C'est à 24 ans que Kelvin Kiptum, le surdoué du marathon, a perdu la vie dans un terrible accident de voiture.
Le bonhomme était humble, il se gênait presque lorsqu'il prenait la parole. Mais une fois les chaussures de course aux pieds, il brillait, fascinait les observateurs presque hébétés par ses performances.
Le marathonien effaçait les 42,195 km à une vitesse effrénée et s’était juré d’être le premier homme à descendre sous la barre symbolique des deux heures sur la distance mythique.
Sa résistance à l'effort était remarquée, son parcours de vie forçait le respect, son enthousiasme était apprécié. Dans Le Monde, Daniel Chirchir, ancien marathonien kenyan, disait qu'«il aimait courir sur des sentiers pendant des heures» et d'ajouter qu'il avalait chaque samedi une cinquantaine de kilomètres.
Kiptum apprenait vite, un gaillard rompu à l'effort qui se pointait devant les centres d'entraînement à l'aube dans l'espoir de se faire repérer, étant plus jeune.
Il avait l'abnégation d'un champion, celle qui lui a valu un record du monde du marathon à sa troisième compétition officielle (après Valence en 2022 et Londres en 2023). A Chicago, le dimanche 8 octobre 2023, Kiptum a avalé la distance en 2 h 0 min 35 s. Fou. Dément; l'athlète de 24 ans ahurissait les spécialistes par ses performances déconcertantes.
L'arrivée du Kenyan a changé la face du marathon et le monde ne se rendait pas compte de la portée des exploits retentissants d'un athlète âgé de seulement 23 ans. La grande question que tout le milieu sportif se posait avait désormais une réponse: un homme pouvait réussir l'impensable et courir sous cette barre symbolique des deux heures.
Malheureusement, le dimanche 11 février 2024, Kiptum a rencontré la grande faucheuse sur une route, fauché en plein élan. La presse kényane relatait que Kelvin Kiptum aurait perdu le contrôle de sa voiture et fait une sortie de route, roulant «sur 60 mètres avant de percuter un arbre».
L'étoile filante s'est éteinte, trop tôt.
Le destin de Kiptum rappelle celui d'un autre prodige, dans un tout autre registre, qui éclaboussait le monde de son talent et qui a lui aussi disparu en pleine gloire, à l'âge de 24 ans: l'acteur James Dean. Deux personnalités qui ont marqué de leur empreinte leur art, pour l'éternité.
A coup d'images, de comparaisons et de métaphores, le James Dean du marathon restera cet athlète au talent extraordinaire, à la foulée spéciale qui devait être celle capable d'effacer la barre fantasmée des deux heures sur un marathon.
Sa route vers la gloire devait l'emmener sur le marathon de Rotterdam en avril, pour prouver au monde que l'être humain peut franchir cette barre mythique. Puis il devait rafler l'or le 10 août sur l’esplanade des Invalides, lors des Jeux olympiques de Paris. Le destin en a malheureusement décidé autrement.