Dans le cadre du «Trophée de formation» instauré par la Swiss Football League (SFL) pour encourager la relève, les clubs professionnels suisses perçoivent des revenus supplémentaires lorsqu’ils font jouer de jeunes joueurs.
Les équipes qui cumulent un certain nombre de minutes avec des talents locaux de moins de 21 ans se partagent une enveloppe d’un million de francs, portée à 1,1 million la saison prochaine. Mais là où des fonds sont en jeu, les tensions ne tardent jamais à apparaître, comme en témoigne le différend entre Nyon et des formations de Challenge League.
En fin de saison dernière, une fois leur maintien assuré, les Vaudois ont soudain aligné un grand nombre de joueurs U21, parfois jusqu’à huit par match. Cette stratégie irait à l’encontre de l’esprit du dispositif, selon plusieurs clubs de deuxième division, dont le FC Wil.
Elle a toutefois permis au Stade Nyonnais d'atteindre de justesse le seuil requis de 8 000 minutes, ce qui a fait grimper sa part du gâteau de 50 000 à environ 330 000 francs. Pendant ce temps, les gains des deux autres leaders du classement, Schaffhouse et Wil, ont fortement diminué, chacun enregistrant une perte d’environ 140 000 francs.
La ligue précise que les versements n’ont pas encore été effectués, une procédure étant en cours. En effet, il est apparu que lors de l’avant-dernier match de la saison (perdu 3-1 contre Xamax), le Stade Nyonnais a aligné un jeune joueur manifestement non qualifié pour jouer en première équipe. Ce dernier bénéficiait d’une double licence, lui permettant d’évoluer à la fois avec un club de 4e ligue et avec les équipes de jeunes de Nyon, mais pas avec l’équipe fanion.
C’est le FC Wil qui a découvert cette irrégularité après coup. Son directeur général, Benjamin Fust, explique que, compte tenu des enjeux financiers, le club saint-gallois a examiné la situation de près et effectué une vérification rigoureuse des joueurs alignés. Selon lui, tout laisse penser que la ligue aurait «ignoré, malgré une demande préalable de Nyon, l’absence de qualification» du joueur en question.
La commission disciplinaire de la SFL a refusé d’attribuer le match à Xamax sur tapis vert, jugeant que Nyon avait agi «de bonne foi». Cependant, la question du «Trophée de formation» donne une toute autre ampleur à l’affaire. C’est en effet l’alignement de ce joueur non autorisé qui a permis à Nyon d’atteindre le seuil des 8 000 minutes. Le FC Wil a donc officiellement saisi la ligue, rapporte Benjamin Fust.
Le règlement de la SFL stipule que les cas «imprévus ou douteux» doivent être examinés par le comité de la ligue, composé de représentants des clubs, ce qui a bien été respecté dans ce dossier. Benjamin Fust affirme avoir clairement exposé la position du FC Wil aux différents membres. Même si le staff de Nyon n’a pas été informé avant le match de l’absence de licence, «il incombe en dernier ressort aux clubs de garantir l’éligibilité de leurs joueurs».
Le comité a tranché: les minutes disputées par le joueur en question ne devraient pas être prises en compte dans le calcul du «Trophée de formation». C’est du moins ce qu’indique Benjamin Fust. La Swiss Football League (SFL), elle, reste sur la réserve. Le dossier étant toujours en cours et juridiquement sensible, l’instance préfère ne pas s’exprimer davantage.
Dans un bref communiqué, elle se contente de préciser: «Un club de Challenge League conteste le calcul des contributions liées au «Trophée de formation». Il a donc fait appel auprès du Tribunal arbitral du sport (TAS). La SFL ne peut donner aucune information sur cette procédure en cours».
Nyon ne souhaite pas s’exprimer sur la situation à ce stade. Si la décision du comité était effectivement portée devant le TAS, les aspects juridiques seraient alors minutieusement examinés. Ceux-ci tourneraient probablement autour des questions suivantes: dans quelle mesure le Stade Nyonnais a-t-il agi «de bonne foi»? Les minutes disputées par le joueur non autorisé doivent-elles être exclues du décompte pour le «Trophée de formation»? Pour le FC Wil, le doute n’a pas lieu d’être. «Nous sommes convaincus que le comité a pris une décision conforme à l’esprit du trophée, affirme Benjamin Fust.
Pour éviter que ce genre de situation ne se reproduise, des ajustements seront mis en place dès la saison prochaine. Lors des neuf dernières journées de Challenge League, un maximum de 360 minutes par match pourra être pris en compte. La seule exception concernera les équipes affichant une moyenne supérieure lors des rencontres précédentes, auquel cas cette moyenne servira de plafond. De quoi calmer un peu les tensions.