Michelle Gisin a «souvent eu l'impression qu'au moment précis où Priska prenait le départ, un nuage apparaissait dans le ciel bleu et cachait le soleil». Ce n'est pas arrivé ce dimanche à Crans-Montana, où rien n'est venu assombrir la performance de Priska Nufer, vainqueur en descente devant Ester Ledecka et Sofia Goggia.
Ce n'est pas seulement une victoire. C'est un exploit doublé d'un éloge de la persévérance pour l'Obwaldienne, vainqueur pour la première fois de sa carrière après 30 ans d'efforts et pas moins de 144 départs en Coupe du monde (ceux qui ont jeté leur Rubik's Cube de rage après cinq tentatives sauront reconnaître l'abnégation).
«Tout ne s'est pas passé comme je l'avais imaginé dans ma vie de skieuse. Enfin des larmes de joie et non de déception», a savouré la championne, qui n'a pas seulement souffert du mauvais temps ces derniers mois. Il y a d'abord eu le Covid, début janvier, qui lui a donné «du fil à retordre»; puis une double frustration aux Jeux de Pékin (non qualifiée en descente puis éliminée en combiné). «Mais maintenant, tous les doutes et les soucis ont disparu, du moins pour le moment», savoure Blick.
La Neue Zürcher Zeitung retrace le destin fabuleusement tardif de cette fille d'Alpnach, qui a grandi dans une famille modeste d'agriculteurs avec cinq frères et sœurs en attendant patiemment son heure. «Les parents ont investi tout ce qu'ils pouvaient dans la carrière de leur fille, appuie la Thuner Tagblatt ce matin. Les frères et sœurs ont renoncé à tant de choses, aidant à la ferme lorsque leur père accompagnait Priska aux courses en tant que coach et homme de service.» L'aide est aussi venue de l'extérieur: «De parfaits inconnus ont cru en elle et lui ont versé des dons.»
Priska Nufer avait beaucoup de pression, elle a dû répondre aux attentes, confirmer ses talents de jeunesse lorsque, adolescente, elle écrasait Michelle Gisin à chaque course.
Celle que tout le monde appelle affectueusement «Prisi» a enfin été récompensée et c'est beau comme un conte de fées, trouve le Tages Anzeiger. «L'histoire de Priska Nufer est celle d'une lutte permanente, de revers et de doutes», insiste Philipp Rindlisbacher.
Le genre d'histoires qui font de superbes documentaires Netflix et réjouissent tout ceux qui adorent le sport. «Tout le monde, absolument tout le monde, qu'il s'agisse de ses coéquipières, de ses adversaires ou de son encadrement, s'est réjoui de son succès à Crans-Montana», souligne le journaliste alémanique Ives Bruggmann.
Lara Gut-Behrami (19e dimanche) y est aussi allée de son petit hommage: «Priska a toujours travaillé dur et a souvent été rapide en été. Une quatrième ou une cinquième place, c'est bien, mais une victoire, c'est autre chose. Cela me fait très plaisir. Qu'elle profite de cette journée.»
Les médias racontent que Priska Nufer avait déclaré en début de saison que «beaucoup de sportifs de haut niveau abandonnaient trop tôt». C'est parce qu'elle n'a rien lâché pendant si longtemps que l'Obwaldienne a été récompensée, dimanche à Crans-Montana, sous un ciel sans nuage.