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«Mercato» et Jamel Debbouze ont raté une belle occasion

Jamel Debbouze incarne Driss Berzane, un agent de joueurs qui doit échapper à des truands.
Jamel Debbouze incarne Driss Berzane, un agent de joueurs qui doit échapper à des truands.image: x

«Mercato» et Jamel Debbouze ont raté une belle occasion

Cette comédie dramatique signée Tristan Séguéla, dans les salles romandes depuis le 19 février, nous immerge dans le quotidien stressant d'un agent de joueurs de foot. Ni drôle ni instructive.
20.02.2025, 16:5520.02.2025, 16:55
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C'est toujours risqué pour un réalisateur de s'attaquer à un milieu aussi spécifique que les coulisses du football. Si le jargon et les codes ne sont pas maîtrisés, le film tourne vite au ridicule aux yeux des connaisseurs.

Avec Mercato, Tristan Séguéla évite au moins cet écueil. Dès le début du film, on plonge dans le quotidien très mouvementé de Driss Berzane (incarné par Jamel Debbouze), agent de joueurs en pleine période de transferts (le mercato). Des jours particulièrement intenses pour les agents. Et ce quadra surexcité a même droit à une dose de stress supplémentaire: il doit absolument vendre le meilleur footballeur dont il s'occupe – Mehdi Bentarek (personnage fictif, incarné par Hakim Jemili), du Paris Saint-Germain – à un autre club. Avec un seul objectif: rembourser, grâce à sa commission, des truands, caïds de la cité, à qui Berzane doit de l'argent.

Driss Berzane (Jamel Debbouze) inquiet dans les tribunes du Parc des Princes.
Driss Berzane (Jamel Debbouze) inquiet dans les tribunes du Parc des Princes. image: instagram

Tristan Séguéla a eu la bonne idée d'utiliser les vrais noms de clubs, de quoi rendre Mercato plus réaliste et crédible aux yeux des connaisseurs de foot, réussissant ainsi à les immerger dans l'histoire sans pour autant larguer les profanes. Les initiés apprécieront aussi les références, qui dénotent la bonne connaissance du milieu de la part du réalisateur (ou en tout cas sa recherche approfondie).

Pour Mehdi Bentarek, c'est par exemple nase de devoir signer à Guingamp et jouer, ainsi, ses matchs dans le petit stade du Roudourou (qui ne fait pas vraiment rêver). Tous les vrais joueurs du PSG partagent certainement cet avis. Berzane, lui, promet à son poulain qu'il «claquera un doublé au Mestalla de Valence avec Séville ou Barcelone».

Mercato parvient aussi à aborder des thèmes d'actualité – de foot et sociétaux – avec réalisme. Il y a l'Arabie saoudite et son dilemme pour les stars du ballon rond, qui hésitent à y compromettre sportivement leur carrière malgré les millions de pétrodollars offerts par les clubs. Ou encore les incompréhensions entre un père boomer et son fils de 15 ans woke: Driss Berzane, obnubilé par l'argent, est insensible aux aspirations écologistes, égalitaristes et féministes de son ado, Abel (Milo Machado-Graner).

Les incompréhensions sont nombreuses entre Driss Berzane (Jamel Debbouze) et son fils Abel (Milo Machado-Graner).
Les incompréhensions sont nombreuses entre Driss Berzane (Jamel Debbouze) et son fils Abel (Milo Machado-Graner).image: keystone
Malheureusement, ces points forts du film sont éclipsés par un scénario trop téléphoné et réchauffé.

Le compte à rebours pour rembourser des malfrats qui viennent intimider leur victime? Vu et revu. Un athlète suspendu pour consommation de cocaïne après avoir embrassé une femme en boîte? Pareil (c'est l'excuse qu'avait avancée le tennisman Richard Gasquet après avoir été contrôlé positif). Et en voyant Berzane incapable de transférer Bentarek, le spectateur peut trop facilement imaginer chaque nouvelle idée de l'agent pour se faire du blé et enfin payer sa dette.

Des scènes surjouées et un Jamel trop authentique

Si une comédie requiert des comportements caricaturaux des protagonistes, certaines scènes de Mercato sont surjouées inutilement. On pense par exemple à la maman du jeune Erwin, prodige de 12 ans chapeauté par Berzane, hystérique en tribune après chaque dribble réussi de son gamin. Ou à l'intervention grotesque de l'agent en plein match de rue, qui enguirlande un gosse après qu'il a fait trébucher son fiston Abel.

Hormis quelques rares scènes, Jamel Debbouze ne réussit pas à sortir de son propre personnage, gentil caïd de cité survitaminé aussi chambreur que paternaliste. Même si on appréciera quelques répliques calembouresques si typiques de l'ex-star de H (il s'extasie devant «Zizou-Christ» et propose un «burger de téfou» à son fils végane), incarner un agent de footballeurs nécessitait de sortir (au moins un peu) de ce registre.

La bande-annonce de Mercato

Et c'est justement là où le bât blesse pour Mercato: présenté comme une comédie, il n'est est pas une. Pour preuves: certaines scènes de violence physique ou verbale très crues et si réalistes, ainsi que l'absence de rires dans la salle. Mais le film de Tristan Séguéla n'est pas non plus un docufiction qui permettrait d'en apprendre plus sur le milieu opaque des intermédiaires du football.

En ne choisissant ni l'un ni l'autre, Mercato a raté une belle occasion. De faire vraiment rire ou d'instruire. Loin d'être un chef-d'œuvre comme le but en reprise de volée de «Zizou-Christ» (Zinédine Zidane) en finale de la Ligue des champions 2002 avec le Real Madrid contre Leverkusen, que Driss Berzane raconte si bien, ce film restera un simple divertissement possible lors d'une longue et froide soirée d'hiver.

Mercato (122 minutes) de Tristan Séguéla, dans les salles de Suisse romande depuis le 19 février.

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