«Un cri du cœur», comme il le dit lui-même. La semaine passée, Filippo Lombardi a adressé deux lettres ouvertes aux fans d'Ambri-Piotta. Le président du club léventin de hockey sur glace y déplore les «petits vols et dommages» dans la nouvelle enceinte biancoblu, la Gottardo Arena, causés lors du derby tessinois contre Lugano le 1er octobre. Bilan: deux portes de sécurité endommagées, catelles cassées dans les WC du secteur visiteur, bouteilles de vin et bières volées dans les dépôts et quelques graffitis.
⚪️ 🔵 Precisazioni, buone notizie e invito al rispetto - Seconda lettera aperta ai tifosi HCAP da parte del Presidente Filippo Lombardi #HCAP https://t.co/vBIggbO1ro pic.twitter.com/222KYztCbl
— HC Ambrì Piotta (@HCAP1937) October 8, 2021
Filippo Lombardi a des mots forts, surtout quand il évoque le vol de cinq maillots – rendus peu après anonymement – dans le vestiaire, «la chose qui nous a particulièrement blessés». Son objectif: rappeler les valeurs du sport, pour que de tels incidents ne se reproduisent pas.
Dans votre lettre, vous parlez d'un «sanctuaire profané» en évoquant le vol des maillots. Un vestiaire de hockey sur glace, c'est vraiment sacré?
FILIPPO LOMBARDI: Oui, parce qu’on vit une partie importante de la préparation sportive dans ce vestiaire, on forme un groupe très fermé qui n’est solide que quand il est très uni, sans intervention extérieure. On ne doit jamais être distrait par des choses qui viennent de l’extérieur. Ça vaut pour les entraînements et évidemment avant, pendant et après les matchs. Le seul moment où on se laisse un peu aller avec une bière et de la musique, c’est après une victoire. Le reste du temps, c’est un lieu de concentration absolue.
Y a-t-il des symboles concrets qui marquent cet aspect sacré?
Dans l'ancienne Valascia, la bonne vieille tradition était de ne pas marcher sur le logo du club au sol. Ça m’est arrivé moi-même de payer 1000 francs d’amende à la caisse des joueurs parce que j’avais marché dessus sans faire exprès. Mais on a résolu ce problème dans la nouvelle patinoire:
Vous avez aussi écrit que les joueurs n'auraient pas eu le même état d'esprit s'ils avaient dû jouer avec des répliques à cause des vols de maillots. Ceux-ci sont-ils aussi sacrés?
Ils le sont pour les joueurs. Ils n'en reçoivent que deux par saison, un pour les matchs à domicile et l'autre pour ceux à l'extérieur. Les répliques sont fabriquées avec un matériel différent et les joueurs n’apprécieraient certainement pas de jouer avec elles, parce qu'elles sont trop fragiles. On peut commander des vrais maillots en cas d'accident, mais ça prend quelques jours. On ne les aurait pas eus pour le prochain match.
Vous appelez les fans à mieux traiter la nouvelle enceinte que l'ancienne, au risque qu'elle se dégrade vite. Faut-il donc éduquer les gens, incapables de se responsabiliser?
Dans une nouvelle patinoire, le public doit acquérir une nouvelle culture du rapport avec le matériel, l'équipe et les fans adverses.
Comme c'était vétuste, on ne voyait pas de problème particulier à le faire, mais ça le devient dans une nouvelle infrastructure où les déprédations se voient.
Il est peut-être plus facile de s'attaquer à la nouvelle patinoire qu'à la Valascia, qui était vénérée et donc intouchable...
On ne peut pas faire ce raisonnement. La Valascia suscite toujours une nostalgie énorme, mais elle était vieille et, du coup, ne bénéficiait pas du soin qu'on porte généralement à une nouvelle maison. La mythification de la Valascia existait bel et bien, mais ça n’allait pas jusqu’à ne pas dégrader l'enceinte. Personne ne voyait la nécessité de la préserver: c'était vétuste, il y avait des gribouillages partout, tout ça faisait partie du mythe.
Derrière votre intention, y a-t-il aussi la volonté de pérenniser la bonne image dont jouissent les fans d’Ambri?
Il faut garder la bonne image des fans en général, de tous les clubs. J'espère que c'est un principe partagé par tous. C’est une bataille de société, surtout dans les nouvelles générations, mais pas que.
Le sport doit être une école de vie, grâce au respect des personnes et du matériel qu'il enseigne. C'est la théorie, il faut aussi que ce soit vrai dans la pratique. Alors j'espère que mon cri du cœur portera ses fruits.