L'ambiance n'est pas au football ces jours-ci au stade Lusail Iconic, au Qatar. Il y a deux ans, Lionel Messi soulevait ici même la Coupe du monde pour l'Argentine devant près de 90'000 spectateurs. L'émir du Qatar, Tamim bin Hamad Al Thani, avait revêtu la star d'une cape arabe traditionnelle, le bisht. L'image avait fait le buzz à travers la planète entière.
Les conditions de travail des ouvriers étrangers étaient également sous les projecteurs. Le nombre exact de décès sur les chantiers de ce Mondial reste encore très flou: le Qatar en a reconnu 414, tandis que le Guardian avançait 6'500 morts.
Aujourd'hui, ce stade de Lusail, à une quinzaine de kilomètres seulement de la capitale Doha, est clôturé.
Une photo du stade prise de loin est autorisée, mais pas plus. Les deux agents de sécurité scrutent chaque pas, se méfient et demandent: «Que faites-vous là?» Des photos, justement.
De toute façon, l'arène est, ce jour-là, à peine visible: une tempête de sable s'abat sur Lusail, de la même couleur que l'enceinte.
L'équipe de Suisse ne garde pas de bons souvenirs de ce stade: elle y a disputé son huitième de finale contre le Portugal, perdu 6-1.
Après le Mondial, les organisateurs expliquaient que le site serait transformé en une zone communautaire avec des centres de santé, des cafés, des écoles et des installations sportives. Mais ces plans n'ont jamais été mis en œuvre. Certes, des matchs de la Coupe d'Asie ont encore eu lieu en 2023 dans cette arène, mais le reste du temps, elle est restée en grande partie inutilisée.
La situation est similaire pour le stade 974. L'enceinte située sur le port de Doha est composée de 974 conteneurs maritimes. C'est le premier stade d'une Coupe du monde de football à être démontable et donc transportable. C'était d'ailleurs le projet initial: il aurait dû être déplacé en Afrique après le tournoi.
Ce stade est donc resté inutilisé pendant deux ans après le dernier match de la Coupe du monde. Les panneaux d'information sont restés les mêmes que durant le Mondial. Les nombreuses grilles qui entourent l'arène laissent deviner, comme autour des autres stades, qu'aucune partie n'y a été jouée depuis. C'est également ce que confirme l'agent de sécurité sur place.
Les conteneurs restent intacts, mais font régulièrement l'objet de photos de la part des touristes. Toutefois, ce stade 974 reprend temporairement vie cette semaine en accueillant la Coupe intercontinentale de la Fifa.
Depuis la Coupe du monde, six des huit stades ont néanmoins été utilisés à plusieurs reprises pour diverses manifestations. Par exemple pour la Diamond League d'athlétisme ou des défilés de mode. Des matchs de la Qatar Stars League (première division national de football) ont lieu de temps en temps, mais l'intérêt est faible, racontent plusieurs personnes dans le pays. Les enceintes sont uniquement bien remplies quand une star internationale foule la pelouse, explique un expatrié suisse. «Mais l'ambiance reste limitée».
Il a également été dit que certains stades seraient démontés et que les sièges seraient donnés à des pays en développement.
De même, le projet de transformer le site d'Al Bayt en un hôtel cinq étoiles, un centre commercial, un food court, un centre de fitness et une salle polyvalente n'a pas abouti. «Personne ne sait vraiment ce qui se passe et personne n'en parle», avoue un habitant rencontré sur place. Seul le personnel de sécurité, qui surveille tous les stades 24 heures sur 24, semble vraiment s'intéresser à ces arènes.
Le Mondial 2034 aura lieu en Arabie saoudite, comme l'a confirmé la Fifa ce mercredi. Alors qui sait, peut-être que le stade 974 ou les milliers de sièges dont on voulait de toute façon faire cadeau se retrouveront dans dix ans dans ce pays voisin du Qatar.
Traduction et adaptation en français: Yoann Graber