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Le Milan AC a joué sans joueur italien contre le PSG

Ligue des champions: le Milan AC a joué sans joueur italien
Le onze des rossoneri au coup d'envoi du match contre le PSG mercredi soir.

«Le Milan AC sans aucun joueur italien, ça me fait froid dans le dos»

Pour la première fois de son histoire, mercredi face au PSG, le club lombard a débuté un match de Ligue des champions avec onze étrangers. Comment en est-il arrivé là? Explications.
26.10.2023, 16:1726.10.2023, 19:18
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Mercredi soir, quelques instants avant le début de la partie de Ligue des champions entre le PSG et Milan, la régie de Canal plus a projeté à l'écran la composition de l'équipe «italienne».

La voici:

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Les journalistes et consultants en plateau n'ont pas semblé se rendre compte du moment historique que le club plus que centenaire était en train de vivre. Mais David Ginola, si. L'ancien international français a recentré le débat et interrogé ses collègues:

«C'est incroyable de voir que le Milan va jouer sans aucun Italien. Ça ne vous fait rien?»

Le présentateur du Canal Champions Club a rappelé en substance qu'il n'y avait pas vraiment de quoi être surpris puisqu'après tout, Arsenal avait déjà joué sans Anglais par le passé. Mais Ginola a insisté: «C'est problématique (...) Le Milan AC sans aucun joueur de son pays, ça me fait froid dans le dos.» La déception était aussi perceptible chez Gaetano Tripodi, président et fondateur du Milan Club de Crans-Montana:

«Ça m'a beaucoup étonné de ne voir aucun Italien sur la pelouse au coup d'envoi, surtout qu'on avait Davide Calabria sur le banc»
epa10939944 The starting eleven of AC Milan ahead of the UEFA Champions League Group F match between Paris Saint-Germain and AC Milan in Paris, France 25 October 2023. EPA/CHRISTOPHE PETIT TESSON
Le onze lombard à Paris mercredi.Image: EPA

Les rossoneri s'étaient déjà présentés sans Transalpins face à la Salernitana en mars dernier, c'était en championnat et cela avait marqué un tournant historique dans l'histoire moderne du club lombard.

A l'époque, Roberto Mancini avait trouvé cela décourageant. On avait aussi pu lire des commentaires comme «ça craint», ou «quelle honte» parmi les amoureux du foot italien. Mais Mancini, qui était encore le sélectionneur des Azzurri, avait aussi demandé de regarder au-delà des chiffres.

«C'est un problème que nous traînons depuis longtemps. Il est donc inutile de se plaindre, il faut chercher des solutions. Il est clair que c'est dommage, car nous avons beaucoup de bons joueurs italiens, mais chaque club et chaque entraîneur fait ses propres choix. Et, je le répète, nous devons essayer de trouver des solutions.»

Aujourd'hui, la Serie A est un championnat qui accorde beaucoup de temps de jeu aux étrangers, comme le révèlent les chiffres du Centre International d'Etude du Sport (CIES).

Pourcentage de minutes jouées par les expatriés (et par pays):

Les étrangers bénéficient de 62,4% du temps de jeu total en Italie. C'est moins qu'à Chypre (leader du classement) ou qu'en Angleterre, mais plus qu'en Allemagne ou en Suisse.
Les étrangers bénéficient de 62,4% du temps de jeu total en Italie. C'est moins qu'à Chypre (leader du classement) ou qu'en Angleterre, mais plus qu'en Allemagne ou en Suisse.

Et au sein même de la Botte, le Milan AC est l'un des clubs qui sollicite le plus les étrangers, toujours selon les chiffres du CIES.

Pourcentage de minutes jouées par les expatriés (et par équipe):

Les étrangers du Milan bénéficient de 90,3% du temps de jeu total du club. C'est moins qu'à Bologne (leader du classement) mais plus qu'à Naples ou l'Inter, et bien davantage encore qu'à la Juventus ( ...
Les étrangers du Milan bénéficient de 90,3% du temps de jeu total du club. C'est moins qu'à Bologne (leader du classement) mais plus qu'à Naples ou l'Inter, et bien davantage encore qu'à la Juventus (61,2%), la Roma (52,1%) ou la Lazio (42,6%).

Roberto Mancini évoquait en mars dernier des «solutions à trouver». Mais lesquelles? Mercredi soir, peu avant PSG-Milan, David Ginola préconisait de réguler les effets de l'arrêt Bosman qui, en 1995, avait permis la libre circulation des joueurs en ne limitant plus le nombre d'étrangers par club (on vous la fait courte). Or certains réclament aujourd'hui la réintroduction de quotas. «La bonne solution, ce serait de ne pas avoir plus de 5 joueurs étrangers par équipe sur le terrain», songe Gaetano Tripodi, persuadé qu'avec une telle mesure, son Milan n'aurait jamais laissé partir Lorenzo Colombo en prêt à Monza. «C'est un attaquant italien qui a fait sa formation chez nous. Je n'arrive pas à comprendre pourquoi il ne fait plus partie de l'équipe», déplore le tifoso valaisan.

epa10896121 Sassuolo's Daniel Boloca (L) with Martin Erlic (R) and Monza's Lorenzo Colombo (C) in action during the Italian Serie A soccer match between US Sassuolo and AC Monza in Reggio Em ...
Colombo entre deux adversaires de Sassuolo. Image: EPA ANSA

Le cas de Lorenzo Colombo est intéressant. Il montre que le recours aux footballeurs étrangers est moins une question de règlement que de philosophie. Le Milan, qui mise énormément sur les expatriés, l'a laissé partir dans le club qui fait le plus confiance aux Italiens en Serie A (79,4% des minutes disputées par les joueurs du club l'ont été par des Transalpins).

De fait, l'arrêt Bosman n'est pas le (seul) responsable de la situation actuelle. Sinon comment expliquer ce chiffre:

En 2009, soit 14 ans après l'arrêt Bosman, la moyenne de joueurs étrangers par effectif de Serie A était de 42%. Aujourd'hui, elle atteint 61,3%.
Chiffres communiqués par le CIES.

C'est le 2e plus haut total après celui de l'an dernier (61,7%). Cela signifie que, chaque année depuis plus de dix ans, le nombre d'expatriés augmente dans le championnat italien. Joint par téléphone, le directeur du CIES explique pourquoi:

«Il y a sans doute un déficit au niveau de la formation en Italie, où l'on a tendance à privilégier le résultat à court terme plutôt que le développement des joueurs à long terme. Les formateurs se focalisent donc sur les aspects physiques et tactiques des talents, au détriment de la technique et de la créativité. Ces joueurs, qui flambent chez les jeunes grâce à leurs qualités athlétiques plus qu'à leur haut potentiel, auront de la peine à confirmer leurs prédispositions chez les pros. Dès lors, les clubs italiens trouveront de meilleurs footballeurs formés dans d'autres pays. Sans compter qu'il y a beaucoup de spéculation sur les transferts, et que vendre ou revendre des joueurs à l'étranger permet de créer un marché particulièrement fort en Italie avec des agents, des scouts, etc. impliqués.»
Raffaele Poli.

Si rien ne change, si le football italien conserve ses habitudes et le Milan AC sa philosophie, on ne risque pas de voir plus de Transalpins à San Siro ces prochaines années, et il viendra le jour où David Ginola ne s'offusquera même plus en lisant la composition du club lombard en Ligue des champions.

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