Les terrains synthétiques ont toujours aussi peu de sympathisants. La plupart des spectateurs pestent contre le football qui y est pratiqué (et qui ne ressemble pas à celui qu'ils ont connu et aimé), ces ballons au rebond haut et ce plastique dont l'éclat fait mal aux yeux, quand les joueurs redoutent de se faire mal aux cuisses et aux genoux à chaque tacle sur ce sol trop rigide pour amortir les glissades. Et c'est pire en été, car lorsqu'il fait très chaud, le terrain artificiel malmène les footballeurs sitôt le premier orteil posé.
«Lorsque le soleil tape, le synthétique, qui est rempli de plastique, devient vite très chaud, explique Arnaud Goutorbe, podologue du sport chez Motion Lab à Lausanne. Or les crampons des joueurs sont aussi en plastique. Le frottement entre la semelle de la chaussure et le terrain ne fait qu'accentuer la chaleur.» Le spécialiste appelle ça un «échauffement», et ça n'a rien à voir avec les exercices d'avant-match.
L'échauffement dont Arnaud Goutorbe parle provoque des lésions aux pieds, des ampoules et des mycoses, ce qu'on appelle des pieds d'athlète (lorsque des crevasses apparaissent entre les orteils); autant de symptômes consécutifs à une transpiration excessive provoquée par la chaleur du «synthé».
Ces effets indésirables sont bien sûr plus marqués lorsque les terrains en plastique sont de piètre qualité, mais il arrive aussi que des revêtements d'excellente facture malmènent les sportifs en juillet et août. Selon nos informations, un club de football suisse est confronté à ce problème alors que son terrain répond aux exigences les plus élevées dans le domaine.
Le problème, c'est qu'il n'existe aucune solution pour contourner cette menace. Les clubs ne peuvent pas organiser des entraînements aux aurores ou tard le soir pour éviter les effets du soleil, et il n'est pas possible non plus d'arroser le terrain synthétique à outrance pour le refroidir, car cela provoquerait des glissades et exposerait les joueurs à des risques de blessures plus graves encore.
La solution parfaite, finalement, serait de jouer sur du revêtement naturel, du gazon qui sent l'herbe. «C'est vrai. D'ailleurs tout le monde le dit: les physios, les médecins du sport et les podologues, rappelle Arnaud Goutorbe. Mais c'est moins cher d'entretenir un terrain synthétique qu'un gazon naturel.» La moralité, c'est que dans ce domaine aussi, l'argent passe avant le bien-être des athlètes.