne font pas de bénéfices et ils se plaignent de ne pas gagner assez d'argent. C'est un comportement assez cupide, si vous voulez mon avis. La meilleure solution serait de réduire le tirage au sort des doubles à 8 équipes et de n'autoriser que les joueurs de simple à s'inscrire. Ou... de s'en débarrasser tout simplement. Ce n'est pas une attaque personnelle contre les joueurs de double, c'est juste un calcul.»
Opelka fait certainement la même grimace quand il voit des matchs de double. Image: keystone
Forcément, ces paroles ont créé une vive émotion chez les principaux intéressés, dont certains ont réagi publiquement. Parmi eux, il y a l'Indien Rohan Bopanna (45 ans), légende du double avec 26 titres ATP, et ancien numéro 1 mondial, toujours en activité.
Le vainqueur de l'Open d'Australie 2024 (avec Matthew Ebden) – qui a amassé plus de sept millions de dollars durant sa carrière uniquement grâce au double – a choisi des arguments économiques pour défendre sa spécialité, puisque c'est sur ce terrain-là qu'Opelka a principalement attaqué. Bopanna a écrit sur Instagram:
«Pour tous ceux qui rejettent le tennis en double, comprenez ceci: jouer en double et en tirer un revenu m’a donné le pouvoir de rendre la pareille d’une manière qui compte vraiment. Cela a permis à des enfants défavorisés de découvrir ce sport, à plus de 30 filles de bénéficier d’une éducation et à une académie (celle qu'il a fondée en Inde, il y a neuf ans) de former de futurs champions. Et laissez‐moi vous dire que ceux qui bénéficient de ces opportunités ne se soucient pas de savoir si le soutien provient des gains en simple ou en double. Ce qui compte, c’est que cela change des vies.»
Rohan Bopanna (à gauche) a fêté son 1er et seul titre du Grand Chelem en double à l'Open d'Australie 2024, avec Matthew Ebden.Image: keystone
Ce n'est pas la première fois que Reilly Opelka et Rohan Bopanna s'affrontent via les réseaux sociaux. En 2023, l'Américain clamait déjà son envie de se débarrasser du double sur le circuit, et déjà avec l'argument du manque de public. L'Indien avait alors publié sur X une vidéo d'un match de double à Indian Wells, en prenant bien le soin de préciser, dans la légende, qu'il ne restait pas une seule place libre dans les tribunes.
Face au souhait d'Opelka, d'autres défenseurs du double louent le côté spectaculaire de cette discipline, qui permet de montrer une autre facette du tennis (tactique et coups joués différents qu'en simple) et de lui amener ainsi une plus-value.
«Le double, c'est le tennis»
Questionné par Tennis Legend lors du dernier Open d'Australie, le Monégasque Hugo Nys (sept titres en double et actuel 35e mondial) ne voit «pas trop pourquoi on essaye de combattre le double». Pour le trentenaire, la discipline permet même la démocratisation de la balle jaune.
«Le double fait partie du tennis depuis 120-130 ans. Tu demandes à n’importe qui dans la rue, ils aiment bien regarder du double. Je pense que 90% des gens de plus de 50 ans ne font que du double dans les clubs en France. C’est dommage qu’il y ait un mini débat sur la place du double parce que le double, c’est le tennis en fait.»
Battu dès le 1er tour – de simple, évidemment – à Indian Wells jeudi passé, Reilly Opelka aura peut-être profiter de son temps libre pour aller regarder quelques matchs de double et scruter les tribunes adjacentes, histoire de confirmer (ou pas) son avis.
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