Les skieurs vont enfin s'exprimer sur la Gran Becca. La première course transfrontalière de l'histoire de la Coupe du monde va accueillir les spécialistes de vitesse sur un tracé tout neuf et inconnu des meilleurs descendeurs de la planète.
Ce mercredi 8 novembre, le premier entraînement a été donné sur les pentes valaisannes – et sous une météo radieuse. Une inauguration qui ravive (bien sûr) les interrogations concernant le tracé dessiné par Didier Défago.
La réflexion principale est l'altitude et les effets sur le physique des athlètes. Les organisateurs ont annoncé que le départ de la descente, initialement prévu à 3 800 mètres, sera rabaissé compte tenu de la longueur du parcours et du risque de vent sur la Gobba di Rollin. Le cabanon de départ trône dorénavant à 3 720 mètres.
Même si la piste est rabotée de 80 mètres, les organismes vont être fortement sollicités à une altitude aussi élevée. «La descente va taper dans le physique», lance d'emblée Florian Lorimier, ancien préparateur physique de Didier Cuche et désormais de Justin Murisier.
Si l'altitude va peser sur les organismes, le préparateur physique assure qu'entre 1800 mètres et 2400 mètres déjà, «il y a une forte diminution du taux d’oxygène dans le sang et de manière plus progressive pour les altitudes supérieures».
Il n'y a donc aucun changement dans la préparation des athlètes pour une étape telle que Zermatt. Et même si le déficit d'oxygène sera fort, le corps du skieur s'autorégulera. Pour ceux qui ont déjà taillé des courbes sur le glacier du Klein Matterhorn, les premiers jours sont particulièrement éreintants – le tunnel pour accéder aux pistes vous paraît infini et votre souffle devient court. Mais plus les jours sur les lattes s'accumulent, plus votre corps s'habitue à une telle altitude. En somme, l'organisme s'acclimate.
Les skieurs ne seront pas tout à fait en terrain inconnu: Beaver Creek, qui interviendra à la suite des épreuves valaisannes, se déroule déjà à 3 400 mètres. «A Beaver Creek, la piste est moins longue, mais il y a ce départ avec 25 secondes de glisse avant le mur vertigineux qui est difficile, compte tenu de l'altitude», observe Florian Lorimier.
Le Neuchâtelois, fouillant dans ses souvenirs, nous confie que pour son ancien protégé Didier Cuche, «Bormio, Kitzbühel et Beaver Creek étaient les plus difficiles physiquement, malgré des altitudes différentes».
Julien Vuignier, entraîneur Swiss-ski, nous expliquait le mois dernier que la descente de Zermatt était «facile, plus facile encore que celle de Lake Louise».
Sauf qu'en Valais, rester couché plus de 2'10 sur les skis à se faire le plus petit possible pour l'aérodynamisme va forcément brûler les jambes. Selon Florian Lorimier, si la principale difficulté sera l'altitude, «c'est surtout la gestion des entraînements qui demandera réflexion». Les skieurs filent vers l'inconnu et découvriront un tout nouveau terrain de jeu.
Entre mercredi et vendredi, il y aura trois entraînements pour se familiariser et la gestion de l'effort rythmera le week-end de course.
Un calcul crucial que Beat Feuz maîtrisait à merveille ces dernières saisons. Or, comme c'est la première fois que les meilleurs descendeurs de la planète dévaleront cette pente, les repaires sont inexistants.
D'autant plus que c'est une descente qui intervient tôt dans le calendrier, plus tôt que d'habitude. A cette période, les spécialistes de vitesse répètent habituellement leurs gammes en stage outre-Atlantique, à Copper Mountain. «Le camp aux Etats-Unis n’a pas eu lieu et il y aura des réglages concernant le feeling et la glisse. Les conditions d’entraînement n'ont pas été optimales cet été», constate le préparateur neuchâtelois.
Cette descente au tracé facile arrive donc au bon moment, selon Florian Lorimier. «Je dirais que physiquement, c’est le moment idéal pour ce genre d’épreuve», assure-t-il.
Mais pour triompher sur la Gran Becca, le physique ne fera bien sûr pas tout: il faudra être brillant sur les trajectoires et profiter d'un matériel performant, sans oublier le facteur chance.