Le Bulgare, 1m64 sous la toise, le plus petit skieur du Cirque blanc a réussi à atteindre le Graal et fêter un premier succès en Coupe du monde, 45 ans jour pour jour après la victoire de Peter Popangelov.
Un bol d'air frais pour les courses de ski, qui profitent de ses vainqueurs issus de pays moins en vue dans le milieu alpin.
Pour les suiveurs, le Bulgare n'est pas un inconnu, c'est même une pépite depuis son plus jeune âge. Il écrasait la concurrence et même Marco Odermatt.
Le père du prodige de Nidwald, Walter, confiait dans les colonnes de L'Illustré: «En 2012, lors de la première course de Marco (réd: Odermatt) à l’étranger, le Trofeo Topolino, en Italie (réd: les championnats du monde pour jeunes), il n’a pas eu la moindre chance face aux coureurs de son âge. Il a par exemple lâché huit secondes à Albert Popov entre les deux manches du géant».
Intouchable dans les catégories très jeunes, Popov a de nouveau croisé le chemin de Marco Odermatt lors des championnats du monde juniors, en 2018, à Davos. Cette fois-ci, le Bulgare s'avouait vaincu et arrachait une médaille de bronze en géant, plus d'une seconde derrière le futur crack du ski mondial et Fabio Gstrein, lui aussi capable d'être très rapide en Coupe du monde.
En remontant le temps, quatre ans auparavant sa médaille de bronze aux Mondiaux juniors, Popov skiait (déjà) sa première Coupe du monde en octobre 2014, lors de sa deuxième année FIS, à l'âge de 17 ans. Cette année-là, Benjamin Raich terminait au pied du podium, Marcel Hirscher triomphait et Carlo Janka finissait 10e.
Mais en novembre 2015, une année après son baptême du feu en Coupe du monde, il va découvrir l'horreur et frôler la mort à Sölden. Il est victime en compagnie de deux entraîneurs d'un grave accident de voiture. L'un d'eux, l'ancien skieur slovène Drago Grubelnik, décédera des suites de ses blessures.
Popov s'en tirera avec une fracture du poignet et une autre des pommettes, avec en prime une saison blanche.
Il lui faudra un peu de temps pour retrouver ses esprits et faire son trou sur le circuit de Coupe du monde. Son premier fait d'arme sera lors de la saison 2018/2019, avec un 20e rang à Levi.
Le Bulgare percera au plus haut niveau, en 2019, avec une 9e place à Kitzbühel et un 6e rang dans la Mecque du slalom, la course de Schladming. Avec des dossards très élevés (le 71 et le 46), le spécialiste du virage court, fan de skieurs tels que «Benni» Raich ou encore Bode Miller, fera montre d'un ski spectaculaire pour cocher ses premiers gros points.
En 2023, il parviendra enfin à se hisser sur la «boîte», à Palisades Tahoe, derrière la cohorte norvégienne (Steen Olsen et Haugan) et à égalité avec Clément Noël.
Une décennie plus tard, à Madonna di Campiglio, ce 8 janvier 2024, son ski fait merveille sur ce tapis de glace savamment préparé, avalant les ruptures de pente et domptant le parcours (piégeux) du coach Matteo Joris. Aérien dans le mur et chirurgical dans les transitions, l'une de ses grandes qualités, avec son centre de gravité très bas, il est capable de passer ses skis sous son corps à une vitesse phénoménale.
Et cette victoire est la confirmation que sa ténacité allait un jour ou l'autre payer, lui, qui a réussi à rassembler un million de téléspectateurs bulgares devant leur poste. Un petit exploit au pays de l'ancien footballeur star Dimitar Berbatov.
Il confiait en 2019 au journal L'Equipe:
Et la pression, il la ressent: «Quand je rentre à Sofia, je donne beaucoup d'interviews et j'ai pas mal de pression sur les épaules», avouait-il au quotidien sportif.
Mais son pays le lui rend bien, si bien qu'en mars 2023, le ministère du Tourisme a fait d'Albert Popov le nouveau visage du tourisme d'hiver bulgare. Un pari réussi pour celui qui s'entraîne en Autriche lors de la saison.