Le vététiste suisse Mathias Flückiger dit ressentir un énorme soulagement. «Je viens de vivre les cinq pires mois de ma vie. Je ne me suis jamais dopé. Après cette attente très éprouvante, j'envisage à nouveau l'avenir avec optimisme.» Le coureur de 34 ans travaille quotidiennement à son retour et se dit «plus motivé que jamais».
La suspension provisoire prononcée le 18 août dernier à l'encontre du médaillé d'argent des JO de Tokyo (et ancien numéro un mondial) a été levée avec effet immédiat par la Chambre disciplinaire du sport suisse. Les juges suivent ainsi l'argumentation de l'accusé selon laquelle son résultat au test Zeranol du 5 juin ne doit pas être considéré comme un résultat positif au dopage.
Concrètement, le cas est renvoyé à l'autorité d'enquête de Swiss Sport Integrity (SSI) pour traitement. Le jugement se base sur la constatation que la SSI n'a pas mené la procédure conformément aux règles en vigueur de l'Agence mondiale antidopage (Wada). Concrètement, le droit d'être entendu n'a pas été accordé au sportif avant le prononcé de sa suspension.
Le règlement de la Wada est très précis lorsqu'une procédure est engagée contre un athlète qui présente un taux d'une substance anabolisante inférieur au seuil de 5 nanogrammes par millilitre. Chez Flückiger, 0,3 ng/ml de la substance Zeranol, très rarement détectée dans les cas de dopage, ont été découverts.
Cela peut être le signe d'une contamination par la viande (le Zeranol est utilisé dans certains pays hors d'Europe pour l'engraissement des animaux) mais aussi, théoriquement, d'une quantité résiduelle d'une prise de dopage antérieure. Or Flückiger avait été déjà contrôlé six jours avant son résultat positif lors des Championnats suisses de Leysin le 5 juin et ce contrôle n'avait rien révélé d'anormal.
Plusieurs experts internationaux en matière d'antidopage et de stéroïdes anabolisants ont également mis en doute la thèse selon laquelle Flückiger aurait triché. «Quel athlète prendrait un risque aussi grand en se dopant avec une substance aussi facile à détecter et dont l'effet n'est pas scientifiquement prouvé?», s'est par exemple demandé un chercheur, auteur de plusieurs études sur le dopage.
La levée de la suspension provisoire ne signifie toutefois pas que le vététiste de 34 ans est acquitté. La Wada, mais aussi l'unité juridique antidopage de l'Union cycliste internationale, ont 21 jours pour faire appel de la levée de la suspension auprès du Tribunal international du sport (TAS).
Dans leur demande d'annulation de la suspension du 16 septembre, les juristes de Mathias Flückiger n'ont pas seulement dénoncé la procédure de l'autorité d'enquête. Ils ont montré comment une contamination avait pu se produire et ont également fourni des faits à ce sujet.
Le cas est maintenant renvoyé à Swiss Sport Integrity pour évaluation. L'organisation examine maintenant les possibilités juridiques. Elle reste d'avis que, sur la base des nombreuses investigations, Flückiger a présenté un résultat d'analyse anormal et que la suspension provisoire était donc impérative.
L'autorité antidopage suisse peut d'une part tenter de faire appel de la décision. Mais Swiss Sport Integrity pourrait aussi décider, sur la base des faits, de clore la procédure ordinaire contre Mathias Flückiger, ce qui serait à nouveau examiné par la Wada. Les deux voies sont actuellement envisageables.
Mathias Flückiger espère désormais que son cas sera clos «le plus rapidement possible. L'incertitude permanente, l'attente de plusieurs mois, les accusations infondées doivent enfin prendre fin. Je m'attaque maintenant à la planification de ma saison 2023 et je veux bientôt reprendre la compétition».
Adaptation en français: Julien Caloz