D'habitude, les experts des grandes nations du football font au moins semblant d'avoir un peu de respect pour leur prochain adversaire. Mais mercredi soir, quelques minutes après la qualif des Bleus contre le Portugal (2-2), nos voisins ne s'en sont même pas donné la peine! 😂 Il y aura bien un 8e de finale, lundi prochain entre la France et la Suisse, mais ça ne sert à rien de s'étendre sur le sujet. Parce qu'envisager «une défaite de la France, c'est compliqué», a asséné direct le présentateur de l'After foot (RMC), «le show qui dit tout haut ce que le monde du foot pense tout bas».
Une telle prise de position aurait été presque vexante pour les supporters de la Nati si les chroniqueurs n'avaient pas ensuite démontré leur fine connaissance du jeu suisse avec force arguments:
La question, dès lors, n'est pas de savoir si la Suisse est un bon tirage, mais si elle est un «très bon tirage». La chaîne L'Equipe a posé la question telle quelle à ses six consultants. Verdict: Six fois «oui». «Si on se plaint de ce tirage, il faut tout arrêter!», a coupé court Hervé Penot, plume du journal français.
Relancé par le présentateur sur fond d'inquiétude franco-française, «parce que les Bleus, on le dit souvent, sont forts face aux forts mais ont du mal à faire le jeu face à des équipes prenant moins de responsabilités (sous-entendu: la Suisse)», Penot a précisé la pensée du collège d'experts. «On ne dit pas que ce sera simple, qu'on va leur mettre cinq pions. Mais la France est championne du monde et finaliste du dernier Euro. Et en face, ça manque quand même de talents individuels.»
Si la France perd contre la Suisse je m'engage à sucer tt les zboubs de paname
— BENZEGOAT (@yihaaaah) June 24, 2021
Xherdan Shaqiri est le joueur suisse le plus connu en France mais Emmanuel Petit, justement, le connaît trop bien pour en avoir peur. «70% du match, on ne le voit pas», a rappelé le consultant de BFM, avant d'oser une prédiction qu'il pourrait bien regretter: «Il va se farcir Kante et ce sera réglé en deux temps, trois mouvements».
Les certitudes françaises se fondent sur le rapport de forces déséquilibré entre les deux équipes, mais aussi sur un passé commun à l'avantage de la France. «Ça fait un bon p'tit moment qu'on n'a pas perdu contre la Suisse», s'est souvenu Denis Brogniart, spécialiste ès poteaux. La dernière fois, c'était en 1992 et ça comptait pour rien. La Nati avait pris le meilleur sur son voisin en amical.
Le présentateur de BFM Foot est presque désolé de cette domination historique. Il ne voulait surtout pas être mal compris mercredi, alors il a précisé: «Sans manquer de respect à nos voisins et amis» (ça commençait bien 😅) puis a lâché: «On est d'accord, la France ne peut même pas imaginer ne pas passer contre la Suisse?»
Stéphane Guy, présent sur le plateau, a vu le danger arriver. Il sait par expérience qu'une fausse prophétie peut faire basculer une carrière. Le soir de la «remontada» du Barça face au PSG (6-1), croyant l'affaire pliée alors qu'il ne restait qu'une dizaine de minutes à jouer, le commentateur avait anticipé la qualif parisienne en quart de finale et avait lâché à l'attention des Catalans: «En face, c'est pas Gijon, c'est pas Valladolid, c'est le Paris-Saint-Germain!» Mais rien ne s'était passé comme prévu. ⬇️
Alors quand il lui a été demandé de se prononcer sur le 8e de Bucarest, Stéphane Guy a prévenu tout excès d'optimisme: «Il va falloir le jouer, ce match».
Didier Deschamps a dit la même chose en substance. Interrogé par un journaliste de TF1 pour savoir si le rendez-vous face aux Helvètes était «abordable», le sélectionneur a répliqué, fort de sa longue expérience de joueur: «Ecoutez, on en a vu des matches abordables...» Il a ensuite avoué qu'il avait dépêché des observateurs pour étudier le jeu de la Suisse, soucieux de ne pas sous-estimer cet adversaire auquel la plupart de ses compatriotes n'accorde pas le moindre crédit.