C'était une finale sans histoire, sinon celle que Novak Djokovic avait à écrire et qu'il a eu tant de mal à conclure. Mais toute la nervosité du monde, même la volonté puissante de Matteo Berrettini, n'a pu l'empêcher d'accomplir son destin de jeune premier, élevé dans l'adversité et la conscience d'un esprit supérieur, né pour gagner.
À 34 ans, Djokovic réalise l'objectif que lui avait assigné son père vingt années plus tôt: devenir le meilleur. Mais «le meilleur de mon époque», tient-il à préciser:
Avec 20 trophées du Grand Chelem, Djokovic égale le palmarès de Roger Federer et Rafael Nadal. Tous les autres records, ou presque, lui appartiennent déjà. Tandis qu'il postule secrètement au statut de meilleur joueur de l'ère moderne (pour le moins), le débat reprend de plus belle...
De son propre aveux, Djokovic a «commencé à penser au record il y a deux ou trois ans. Avant, ça me semblait un peu inaccessible».
Au final, tout le collège des anciens, des experts et des futures mères, s'accordait sur un point:
Car, non, l'histoire ne retiendra pas qu'avant de l'emporter 6-7 (4) 6-4 6-4 6-3 contre Matteo Berretini, Novak Djokovic a eu des moments de stress, des moments de quasi détresse. Personne ne retiendra que pris d'une anxiété soudaine, il a manqué une occasion de conclure facilement le premier set à 5-2, avant de devenir passif et gestionnaire - poltron et velléitaire - et de tout perdre au tie-break.
Matteo Berrettini, d'abord nerveux, a puisé un peu de courage dans la vulnérabilité de son adversaire. Il a ressorti son petit slice, ses grosses frappes croisées, ses épaules bien roulées de baroudeur bodybuildé, et il a remporté le premier set sans trop comprendre comment.
Il était toujours en train de réfléchir que Djokovic menait déjà 4-0 dans la deuxième manche, avec dix bons kilomètres heures de mieux dans ses frappes et un corps moins raide, quelques centimètres de plus dans le terrain.
Mais à 5-2, re-blocage. Djokovic n'a remporté le set que péniblement. Puis il est parti aux vestiaires, là où il a pris l'habitude de se changer en surhomme. Au bout du couloir à gauche, dans des limbes connus de lui seul.
Et pour le coup, c'était fini... Comme à Roland-Garros, comme à Melbourne, comme toujours, le Serbe est revenu des toilettes dans son costume de Super-Djoko, tête haute sur des pectoraux gonflés à bloc, le corps électrisé. Il a brandi une assurance que plus rien ne pouvait ébranler, pas même les coups et les cris de Berrettini.