Commençons par un petit exercice mental: énumérez dans votre tête les meilleurs clubs italiens. Il y a le recordman de titres (Juventus), les clubs milanais (Inter et AC), l'AS Roma et la Lazio ainsi que le champion en titre Napoli. Et puis il y a peut-être aussi l'Atalanta Bergame et la Fiorentina. Mais Bologne? Personne ne s'attend à ce que cette équipe se batte pour les places européennes chaque saison.
Certes, le FC Bologne a déjà été sept fois champion et deux fois vainqueur de la Coupe, mais le dernier de ces titres remonte à la saison 1973/74. Malgré tout, Bologne est quatrième en Italie après sa victoire 1-0 à Empoli vendredi, et occupe donc une place qualificative en Ligue des champions.
Au coeur de cette réussite, on trouve trois joueurs de l'équipe nationale suisse.
Le trio est apprécié des fans, comme le dit Aebischer à la SRF:
Les joueurs de la Nati s'entendent également bien entre eux. Ndoye, 23 ans, décrit Freuler, de huit ans son aîné, comme «un grand frère qui me donne des conseils». Le joueur de 31 ans passe aussi beaucoup de temps avec Aebischer, qui habite relativement près de chez lui à Bologne. Mais les Suisses sont également bien intégrés dans l'équipe.
Grâce à ses bonnes connaissances linguistiques, Aebischer fait également office de traducteur pour les joueurs qui ne comprennent pas encore très bien l'italien. En outre, il a eu l'honneur de porter le brassard de capitaine lors de huit matches cette saison. «C'est une belle reconnaissance et cela me rend fier», déclare le joueur de 27 ans à la Freiburger Nachrichten. Rappelons que l'entraîneur Thiago Motta ne mise pas sur un capitaine inamovible, faisant tourner le brassard entre quelques joueurs. C'est une «sorte de système de récompense, un petit quelque chose en plus en guise de reconnaissance après une bonne performance», explique Aebischer.
Motta semble très satisfait de ses joueurs suisses. Il a déjà félicité Ndoye pour ses qualités en 1 contre 1 et Freuler pour avoir «dirigé les jeunes joueurs et leur avoir montré ce qu'ils devaient faire pour que nous puissions continuer sur notre lancée». Quant à Aebischer, c'est un garçon très intelligent qu'il apprécie surtout pour sa polyvalence: «Si quelqu'un peut remplir différents rôles, cela en dit long sur sa compréhension du jeu», complimente-t-il.
Une partie de la recette du succès tient dans l'esprit d'équipe insufflé par l'entraîneur. Mais l'ancien milieu de terrain, qui a notamment joué à Barcelone, à l'Inter Milan et au PSG, n'est pas seulement un excellent motivateur. C'est aussi un fin tacticien.
Motta n'aligne pas son équipe en 4-3-3 ou en 4-4-2. Il mise sur un 2-7-2. Ce qui semble complètement fou au premier abord (deux défenseurs et sept milieux de terrain) est en fait facile à expliquer. En effet, l'ex-international italien né au Brésil ne voit pas le terrain horizontalement comme d'habitude, mais verticalement - comme il l'a toujours perçu durant sa carrière de joueur en tant que numéro six. Pour lui, le terrain est donc divisé en trois tiers dans le sens de la longueur, le tiers gauche et le tiers droit étant occupés par deux joueurs, tandis que sept joueurs évoluent au milieu, en comptant le gardien de but.
Le gardien de but a une fonction particulièrement importante dans son système, car il doit sortir loin en possession du ballon et est considéré comme le premier attaquant, tandis que l'attaquant est le premier défenseur.
Ce système offre à l'équipe de Motta un footballeur supplémentaire dans la construction du jeu par rapport à l'adversaire. Le joueur en possession du ballon a ainsi toujours un coéquipier libre à qui il peut transmettre le cuir. Une stratégie décisive dans la possession du ballon que réclame Bologne. Car même si Motta attache beaucoup d'importance à la stabilité défensive, il veut contrôler le jeu. Et cela fonctionne: seul le Napoli a plus de possession de balle que Bologne en Serie A. En même temps, Bologne possède la troisième meilleure défense du championnat.
Motta fait ainsi rêver le club à une première participation à la Ligue des champions depuis 1964/65. Pourtant, de nombreux supporters étaient sceptiques lorsque cet homme de 41 ans a repris Bologne en septembre 2022. Lors de son premier poste d'entraîneur, il avait été victime du siège éjectable du Genoa après seulement neuf matches. Il a ensuite transité par La Spezia puis s'est assis sur le banc de Bologne en septembre 2022. La saison dernière, l'équipe a réussi à se classer 9e, son meilleur classement depuis 2012, mais les fans de cette ville de près de 400'000 habitants veulent désormais plus. Aebischer entend de plus en plus souvent des partisans en ville s'exclamer: «Emmenez-nous en Europe!»
Pour y parvenir, Bologne devra compter sur son trio suisse, son entraîneur mais aussi sur le dribbleur Lewis Ferguson ainsi que l'attaquant Joshua Zirkzee. Ce dernier était autrefois considéré comme un talent prometteur au Bayern Munich, mais il n'a pas réussi à s'imposer en Bavière. Le Néerlandais est aujourd'hui apprécié à Bologne pour sa protection de balle et ses talents de buteur. Avec onze réalisations, il est le meilleur buteur de Bologne cette saison.
Zirkzee est souvent servi par l'Écossais Ferguson. Le milieu de terrain offensif est le centre créatif de Bologne, tandis que Freuler et l'ancien Bâlois Riccardo Calafiori le protègent grâce à leurs nombreuses récupérations de balle.
Si Bologne compte autant de joueurs talentueux dans son effectif, c'est avant tout grâce au directeur technique Giovanni Sartori. Cet homme de 66 ans a déjà constitué des équipes performantes au Chievo Verona et à l'Atalanta Bergame, où il a notamment engagé Remo Freuler. Récemment, il a été un facteur décisif non seulement pour le transfert de Freuler à Bologne, mais aussi pour Ndoye, qu'il aurait appelé une cinquantaine de fois.
On sent qu'il y a un plan très clair et parfaitement suivi. Bologne fait certes partie d'un système multi-clubs, mais le propriétaire Joey Saputo, qui possède également l'équipe de Montréal en MLS, laisse les affaires courantes aux mains expérimentées de Sartori ou du directeur sportif Marco Di Vaio. Ils travaillent au «Miracolo Bologna» (le miracle de Bologne), comme l'a titré La Gazzetta dello Sport.
Le succès de cette équipe construite avec précaution pourrait cependant être une malédiction. Motta est considéré comme l'un des principaux candidats à la succession de Xavi au FC Barcelone. Des joueurs comme Zirkzee devraient également être courtisés. Comme souvent, l'équipe surprise pourrait donc se disloquer. Mais à Bologne, on ne veut pas encore y penser. Car il y a encore un grand objectif à atteindre: le FC Bologne doit enfin retrouver l'Europe - et peut-être même la Ligue des champions.