La date du 25 juillet était attendue par tous les judokas engagés aux Jeux olympiques de Paris 2024. C'est là, à l'issue du tirage au sort des différents tableaux, que les combattants ont découvert les noms de leurs futurs adversaires. C'est aussi là que l'Algérien Dris Messaoud a appris qu'il croiserait le fer avec l'Israélien Tohar Butbul, en éliminatoires dans la catégorie des moins de 73 kilos.
Pour beaucoup, l'affaire était déjà entendue. «Dris Messaoud devra renoncer à son rêve olympique», titrait dès l'annonce du combat La Gazette du fennec. L'Algérie participant au boycott d'Israël par la Ligue arabe et ne reconnaissant pas officiellement l'Etat hébreu, il ne faisait presque aucun doute que le combat Messaoud-Butbul prévu lundi n'aurait pas lieu. Il était évident que le judoka algérien ne monterait pas sur le tatami, quand bien même il l'aurait souhaité.
Le boycott d'Israël dans le sport n'est pas nouveau. Il est même fréquent en judo. L'école israélienne est l'une des meilleures au monde et les pays arabes ont une propension à produire de nombreux talents. Les oppositions sont donc courantes et la liste des combattants venant d'Iran, d'Algérie ou encore du Liban, et ayant refusé d'affronter un judoka israélien, est longue, quel que soit le prestige de la compétition.
Les Jeux olympiques sont ainsi fortement touchés. A Athènes en 2004, l'Iranien Arash Miresmaeili, double champion du monde, avait choisi de ne pas affronter l'Israélien Ehud Vaks au premier tour dans la catégorie des moins de 66 kilos. La médaille d'or lui était pourtant promise. L'Égyptien Islam El Shehaby, lui, s'était présenté face à Or Sasson en 2016 à Rio. Mais battu par ippon, il avait indigné en ne saluant pas le natif de Jérusalem.
Mais le cas le plus retentissant est sans doute celui de Fethi Nourine aux JO de Tokyo il y a trois ans. Il s'était retiré du tableau des moins de 73 kilos, car une victoire face au Soudanais Mohamed Abdalrasool l'aurait amené à défier Tohar Butbul, ce même combattant se dressant sur la route de Dris Messaoud à Paris. La Fédération internationale de judo (IJF) avait alors frappé fort. Nourine et son entraîneur avaient été suspendus 10 ans pour avoir utilisé les Jeux «comme une plate-forme de protestation et de promotion de la propagande politique et religieuse», et donc violé la Charte olympique.
Une façon de ne pas combattre sans risquer pareille sanction existe et est désormais usée par certains judokas. Elle consiste à ne pas respecter la pesée, celle-ci ayant lieu la veille de la compétition et surtout, après le tirage au sort. On ne peut dès lors plus incriminer l'athlète, bien que chacun puisse se faire son avis sur la situation.
Le verdict est tombé pour l'Algérien Dris Messaoud dimanche soir. Pesé à 73,4 kilogrammes, il ne défendra pas ses chances ce lundi matin sur le «tapis 2» à l'Arena Champ-de-Mars, en éliminatoires du tournoi olympique. «Cela n'échappe à personne que c'est un subterfuge», glisse dans L'Equipe un observateur algérien avisé. Le Comité olympique israélien n'est pas non plus dupe. «Ce type de comportement n'a pas sa place dans le monde du sport», a réagi l'instance. Pour rappel, le Marocain Abderrahmane Boushita, éliminé dimanche par l’Israélien Baruch Smailov sur waza-ari en éliminatoires des moins de 66 kilos, a refusé de serrer la main de son adversaire. Il n'a en revanche pas eu à se retirer du tableau, le Maroc ayant normalisé ses relations avec Israël depuis plusieurs années maintenant.