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Coupe du monde 2022: Le Pays de Galles et l'enjeu nationaliste

epa10315988 Gareth Bale of Wales smiles during a press conference at the Qatar National Convention Center (QNCC) in Doha, Qatar, 20 November 2022. Wales will face the USA in their first group B match  ...
La star du Pays de Galles, Gareth Bale, lors d'une conférence de presse à la Coupe du monde 2022 au Qatar. Image: keystone

Au Qatar, les conférences de presse très spéciales du Pays de Galles

Un protocole particulier a lieu quand les membres de l'équipe nationale galloise se présentent devant les journalistes. Il en dit beaucoup sur le symbole qu'est cette sélection, qui affronte les Etats-Unis ce lundi (20h00).
21.11.2022, 17:1821.11.2022, 18:23
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La sélection galloise serait bien inspirée d'avoir emmené avec elle un traducteur à la Coupe du monde au Qatar. Parce que la grande majorité des joueurs risque de ne pas comprendre certaines questions de leurs propres compatriotes journalistes. Et pour cause: la fédération a décidé que les questions posées en gallois – une langue que ne maîtrisent pas 73% des Gallois – auront la priorité sur celles formulées en anglais. Un symbole très fort, dans la continuité de la ferveur nationaliste qui grandit depuis les années 2010 au pays de Gareth Bale.

Les bons résultats actuels de la sélection, après plusieurs décennies de vaches maigres, sont l'une des raisons de cette poussée patriotique. Avec un moment particulièrement important: l'Euro 2016, où les Dragons ont réussi l'inattendu exploit d'atteindre les demi-finales. «Tout a changé cet été-là, parce que, pour la première fois depuis très longtemps, c'était cool d'être gallois, de se sentir gallois», explique dans le magazine So Foot Martin Johnes, historien à l'université de Swansea.

epa05411416 Welsh fans in the fan zone set up in the Principality Stadium, Cardiff, Wales, Britain, 06 July 2016, watching the UEFA EURO 2016 semi final between Portugal and Wales. EPA/ALED LLYWELYN
Les fans gallois lors de la demi-finale de l'Euro 2016 contre le Portugal. Image: keystone

L'équipe, actuellement dirigée par Rob Page, devient alors une véritable ambassadrice, à travers laquelle les Gallois peuvent exprimer leur fierté dans les stades et la rue ou sur les réseaux sociaux. Mais aussi leurs revendications. Celle d'abord d'être reconnu comme un peuple à part entière, distinct du Royaume-Uni et de sa nation dirigeante, l'Angleterre, à laquelle le Pays de Galles est subordonné depuis le 13e siècle.

Chanteurs, prison et pilori

Il n'a pas fallu attendre 2016 pour que la fédération galloise de football affirme son identité nationale. La nomination de Ian Gwyn Hughes comme chef des affaires publiques en 2010 marque un tournant. Il décide de remplacer «Wales» (le nom officiel du Pays de Galles en anglais) par «Cymru» (le terme gallois) sur les programmes de matchs. Ensuite, il oblige les joueurs à chanter l'hymne national, Hen Wlad Fy Nhadau (Vieux pays de nos ancêtres), avant les matchs.

Il emmène aussi la délégation loin des terrains de foot, sur des lieux importants de l'histoire galloise, comme un mémorial de la Première Guerre mondiale en Belgique, où Gareth Bale rend personnellement hommage à un compatriote poète mort lors de la bataille d'Ypres (1915). Et puis, certains joueurs commencent à donner des interviews en gallois dans les médias, à l'image d'Aaron Ramsey. Prochaine étape, prévue après le Mondial qatari: utiliser «Cymru» dans toutes les communications officielles de la Fifa et de l'Uefa.

Gareth Bale et ses coéquipiers fêtant la qualif pour le Mondial, avec une chanson en gallois 📺

Derrière ce besoin d'affirmation nationale, la situation géopolitique du Pays de Galles joue un rôle majeur. Le sentiment d'être discriminé, voire anéanti par l'Angleterre, explique le fort ressentiment de certains leaders de la cause galloise.

C'est le cas de Dafydd Iwan (79 ans), chanteur attitré – en gallois évidemment – de la sélection qui a fait de la prison dans les années 1970 pour avoir peint des panneaux routiers, histoire d'exiger leur traduction en gallois, et refuser de payer les amendes. Ou encore celui de Dano Lewis, membre et fondateur du groupe de supporters au nom explicite «Welsh Fans for Independance» qui manifeste avant chaque match à domicile des Dragons. Il raconte son traumatisme dans So Foot:

«A l'école, si on se faisait attraper en train de parler gallois, on pouvait se retrouver avec un bloc de bois autour du cou sur lequel était inscrit "Welsh NOT" ("Ne parle PAS gallois"), parce que cette langue était associée à la bêtise et au passé»
Dano Lewis, supporter gallois pro-indépendance

Une vieille blague et un match explosif

Outre ces souvenirs douloureux de discriminations dans les interactions du quotidien, la misère sociale et économique d'anciennes régions minières nourrit la volonté des Gallois de s'émanciper de la tutelle anglaise. Tout comme le Brexit, en 2016. «Le Brexit a servi d'étincelle à la fibre nationaliste de pas mal de gens», observe Martin Johnes dans So Foot. L'historien gallois enchaîne:

«Et cette idée d'indépendance est très séduisante parce qu'elle rime avec la possibilité de commencer quelque chose de totalement nouveau. Quand j'étais jeune, dans ma famille, on voyait ça comme une blague qui se racontait à table. Pour les jeunes – et surtout depuis la demi-finale de l'Euro 2016 – ce n'est absolument plus le cas.»
Martin Johnes, historien, dans So Foot
Wales' fans sing their national anthem during the Euro 2016 semifinal soccer match between Portugal and Wales, at the Grand Stade in Decines-­Charpieu, near Lyon, France, Wednesday, July 6, 2016. ...
Ah, ces gens qui bâillent pendant les matchs... Image: keystone

Autant dire que le match Pays de Galles - Angleterre mardi 29 novembre, lors de la 3e journée de poules de la Coupe du monde, servira de cadre parfait pour l'affirmation des fans des Dragons. Et, qu'une victoire contre l'ennemi héréditaire donnera un nouveau coup de boost à leur fibre nationaliste.

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source: keystone / str
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