Les Etats-Unis de Ledecky et Dressel ont dominé de main de maître les épreuves de natation aux Jeux olympiques de Tokyo il y a trois ans. Mais aux Mondiaux à Fukuoka la saison dernière, la Chine, emmenée par Qin Haiyang, a donné du fil à retordre aux Américains ainsi qu'aux Australiens. La bataille devrait encore faire rage cette année à Paris, et ce, dès les relais 4x100 mètres nage libre prévus ce samedi à La Défense Arena, auxquels participeront les deux nations.
Ces compétitions, qui témoignent de la force d'un pays, seront surveillées de près, car elles interviennent seulement quelques mois après les révélations du New York Times et de la chaîne de télévision allemande ARD. La planète sport a en effet appris en avril dernier que 23 nageurs chinois avaient été testés positifs à la trimétazidine - un médicament augmentant le flux sanguin - quelques mois avant les Jeux olympiques de Tokyo.
Une enquête de l'Agence antidopage chinoise (Chinada) avait conclu qu'il y avait des traces de trimétazidine dans l'hôtel de ses athlètes. C'est ainsi qu'elle avait innocenté ses nageurs et que l'Agence mondiale antidopage (AMA) n'avait pas été en mesure de contester les faits. Face aux critiques, portant sur les décisions prises et la dissimulation de l'affaire, l'Agence américaine antidopage (USADA) a demandé une profonde réforme de l'AMA. Deux enquêtes, dont l'une menée par le procureur suisse Eric Cottier, ont néanmoins conclu que l'instance n’a fait preuve d’aucun parti pris dans la gestion de ce dossier compliqué.
Ces études, ou du moins leurs conclusions, ne satisfont toutefois pas l'Agence américaine, qui a récemment appelé son ministère de la Justice à enquêter, tandis que le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a déclaré peu avant le début des Jeux olympiques qu'il y avait un acharnement envers la natation chinoise. Il a ainsi évoqué une affaire «inexistante», «que les Etats-Unis continuent de vendre», dans le but de «dégrader» les athlètes chinois et «d'entraver leur participation aux Jeux olympiques de Paris», détaille Reuters. Pékin a en outre refusé de dévoiler les résultats de son enquête, malgré la demande insistante de l'USADA.
Le triple champion du monde de brasse Qin Haiyang, principal rival du Britannique Adam Peaty, se montre encore plus dur que son gouvernement. A Paris, il a d'abord regretté les contrôles supplémentaires subis par les athlètes chinois, des tests que l'AMA a promis après les révélations du mois d'avril. Le nageur a évoqué ensuite «un complot européen et américain» visant à perturber la délégation chinoise.
En face, le quintuple médaillé d'or à Tokyo, Caeleb Dressel, a confié à quelques heures de l'ouverture des Jeux olympiques qu'il n'avait plus confiance dans l'équité en natation. «Non, pas vraiment. Je ne pense pas qu'ils nous aient donné assez de preuves», a répondu l'Américain lorsqu'on lui a demandé si les organisateurs étaient parvenus à créer un environnement suffisamment équitable. Katie Ledecky espère pour sa part «que tout le monde concourra en étant propre», mais «attend des changements dans le futur». L'Australien Zac Stubblety-Cook, qui défiera Qin Haiyang, envisage quant à lui de protester contre la présence de son rival chinois dans le bassin, par exemple en cas de podium commun. Enfin, Michael Phelps et Allison Schmitt ont eux aussi appelé le mois dernier à une réforme de l’Agence mondiale antidopage.
11 des 23 nageurs impliqués dans le scandale en avril dernier sont présents à Paris. Rob Koehler, directeur de Global Athlete, un mouvement mondial visant à faire entendre la voix des sportifs, estime pour CNN que les tensions pourraient croitre si l'un d'entre eux remporte une médaille à Paris.
Alors que les délégations occidentales, notamment celle des Etats-Unis, en veulent aux instances et ont perdu confiance en l'AMA, les athlètes chinois se sentent lésés et se montrent particulièrement critiques vis-à-vis de la situation actuelle. C'est dans ce contexte particulier que débuteront dans quelques heures les premières finales dans le bassin francilien de La Défense Arena.