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Yverdon-Lausanne: le gros défaut du leader de Challenge League

La tribune principale d'YS n'est presque jamais pleine, alors que le club caracole en tête de Challenge League.
La tribune principale d'YS n'est presque jamais pleine, alors que le club caracole en tête de Challenge League.Image: SFL

Yverdon Sport a toujours le même défaut

Brillant leader de Challenge League, YS joue sa promotion contre Lausanne ce vendredi. Pourtant, une fois de plus, son petit stade ne sera pas plein. «On a l'impression que les gens s'en foutent», se désole un fan.
05.05.2023, 06:0805.05.2023, 09:02
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Yverdon Sport joue le match le plus important de sa saison, vendredi soir contre Lausanne (19h30). Leader de son championnat, le club nord vaudois sait qu'une victoire contre son rival cantonal à cinq journées de la fin lui permettrait de poser un premier crampon en Super League.

Les deux premiers sont promus, le troisième barragiste.
Les deux premiers sont promus, le troisième barragiste.Image: TXT

Pourtant, aussi incroyable que cela puisse paraître, YS a de la peine à remplir son vénérable stade de 5500 places. Jeudi matin, le club a annoncé que 2500 billets seulement avaient été vendus en prévision de la rencontre au sommet. «Dont 500 à des supporters lausannois», suspecte un fan yverdonnois, dégoûté par l'affluence misérable d'YS depuis le début de saison.

Les chiffres font mal: malgré un jeu attractif et des ambitions assumées, Yverdon attire en moyenne 1070 personnes par match. C'est la pire affluence de 2e division, si l'on excepte celle de Stade-Lausanne Ouchy (1051), dont les matchs à domicile sont délocalisés à La Pontaise.

Ce désintérêt est douloureux pour le président Mario Di Pietrantonio, un homme qui a investi énormément d'énergie, d'idées et d'argent dans le club depuis son arrivée en 2014. Quand 24 Heures lui fait remarquer que le public ne se presse toujours pas dans son stade, le dirigeant estime que «c'est plus que désolant» et ajoute qu'il ne voit «malheureusement aucune solution à ce qui est un fait».

«Mis à part pour un derby face au LS, espérer rassembler davantage qu’un millier d’Yverdonnois au stade me semble presque impossible aujourd’hui. Et si l’on monte en Super League, je crains que la moyenne de spectateurs ne dépassera pas 2000 ou 2500 personnes, grâce avant tout à la présence d’un plus grand nombre de fans adverses. J’avoue que, lors de mes déplacements à Winterthour l’an passé ou à Aarau cette saison, quand je vois 500 personnes faire la file pour acheter une bière et une saucisse une heure avant le coup d’envoi, je suis un peu jaloux. »
Mario Di Pietrantonio dans 24 Heures.

Le président l'avoue: l'absence de fidèles «enlève pas mal de motivation à la longue. Je n’en veux à personne, mais c’est l’une des raisons pour lesquelles je n’ai plus envie de m’investir davantage.»

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Mario Di Pietrantonio espère trouver un accord avec de nouveaux investisseurs très prochainement.Image: KEYSTONE

Comment expliquer que les gens ne viennent pas au stade Municipal? En réalité, le problème auquel est confronté M. Di Pietrantonio existe de longue date, mais il s'est accéléré ces dix dernières années. C'est ce qu'a constaté Tim Guillemin, rédacteur en chef du quotidien La Région et auteur du livre «Yverdon Sport FC».

«Avant que le club ne quitte le foot professionnel en 2011 lors de sa relégation en 1re Ligue, il y avait des affluences tout à fait correctes au Municipal. Le problème, c'est qu'YS a ensuite passé 10 ans dans l'antichambre de la Super et Challenge League, à une époque où les amoureux du foot s'intéressent toujours plus aux grands clubs comme le Real Madrid ou Liverpool, si bien que toute une génération s'est éloignée du stade yverdonnois. Or ces gens-là, tu ne les récupères pas en une année.»

Deux autres éléments, pour lesquels le club fondé en 1948 n'y est pour rien, ont impacté sa billetterie. Le premier, c'est sa position géographique: le chef-lieu nord-vaudois est situé entre Neuchâtel, Lausanne et Berne, soit trois villes historiques du football suisse.

«Depuis Grandson (à 5km au nord d'Yverdon), il y a des supporters de Xamax. Et depuis Chavornay (à 12 km au sud), on trouve des fans du LS»
Tim Guillemin

La seconde raison permettant de comprendre la désertion des tribunes tient à l'histoire de la cité thermale. Yverdon a vu le départ de nombreux ouvriers dans les années 80-90. Or il s'agissait d'un public qui se déplaçait massivement au stade. Président historique d'YS entre 2000 et 2011, Paul-André Cornu prend la fermeture d'Hermes-Precisa International (1989) en exemple: «Pour la région, la dégringolade de HPI a été incroyable (réd: c'est à dire "terrible"). D'autres usines ont aussi fermé, mais bon... Le Nord vaudois est une région tellement délaissée que personne ne se serait inquiété si elle avait disparu.»

M. Cornu (à droite) avec son entraîneur Lucien Favre en 2000.
M. Cornu (à droite) avec son entraîneur Lucien Favre en 2000.Image: Yverdon Sport

L'ex-dirigeant se souvient pourtant des glorieuses années soixante, «lorsque même la deuxième équipe jouait devant des spectateurs. Et en LNB, la première rassemblait régulièrement 2000 à 2500 fans. C'était le tarif.»

Un demi-siècle plus tard, la région a certes gagné des habitants, mais leur rapport avec leur environnement direct, lui, a beaucoup changé. «A l'époque, il y avait environ 18 000 habitants à Yverdon. Ils sont 30 000 aujourd'hui, fait remarquer Paul-André Cornu. Cela veut dire qu'il y a 12 000 personnes qui ne sont pas encore de "vrais" Yverdonnois, mais qui vont le devenir. Ce sont de nouveaux arrivants qui doivent s'intégrer. Cela prend du temps car, de nos jours, il est difficile de créer un tissu social de proximité. On le constate dans les villages alentours, qui ont tous gagné en population, ce qui n'empêche pas les chorales de disparaître les unes après les autres. Le football n'échappe pas à cette tendance.»

Yverdon est-il pour autant condamné à jouer devant des tribunes presque vides? Ce n'est pas dit. D'abord «parce que le club travaille très bien dans le secteur marketing et communication», souligne Tim Guillemin. Ensuite parce qu'un nouveau groupe de supporters a vu le jour en 2021: le Kop 14.

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La banderole «Kop 14» posée derrière le but (à droite de l'image) en quart de finale de la Coupe de Suisse 2022 contre Lausanne. Image: KEYSTONE

«Nous comptons entre 50 et 80 personnes. Notre but est de faire revenir le public au stade», nous explique un de ses membres, dégoûté par le peu d'intérêt suscité par son équipe:

«On est leaders de Challenge League et on a l'impression qu'en ville, les gens s'en foutent»

Une promotion en fin de saison, avec parade des joueurs sur un bus à impériale dans les rues de la cité thermale, rappellerait à tout le monde qu'un club joue super bien au ballon et qu'il n'a pas de quoi être jaloux de Winterthour ou d'Aarau.

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