Quand les spectateurs du stade de Genève ont vu Urs Schnyder, l'arbitre du match, sprinter vers la ligne de touche à la 53e minute, nombre d'entre eux ont cru qu'il allait consulter la VAR pour une potentielle faute de main d'un Bâlois dans ses seize mètres.
Il n'en a rien été: le directeur de jeu venait chercher un boîtier (vraisemblablement un récepteur) pour l'amener à son collègue juge de ligne, de l'autre côté du terrain. Pendant un peu moins d'une minute, Urs Schnyder a aidé son assistant à remplacer son matériel défaillant. Les fans les moins attentifs – ou les plus alcoolisés – n'auront sans doute même pas remarqué l'incident. Une chance, car cette interruption aurait pu prendre beaucoup plus de temps, tant le matériel de communication du quatuor arbitral est complexe.
On en avait eu un aperçu le 2 juin dernier, lors du match de Ligue des nations entre la République tchèque et la Suisse (2-1). 70e minute, la Nati est menée 2-1. Légèrement touché à la cuisse, l'arbitre allemand Daniel Siebert doit céder sa place à son compatriote Harm Osmers, quatrième arbitre.
Celui-ci mettra un peu plus de quatre minutes à se préparer avant d'enfin pouvoir entrer sur la pelouse. «Long, beaucoup trop long», aviez-vous sûrement pesté après avoir profité de l'interruption pour aller chercher une bière dans le frigo et un bol de chips. «Quatre minute, c’est vraiment très rapide!», rétorque Sébastien Pache, ancien arbitre de Super League. Le Vaudois argumente:
L'arbitre remplacé ne pourrait-il pas simplement transmettre ses cartons avec les indications dessus et, éventuellement, un petit papier avec des notes complémentaires? «Non», tranche Sébastien Pache. «Ce serait trop risqué de simplement échanger ses notes, parce que chacun a une manière différente de les prendre. C'est pourquoi le quatrième arbitre et les juges de ligne écrivent absolument tout, eux aussi.»
A l'inverse, le matériel de communication – qui permet de relier les quatre officiels entre eux et avec la VAR – doit, lui, faire l'objet d'un troc entre l'arbitre qui sort et son remplaçant. «Le quatrième arbitre a un micro différent de celui des trois autres officiels», explique l'ancien directeur de jeu.
En plus de leur micro, l'arbitre sortant et son suppléant s'échangent leurs récepteurs. Il y en a deux: celui du système de communication central, scotché sous la manche ou au bas du dos; et celui qui permet d'entendre le «bip» quand les juges de ligne appuient sur leur drapeau pour signaler un hors-jeu, par exemple.
Une fois que tout l'attirail est installé, il faut aussi le tester. «Ça prend 10 à 15 minutes quand on prépare et teste notre matériel dans les vestiaires avant le match», détaille Sébastien Pache. «On s'assure encore que tout est en ordre pendant l'échauffement.»
C'est donc surtout le câblage électronique qui est chronophage.
Pas forcément évident, toutefois, quand on pense qu'il n'a pas eu le temps de s'échauffer et qu'il doit tout de suite aligner des sprints.
Sébastien Pache a connu pareille mésaventure. C'était lors du... dernier match de sa carrière, le 2 juin (drôle de coïncidence!) 2017, un Sion-GC à Tourbillon. Victime de crampes, il avait dû céder sa place à la 66e minute. Spectateurs et joueurs avaient attendu un quart d'heure avant que la partie ne puisse reprendre.
Contrairement aux fans de Servette dimanche et de la Nati en République tchèque, ceux des Valaisans et des Zurichois avaient, donc, même pu finir la bière qu'ils étaient allés chercher pendant la pause impromptue.