L'écusson suisse trône fièrement sur le maillot de l'équipe nationale suisse de hockey sur glace. Et pourtant, c'est interdit par la loi: depuis 2017, les armoiries – «une croix suisse dans un écu triangulaire» – ne peuvent être utilisées que par la Confédération.
Certaines exceptions sont possibles: plusieurs entreprises et associations, dont Victorinox ou les cabanes du Club alpin, ont obtenu l'autorisation de continuer à utiliser les armoiries. Mais pas l'équipe nationale de hockey.
Les raisons? Premièrement, cette demande de la fédération n'avait pas été déposée dans les délais impartis, à savoir fin 2018. Deuxièmement, les conditions n'étaient pas remplies.
Mais Swiss Ice Hockey a déposé un recours. Et vient d'essuyer un nouveau revers: le Tribunal administratif fédéral (TAF) conclut que c'est à juste titre qu'il avait débouté la fédération de hockey à cause de sa demande hors délai. Le TAF n'a toutefois pas précisé si l'équipe nationale remplissait les conditions pour obtenir une autorisation exceptionnelle.
Ce jugement permet de retracer une partie des démarches entreprises par Swiss Ice Hockey pour avoir le droit de continuer à porter les armoiries. Et ses dirigeants, qui ont apparemment eu du mal avec les formalités, n'en ressortent pas grandis.
La fédération se défend d'avoir déposé sa demande dans les délais. En fait, elle avait écrit en juin 2018 au ministre des sports de l'époque, Guy Parmelin, dont le département n'est toutefois pas compétent pour gérer ce genre de cas.
Voici les mots envoyés par Swiss Ice Hockey à Guy Parmelin:
Le tribunal considère cette lettre comme une simple demande de soutien politique, mais pas comme une requête pour continuer à utiliser les armoiries de manière illimitée.
Ensuite, en octobre 2021, Swiss Ice Hockey a adressé une «demande d'autorisation exceptionnelle».
En plus, cette requête est arrivée trop tard, comme le constate le TAF.
La fédération de hockey a continué à se référer à des promesses orales, y compris de conseillers fédéraux. A l'occasion du Mondial 2018 au Danemark, Guy Parmelin aurait assuré que l'utilisation des armoiries par les équipes nationales suisses de hockey sur glace ne poserait «aucun problème». Mais cela ne suffit pas, selon le Tribunal administratif fédéral.
La fédération raconte également que la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider a promis, lors du Mondial des moins de 18 ans 2023 en Suisse, de s'occuper de cette question. Mais le TAF considère la nature de ces deux discussions comme un simple «entretien des relations du Conseil fédéral avec le public». Pour le tribunal, il va de soi «qu'en règle générale, aucun engagement formel ne doit être interprété dans les déclarations faites par des membres du Conseil fédéral à de telles occasions».
Autrement, les conseillers fédéraux ne pourraient plus du tout discuter librement avec les citoyens, argumente le TAF.
Le tribunal a également balayé l'argument de Swiss Ice Hockey selon lequel la fédération n'avait pas été conseillée juridiquement ces dernières années. Pour le TAF, des connaissances en matière commerciale suffisaient pour déposer une demande correcte.
Toutefois, même si la demande avait été déposée dans les délais, les chances qu'elle soit acceptée auraient été faibles. La loi exige en effet une utilisation ininterrompue des armoiries depuis au moins trente ans. Ce n'est pas le cas de l'équipe nationale de hockey.
La fédération ne subirait pas non plus d'inconvénients disproportionnés si elle doit abandonner les armoiries sur son maillot, tranche l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle.
Swiss Ice Hockey peut encore contesté ce jugement. Mais la fédération a surtout des espoirs en politique. Le conseiller national Matthias Aebischer (BE/PS) et le conseiller aux Etats Damian Müller (LU/PLR) ont déposé des interventions demandant que les équipes nationales suisses puissent utiliser les armoiries.
«Qui, sinon nos équipes nationales, représente donc la Suisse?», a questionné Müller de manière rhétorique. Le Conseil des Etats a déjà clairement approuvé sa demande. La semaine prochaine, la commission compétente du Conseil national se penchera sur la question.
Traduction et adaptation en français: Yoann Graber