A 32 ans, Timea Bacsinszky range ses raquettes. La Vaudoise l'a fait savoir vendredi matin sur ses réseaux sociaux.
La joueuse de Belmont-sur-Lausanne a mis fin à une très belle carrière, qui l'a vue atteindre le 9e rang mondial en 2016. Elle a remporté quatre titres WTA et a notamment joué deux fois les demi-finales de Roland-Garros (2015 et 2017).
Cinq personnes qui ont longtemps côtoyé Timea nous racontent leurs anecdotes sur la championne. Des moments insolites, qui montrent bien la personnalité de la Vaudoise.
«Pendant le confinement lié au Covid-19, ma sœur avait besoin de s'entraîner. Elle voulait quand même se préparer pour revenir. En décembre dernier, juste avant la fermeture des installations, elle m’a demandé d’aller jouer avec elle, et j’ai trouvé ça très chouette. J’étais honoré qu’elle veuille jouer avec moi. J’avais un assez bon niveau en étant junior, mais Timea est pro! J’ai trouvé ça vraiment sympa et chouette de pouvoir aller taper des balles avec elle. Malgré le fait qu’on soit frère et sœur, on a assez rarement joué ensemble, parce que quand elle a rapidement commencé à très bien jouer, elle allait jouer avec des sparring-partners bien meilleurs que moi.
Quand on est allé jouer ensemble, j’ai quand même réussi de temps en temps à lui tenir tête! Mais c’était impressionnant de recevoir des balles de son revers. Je me disais: «Ah ouais, c'est pas n'importe qui en face!» (rires). Elle m’a aussi offert deux de ses raquettes, et ça m’a beaucoup touché. C’était un moment important, qui montre que Timea aime le tennis et que malgré le confinement et peut-être cette fin qu’elle sentait, elle avait toujours envie de jouer.»
«Timea est quelqu'un de très joviale, de très affectueuse, mais aussi parfois tête en l’air. Elle devait avoir 18 ans, on s'apprêtait à faire un long voyage en avion. On attendait pour embarquer à Genève. Moi, je me lève pour aller dans la file, et elle me dit qu’elle attend encore un petit moment. Elle avait mis ses écouteurs sur ses oreilles. Le temps passe, tout le monde était dans l’avion. Contrairement à Timea, toujours pas à bord... Ils étaient sur le point de fermer les portes de l'appareil, et elle n’arrivait toujours pas. Alors ils ont dû l’appeler sur les hauts parleurs de l’aéroport. Elle est finalement arrivée, sous le regard de tous les passagers, déjà assis. C’est une anecdote marrante, qui montre aussi la capacité de Timea à se mettre dans sa bulle et à faire le vide autour d’elle.»
«J'ai pu aller la voir jouer sur plusieurs tournois, notamment à Wimbledon et Roland-Garros et en Fed Cup. Ce qui était fou, c’est que Timea était clairement celle qui avait le plus de choses à faire et celle qui avait le plus de pression. Mais elle prenait toujours le temps de savoir si tout se passait bien pour ses invités: les repas, les places, l'hôtel, m'offrir un linge de Roland Garros. Elle venait aussi manger avec nous. Elle avait toutes ces petites attentions susceptibles de polluer son esprit, qui devait rester focalisé sur sa performance sportive. Tout ça me faisait très plaisir. Elle parlait toujours hongrois avec mon grand-père originaire de Hongrie, pour lui faire plaisir. Elle prenait beaucoup de recul sur le tennis, n'était pas égocentrique.
Ce qui m’a toujours fait rire chez elle aussi, c'est en soirée, quand des mecs bourrés venaient lui dire comment elle aurait dû jouer certains points ou quelle tactique adopter contre Serena Williams. Elle restait toujours super calme face à ces remarques teintées de sexisme. Elle leur demandait: «T’es R1, R2, R6? Et les interclubs, ça se passe comment?» Ça remettait assez facilement ces gars à leur place quand ils réalisaient qu’eux, ils essayaient de battre le numéro 3 du Tennis Club Echichens et qu’elle, elle jouait Serena Williams.»
«Timea est quelqu’un qui a énormément de caractère, avec un côté impulsif, très franche et entière. Ce n’est pas toujours facile à gérer pour un entraîneur, mais c’est aussi cet état d’esprit qui permet d’arriver à ce niveau. Je me souviens d’un match de Fed Cup en Israël, en 2011. J’étais sur le banc. Sur une balle litigieuse, Timea voulait que je la soutienne par rapport à la décision défavorable de l’arbitre. Je ne l’ai pas fait, parce que je n’étais pas d’accord avec elle. Du coup, Timea m’en a voulu. Elle aurait souhaité que je la soutienne davantage. On ne s’est plus parlé de tout le match, même si je n’ai pas quitté le banc. Après la partie, l’atmosphère est restée tendue.
Mais on s’est recroisées en novembre 2014, lors de la finale de la Coupe Davis France-Suisse à Lille. C’est elle qui est venue vers moi, et m’a proposé de boire une coupe de champagne. J’ai trouvé très chouette qu’elle fasse le premier pas. Entre-temps, j’étais devenue cheffe de délégation de l’équipe suisse de Fed Cup. Depuis, nos relations sont bonnes et ça a contribué à créer un esprit de famille au sein de toute l’équipe nationale féminine.»
«Avec mon associé Yannick Fattebert (ancien entraîneur de Stan Wawrinka), on a connu Timea lors de sa première pause, en 2013. Elle nous disait qu’elle n’en pouvait plus du tennis, qu’elle voulait arrêter et qu’elle souhaitait désormais vivre de son autre passion, l’hôtellerie. On était à quelques jours de partir à Agadir, au Maroc, où l'on organisait des stages de tennis pour adultes amateurs. Et là, Timea nous a dit qu’elle voulait venir avec nous!
C’était compliqué pour nous d’accepter, parce qu’on avait déjà notre staff et on pensait devoir payer un nouveau salaire. Elle a insisté, en disant qu’elle ne voulait pas d’argent et qu’elle paierait même son billet d’avion et l’hôtel de sa poche. Elle est finalement venue! Imaginez la chance pour les participants d’avoir une coach de ce niveau! Cela montre bien sa personnalité: entière, ouverte, généreuse et qui s’investit à fond. Elle nous l'a de nouveau prouvé quand elle est venue jouer le tournoi de Montreux en 2018, juste après son élimination à l’US Open. Malgré les contraintes, elle a tenu sa promesse.»