C'est un débat qui oppose deux visions du football, et plus encore, deux visions de considérer la vie: il confronte les pragmatiques, les calculateurs et les prudents aux audacieux, aux casse-cous, à ceux qui voient tout ce qu'ils ont à gagner plutôt que ce qu'ils risquent de perdre. C'est à cette seconde catégorie qu'appartient Igor Tudor.
Mardi soir en Ligue des champions, le coach de l'Olympique de Marseille était au bord du terrain pour diriger son équipe à la 90e minute, lorsque le score face à Tottenham était encore de 1-1. À cet instant, un dilemme s'est imposé à lui: encourager ses joueurs à se porter vers l'avant pour marquer un 2e but et se qualifier pour les 8es de finale, au risque de prendre un contre et de tout perdre; ou se replier derrière et sécuriser le match nul qui permettrait à l'OM d'être 3e de son groupe, et donc de poursuivre son chemin sur la scène continentale (Ligue Europa) au printemps?
Igor Tudor, lui, n'a jamais demandé à ses joueurs de tenir le match nul. En conférence de presse, quelques minutes après avoir tout perdu sur un contre assassin de Tottenham (1-2), il plaidera un manque de communication avec ses joueurs, qu'il aurait souhaité plus prudents dans les dernières minutes. «Il y avait beaucoup de bruit, ça n'a pas permis de bien l'expliquer aux gars.»
Il aurait eu le temps, pourtant, dans les derniers instants de la rencontre, quand le résultat de l'autre match du groupe était connu (victoire 2-1 de l'Eintracht Francfort au Sporting), de faire venir un cadre sur le bord de la touche afin de le charger de transmettre ses consignes au groupe. Par exemple à la 89e minute, lorsque le jeu a été arrêté pendant 30 secondes après que Kane a été bousculé par Kaboré. Ou à la 91e, lorsque l'action a été stoppée pendant une minute après un carton jaune reçu par Hojbjerg.
Mais Igor Tudor ne l'a pas fait. Il n'a jamais cherché à brider ses joueurs, parce qu'à cet instant précis, dans l'atmosphère incandescente du stade Vélodrome, à quelques minutes de ce qui aurait pu être un merveilleux dénouement, il voyait tout ce qu'il avait à gagner plutôt que ce qu'il risquait de perdre.