Tout s'accélère autour des Enhanced Games, ces «Jeux olympiques pour dopés», où tout ou presque sera permis dans le but avoué de pulvériser les records.
L’événement dispose d’un lieu et d’une date, comme l’ont annoncé les organisateurs fin mai. Il se tiendra du 23 au 25 mai 2026 au Resorts World Las Vegas, soit dans la ville de tous les péchés. Cela ne pouvait pas en être autrement.
Côté disciplines, les Enhanced Games proposeront de la natation (50 et 100 mètres nage libre, 50 et 100 mètres papillon), de l’athlétisme (100 mètres, 100 et 110 mètres haies) ainsi que de l’haltérophilie. A la clé, des primes de 250 000 dollars en cas de record du monde, avec un bonus d’un million de dollars si la performance concerne le 100 mètres plat ou le 50 mètres nage libre.
Les règles ont également été clarifiées: les participants pourront utiliser des substances certes interdites dans le cadre sportif, mais légales aux Etats-Unis. Cela inclut par exemple la testostérone, l’hormone de croissance ou certains stéroïdes anabolisants, mais pas la cocaïne. Le cocktail explosif doit seulement être approuvé par la Commission médicale indépendante des Jeux améliorés.
En outre, un nombre limité de sportifs bénéficiera d’un suivi médical complet assuré par l’organisation et recevra les produits dans le cadre d’un essai clinique. «Nous sommes ici pour faire progresser l’humanité», a déclaré en ce sens Aron D'Souza, fondateur d'un événement qui continue d'inquiéter les instances sportives.
Une semaine après que World Athletics a interdit à ses athlètes de participer aux «Jeux pour dopés», sous peine de bannissement, l’Agence mondiale antidopage (AMA) a demandé ce mercredi – en marge d'une rencontre de l'Association des fédérations internationales des sports olympiques d'été (ASOIF), à Lausanne – aux autorités américaines d’empêcher la tenue des compétitions. Des actions en justice pourraient être engagées.
Présents eux aussi à Lausanne, à l’occasion du Forum international des athlètes jusqu'à jeudi, les sportifs de haut niveau, membres des commissions des athlètes du CIO et de l’Agence mondiale antidopage, ont également exprimé leur profonde indignation ainsi que leurs inquiétudes.
Cependant, tous les sportifs ne partagent pas la même vision. C'est le cas, par exemple, de Kristian Gkolomeev, quatre participations aux Jeux olympiques.
Le nageur grec a rejoint le programme en décembre dernier et a déjà effectué des tests, comme l'ont révélé les organisateurs des Enhanced Games lors de la présentation en grandes pompes de l'événement, à Vegas. Selon eux, Gkolomeev aurait nagé, en février et dans l'anonymat total, en améliorant de deux centièmes l'emblématique record de la distance détenu par l'icône brésilienne César Cielo (20"91).
Deux mois plus tard, il aurait récidivé avec un temps encore jamais signé sans combinaison (21"03). Ces performances n'ont pas été vérifiées et ne seront jamais homologuées, étant donné qu'elles ont été réalisées hors compétition et avec l'utilisation de substances illicites.
A 31 ans, et avec la fin de sa carrière qui se profile, Kristian Gkolomeev admet que l’appât du gain joue un rôle important dans sa décision. «Une année réussie aux Enhanced Games équivaut pour moi à ce que je pourrais gagner en 10 carrières», a-t-il confié dans les colonnes d'ESPN. Ces Jeux sont aussi pour lui une opportunité d'atteindre son potentiel maximum.
Ce potentiel, justement, suscite l'intérêt de certains médecins et membres de la communauté scientifique, curieux d'approfondir leurs connaissances sur l'amélioration des capacités humaines. Il attire également les entrepreneurs et investisseurs, fascinés par l'idée de repousser les frontières de la longévité et séduits par le modèle économique des Enhanced Games.
Les organisateurs espèrent, à terme, générer des revenus en commercialisant des produits destinés à améliorer la performance. En coulisses, certains évoquent un modèle économique similaire à celui de la marque Red Bull, qui utilise le sport extrême pour promouvoir ses boissons énergisantes.
Les Enhanced Games auraient ainsi levé plusieurs millions de dollars, soutenus par Peter Thiel, le fondateur de PayPal, ainsi que 1789 Capital, une société d'investissement partiellement dirigée par Donald Trump Jr.
Mais pour l'heure, seuls quatre athlètes, tous nageurs, seraient inscrits à l'événement selon L'Equipe. Athlètes, ou plutôt cobayes, à en croire les essais réalisés sur James Magnussen, double champion du monde du 100 mètres nage libre en 2011 et 2013.
L'Australien s'est testé en compagnie de Kristian Gkolomeev en début d'année, rapporte le quotidien français. Cependant, sa quête de record a échoué, en raison d'un protocole apparemment absurde.
S'il a pris près de 20 kilos de plus que son poids de forme d'antan en l'espace de quelques semaines, cette nouvelle morphologie a massivement freiné ses performances. «J'étais si énorme que j'aurais dû prétendre au titre de Mister Univers plutôt qu'à essayer de battre des records dans une piscine», a concédé le nageur dans un grand format dédié à ces Jeux controversés.
Mais James Magnussen ne semble pas se soucier des risques encourus pour sa santé. «Je suis prêt à me doper jusqu'aux os pour gagner un million de dollars», a-t-il déclaré.