Allô François?! J'ai envie de pleurer. Je suis dégoûté. Rho la la... J'étais en train de crier dans les vestiaires du Dinamo Zagreb (ndlr: le club croate dans lequel il évolue). Ces tirs au but, c'était vraiment de la loterie.
Pourquoi dites-vous cela? Parce qu'il faut bien tirer, d'accord, mais les gars sortent de deux matches de 120 minutes, ils ont joué toutes les prolongations à dix contre onze. Ils étaient fatigués, il y avait de la tension. Schär et Akanji ont chacun raté leur frappe, alors que ce sont deux bons tireurs.
Le scénario rend l'élimination encore plus cruelle. Il y a d'abord eu cet autogoal, puis ce carton rouge. La Suisse a tenu en prolongations, on ne sait pas comment, avant de sortir aux tirs au but. Vous venez de souligner quelque chose d'important. «On ne sait pas comment.» Ça veut tout dire! À dix, c'était très compliqué d'aller aux tirs au but. Certes, l'élimination est dure, mais la Nati nous a au moins permis d'y croire jusqu'au bout. Elle aurait pu encaisser deux buts dans le jeu et l'affaire aurait été pliée.
Si on reprend le fil du match, il y a d'abord cet autogoal de Zakaria. Tendre la jambe comme il le fait pour dévier le ballon, c'est un réflexe malheureux de milieu de terrain? Exactement. Un défenseur central aurait peut-être agi différemment. C'est malheureux que ça tombe sur Zakaria. Il remplaçait Xhaka, devait se mettre en lumière et ça n'a pas réussi. Je pense qu'il s'est senti un peu fautif, mais il n'y pouvait rien.
Freuler a écopé d'un carton rouge en fin de rencontre. Cette expulsion était-elle justifiée? En voyant son tacle, je me suis tout de suite dit: «Oh purée, c'est rouge!» J'ai eu peur qu'il casse la cheville de son adversaire. Mais après avoir revu les images plusieurs fois, je pense qu'un jaune orangé aurait été plus juste.
Que retenez-vous de l'épopée suisse dans cet Euro? Son parcours hors du commun, tout simplement. Je tire mon chapeau au staff et aux joueurs après tout ce qu'ils ont montré. Mais il y a un peu de regrets aussi, forcément, car il y avait la place pour passer, atteindre les demi-finales.
On a vu une équipe avec un état d'esprit remarquable, ça compte aussi, non? Oui, c'est un état d'esprit que nous avons cultivé tous ensemble ces cinq dernières années, lors de l'Euro en France, au Mondial 2018 et en Ligue des nations. Le travail porte ses fruits.
Comment décririez-vous cet état d'esprit? On est comme une petite famille. Nous sommes de très bons joueurs, mais aucun de nous ne se prend pour une grande star. Chacun donne le meilleur de lui-même, on encourage l'autre quand il est en difficulté. C'est un groupe qui vit sainement.
C'est important ce que vous dites, car on lit souvent que les joueurs sont divisés, que les alémaniques ne parlent pas beaucoup aux francophones par exemple. Je ne vais pas dire que tout le monde s'embrasse partout, car il y a des sensibilités différentes dans chaque équipe et c'est tout à fait normal. Mais en Suisse, chacun respecte l'autre et travaille pour son coéquipier. On est ensemble.
Avec les qualités de coeur et de ballon qu'elle a montré cet été, pensez-vous que la Nati pourra être encore meilleure lors du Mondial 2022 au Qatar (du 21 novembre au 18 décembre)? C'est même une obligation, on se doit de l'être pour nous, joueurs, et pour la nation. On devra essayer d'aller toujours plus loin, et un jour, je ne sais pas quand, la Suisse gagnera titre.