C'était un dimanche de Pâques, il y a quelques années maintenant. Le téléphone de Nicolas Unternährer a sonné et il y avait à l'autre bout du fil un membre de l'entourage d'Erling Haaland. «Ma première pensée? Mon assurance responsabilité civile est bloquée à 10 millions, cela ne suffira jamais», se souvient l'Argovien.
Malgré une certaine appréhension et aucune augmentation du plafond limite, le physiothérapeute s'est rendu à Dortmund en Allemagne pour épauler l'attaquant vedette, alors blessé. Le fait qu'Haaland et ses proches aient porté leur choix sur Unternährer n'est pas anodin. Nombreux sont les joueurs de la Nati à faire appel à lui, et ce, depuis des années. Il y a par exemple Manuel Akanji de Manchester City, Fabian Rieder du VfB Stuttgart et Noah Okafor du Milan AC.
Cela peut néanmoins paraître étonnant, quand on sait que les plus grandes équipes disposent toutes d'un staff conséquent, composé de médecins et divers soignants. Le quinquagénaire rend malgré tout visite à ses protégés de manière régulière, plusieurs fois par an, et les joueurs viennent aussi dans son cabinet à Bâle, qu'il gère depuis 2016 avec son associée.
«Je demande toujours aux joueurs de communiquer à leur club notre collaboration», explique Nicolas Unternährer, de manière à ce qu'une main puisse savoir ce que l'autre a fait. C'est donc ainsi qu'il a fonctionné avec Manuel Akanji et Manchester City. «J'ai d'abord eu une interview avec le staff médical, puis ils m'ont observé pendant mon traitement», raconte Unternährer. Or certains clubs n'apprécient pas que leurs joueurs engagent des physiothérapeutes privés. Son travail se déroule alors en coulisses.
Le physiothérapeute, également ostéopathe, ne traite pas uniquement les blessures graves. «Mon objectif est de prévenir les blessures», explique-t-il. Il lui faut au moins deux heures par prise en charge:
Le praticien considère que son approche globale du patient explique son succès. Il va jusqu'à soulager les ligaments de la paroi abdominale, et travaille donc en profondeur. «Si quelque chose se coince ici», dit Unternährer en montrant son ventre, «je ne vais peut-être plus pouvoir m'orienter correctement d'un côté en plein match». Il est vrai que l'ostéopathie classique ne convient pas aux footballeurs professionnels, en raison de la durée du traitement et du repos demandé. Or l'Argovien s'est adapté et propose une solution à mi-chemin.
Nicolas Unternährer s'y connaît en football. Il a d'abord joué, à l'enfance puis à l'adolescence, et même un peu plus tard, au FC Laufenburg. «Mais je n'avais absolument aucun talent», dit-il en riant. Son objectif était ailleurs. Faire carrière en tant que physiothérapeute, et se rapprocher par ce biais du sport de haut niveau.
Après avoir terminé sa formation de physiothérapeute en 1999, il a postulé au début des années 2000 pour un poste au sein du cabinet collaborant alors avec le FC Aarau. «Je faisais partie des deux candidats short-listés», se souvient Unternährer.
Le jeune spécialiste pouvait obtenir le poste, à condition toutefois de pouvoir débuter immédiatement son travail. Or son délai de préavis de trois mois a brisé son rêve. Du moins, en apparence. «Deux mois plus tard, ils m'ont rappelé», raconte Unternährer. Le candidat qui lui avait été préféré se trouvait ne pas être assez bon.
Un an plus tard, Nicolas Unternährer filait déjà au FC Zurich. L'équipe a remporté trois titres de champion et une Coupe de Suisse en quatre saisons. Puis le FC Bâle est venu frapper à sa porte. Jusqu'au mois de mai de cette année, Unternährer et les autres membres de son cabinet se sont occupés de la première équipe ainsi que de certains jeunes rhénans.
Reste à savoir ce que cela représente au juste, pour un physiothérapeute, de s'occuper de stars internationales du ballon rond. «C'est un privilège et cela confirme la qualité de mon travail», répond Unternährer. Or il y a aussi une certaine pression à exercer dans ce milieu.
Or avec Manuel Akanji, Unternährer a tissé bien plus qu'une relation commerciale. Il connaît toute sa famille. «Ses enfants me sautent dessus dès qu'ils me voient», dit-il. Il lui arrive parfois de passer la nuit chez les Akanji lorsqu'il intervient pour une séance de thérapie. «Cela va si loin qu'on m'appelle si quelqu'un dans la famille a un problème», détaille le praticien. C'est sans doute ce brin de chance à Aarau qui a fait de lui un thérapeute reconnu dans le milieu du football professionnel.