Lors de sa victoire 5-1 contre Lucerne, samedi dernier en Women's Super League (1re division suisse), le FC Bâle féminin a fait payer l'entrée à ses supporters pour la première fois de son histoire. Les billets étaient disponibles une heure avant le coup d'envoi au prix de 10 francs par personne (5 francs pour les abonnés du FCB masculin et les bénéficiaires de l'AVS/AI; gratuit pour les moins de 16 ans). Comme il s'agissait d'une première, tout n'était pas encore au point: le paiement ne pouvait se faire qu'avec Twint, une carte bancaire ou un montant exact en espèces.
Pour justifier l'introduction de billets, le FCB a expliqué qu'il s'agissait d'une nouvelle étape dans la professionnalisation de sa section féminine. «Cela donne aussi une plus grande valeur aux matchs», assume le club du nord-ouest du pays, qui ne deviendra pas plus riche pour autant: les recettes provenant des entrées ne représenteront guère plus de 5% du budget annuel d'environ 800 000 francs.
En fait, le FCB se calque sur ce qui se fait ailleurs: dans le foot masculin, d'abord, où tous les matchs sont payants sans que personne n'y trouve rien à redire; dans le foot féminin, ensuite, où de nombreux autres clubs de première division font déjà casquer les spectateurs. C'est le cas du Servette FC Chênois féminin. L'équipe grenat ne fait pas de vente en ligne, mais propose des places à «10 francs environ» (selon le club) directement au stade.
On pourrait craindre que cela décourage les spectateurs de se déplacer, mais le FCB ne tremble pas pour ses audiences.
C'est également ce que confirme Christoph Schliewe, le responsable marketing de l'équipe féminine de GC. «Nous avons même pu augmenter massivement le nombre de spectateurs. Alors que 50 fans en moyenne suivaient nos matchs avant la vente de billets à l'été 2022, nous avions une moyenne de 300 personnes la saison dernière.» Schliewe attribue notamment cette hausse à la valeur prise par le «produit» et au fait que GC investisse ses recettes en faveur du public, améliorant par exemple l'offre de restauration au stade.
Contrairement au foot masculin, faire payer le public en 1re division féminine reste un sujet sensible. Les dirigeants doivent se justifier, expliquer pourquoi ils mettent en place une billetterie et ce qu'ils entendent faire avec les recettes. En 2e division, la question ne se pose (presque) pas. Même si le FC Sion féminin nous dit que le public n'a pas trouvé scandaleux de devoir débourser 10 francs (plein tarif) pour assister à un match du tour final l'an dernier à Tourbillon, les clubs ne veulent surtout pas décourager le public en lui faisant payer l'entrée. C'est ce que nous explique le FC Yverdon féminin par la voix de son chef de presse:
L'équipe nord-vaudoise pratique la méthode dite «du chapeau». «Quelqu'un passe dans la tribune en fin de match et chacun donne ce qu'il veut, nous dit le club. Au final, ce sont peut-être 200 francs par rencontre qui vont dans la caisse d'équipe et qui permettront aux joueuses de faire une sortie ou un repas au terme de la saison.»
Un tel montant semble dérisoire. Après tout, les footballeuses s'entraînent dur chaque semaine afin de proposer un jeu de qualité le week-end. Pourquoi leur prestation devrait-elle être accessible sans payer de droit d'entrée? Vice-président du FC Sion féminin, Vincent Fragnière se pose aussi la question.
«D'ailleurs, dès qu'on le peut, on demande au public d'acheter une entrée», ajoute Vincent Fragnière. Le problème, c'est que le club valaisan ne peut pas toujours mettre de billetterie en place. D'abord parce que ses matchs à domicile se disputent le plus souvent sur le terrain de l'Ancien stand à Sion, un espace considéré comme public, donc ouvert à toutes et tous. Ensuite parce que Sion organise parfois ses matchs «à domicile» dans des villages du canton.
Une des raisons qui a poussé Bâle à instaurer des billets cette saison, c'est la volonté réaffirmée de la Fédération et des clubs d'avoir des chiffres de fréquentation fiables. Or «une vente de billets aide à indiquer plus précisément à la Ligue le nombre de spectateurs présents au stade», a justifié le FCB. Un tel argument aurait-il un sens en LNB? Pas vraiment, selon Vincent Fragnière. «L'affluence n'est pas très difficile à connaître. On était 178 contre Yverdon le week-end dernier. Je le sais, parce que j'ai compté!»
En appliquant la grille tarifaire du FC Bâle, c'est-à-dire 10 francs le billet, 5 pour les abonnés à l'équipe masculine et les bénéficiaires de l'AVS/AI, et gratuit pour les moins de 16 ans, on peut facilement penser que le club valaisan aurait au final perçu moins de 1000 francs. Un maigre butin. Mais Vincent Fragnière préfère voir le bon côté des choses: «Ça permet au moins de financer les coûts du match, notamment la venue des arbitres!»