Lara Gut-Behrami n'a rien vu de la première manche du géant de Sölden, en ouverture de saison le mois dernier. Après s'être élancée avec le dossard numéro un, la Tessinoise a disparu pendant que ses adversaires descendaient, pour s'adonner à un moment qui lui tient à coeur et qui est devenu un rituel: la sieste. «J'essaie de dormir entre les courses», a-t-elle confié à notre collègue de CH Media (le groupe auquel appartient watson) Martin Probst.
Cela fait plusieurs saisons que la championne s'accorde une pause après le premier tracé et il semble que les années l'ont confortée dans son choix. «A 32 ans, je sens que j'ai besoin de beaucoup plus de temps pour me régénérer», disait-elle en Autriche, où elle a remporté sa 38e victoire en Coupe du monde après une seconde manche bien plus aboutie que la première.
Lara Gut-Behrami a-t-elle profité, ce jour-là encore, des bienfaits de sa sieste? C'est tout à fait possible, puisqu'un bref instant de sommeil stimule à la fois la tête et le corps. «Les différentes fonctions de l'organisme sont impactées», résume Mathieu Nédélec, chercheur en sciences du sport à l'INSEP (Institut national du sport, de l'expertise et de la performance), spécialiste du sommeil et fin connaisseur de ski alpin, puisqu'il accompagne plusieurs champions français durant la saison.
Il estime qu'après une sieste, un skieur «peut potentiellement voir son temps de réaction et sa prise de décision améliorés». D'autres bienfaits physiques peuvent être observés:
Une sieste bien réalisée, on voit à peu près à quoi ça ressemble. Mais au «bon moment»? «La période idéale se situe entre 13h et 16h, renseigne Mathieu Nédélec, car cette période correspond à un creux de vigilance qui est en lien avec une diminution de la température corporelle, sans qu'il y ait d'ailleurs de lien avec le repas.» Lara Gut-Behrami et les autres skieurs sont obligés d'avancer un peu leur sieste en raison des horaires imposés par les organisateurs, puisque les deuxièmes manches de géant (ou de slalom) se disputent d'ordinaire en tout début d'après-midi.
Le plus important, en définitive, n'est pas l'heure de la pause, mais sa durée. «On recommande de ne pas excéder la demi-heure car au-delà, le risque existe d'être dans un sommeil lent-profond et de voir sa mise en route retardée au réveil.» Le sportif perdrait tous les avantages recherchés.
Les siestes dites «flash», qui durent juste quelques minutes, sont bien plus bénéfiques. À condition bien sûr de réussir à accéder à ce sommeil dit «lent-léger» en peu de temps. «C'est tout à fait possible», selon notre interlocuteur, qui cible les vertus d'une pratique assidue:
Avec les bienfaits sur le corps et l'esprit que l'on a mentionnés, mais aussi beaucoup d'autres, invisibles, mais si précieux: observer un rituel permet ainsi de ne pas gamberger pendant les longues heures qui séparent les deux manches, mais aussi d'accumuler de la confiance, peut-être même des certitudes. Car la prochaine fois que Lara Gut-Behrami fermera les yeux avant un second tracé en géant, fin novembre à Killington, elle se souviendra de sa victoire à Sölden et saura alors comment faire pour décrocher une nouvelle victoire dans sa formidable carrière.