L'influence de Ronaldo est inégalée, parfois dangereuse et excessive
À 36 ans, CR7 reste la star absolue de la sélection portugaise. Mais son influence sur le terrain diminue en même temps qu'elle augmente dans l'opinion. Décryptage d'Alexandre Carvalho, fondateur de www.golaco.fr.
La discussion démarre forcément par l'un des points forts de Cristiano Ronaldo, et ce thème met tout le monde d'accord: CR7 est un leader, qui assume ses responsabilités et son statut de capitaine. Son influence s'étend Jusque dans le vestiaire de la Seleçao, comme l'explique Alexandre Carvalho:
«On parle quand même d'un joueur qui a gagné cinq Ballons d'Or. Il a remis le Portugal sur la carte du monde. Forcément, quand il parle, les autres l'écoutent. En plus, il a besoin de ça, de se sentir utile. Il adore se faire siffler et absorber la pression. Son leadership est également gestuel. Quand Ronaldo se positionne en angle droit pendant l'hymne au bout de l'équipe portugaise, ce n'est pas anodin. Il veut montrer qu'il est là, que c'est lui le patron. Ce leadership est sans égal, dans aucune autre équipe nationale.»
CR7 en mode coach pendant la finale de l'Euro 2016
Si le leadership de CR7 ne faiblit pas, son influence sur le terrain, et notamment son positionnement, commence très timidement à soulever quelques questions. Le débat est rigoureusement identique à la Juventus où, malgré une saison réussie (29 buts en Serie A), l'attaquant n'a plus le même rendement qu'au Real Madrid.
Cristiano Ronaldo a 36 ans et il le sait. Comme il l'a reconnu en conférence de presse, il doit s'adapter à son âge, en club comme en sélection. Mais entre les paroles et les actes, l'ego s'interpose. CR7 ne s'adapte pas volontiers à ce nouveau rôle, un peu secondaire, qu'on lui confie parfois pour le ménager, surtout en sélection. Pour Alexandre Carvalho, le sélectionneur portugais porte une part de responsabilité:
«Jusqu'en 2016, cette omniprésence sur le terrain n'était pas un problème. Ronaldo était le seul Portugais capable de créer des brèches, de faire la différence. Mais en 2021, nous avons des joueurs comme Bruno Fernandes et Bernardo Silva qui s'éclipsent volontairement parce que Ronaldo dézone, décroche beaucoup, comme contre la Hongrie. Ce qu'un entraîneur lui demande aujourd'hui, c'est de rester dans la surface et de mettre des buts, ce qu'il a parfaitement réussi contre l'Allemagne. Est-il capable d'accepter ce rôle plus discret sur le long terme? Je ne sais pas, tout comme je ne sais pas si le coach est capable de le lui faire accepter.»
Fernando Santos et la difficile gestion de Cristiano Ronaldo.
Depuis l'arrivée de Fernando Santos, le Portugal gagne, mais il n'est pas beau à voir. Il est cynique, froid et calculateur. Il développe un jeu en U, fait de passes latérales et d'exploits individuels, souvent l'oeuvre de Cristiano Ronaldo. La preuve encore dernièrement avec le désastre tactique observé contre l'Allemagne, où seul CR7 a fait jeu égal avec la «Mannschaft».
Cette pauvreté collective nourrit les réflexions les plus folles, notamment cette idée que le Portugal jouerait mieux sans Ronaldo, de manière plus libérée. Une théorie pas vraiment soutenue par Alexandre Carvalho: «Quand les critiques arrivent, Ronaldo a cette tendance à répondre sur le terrain, comme depuis le début de l'Euro.»
«On joue peut-être mieux sans lui mais on est pas meilleurs»
Traduction portugaise de «mieux vaut gagner sept fois 1-0 qu'une fois 7-0»
Son omniprésence
Ronaldo déplace une bouteille de Coca-Cola et voilà que le monde du football part en vrille. Pogba l'imite, Coca-Cola perd des millions et l'UEFA débloque une cellule de crise. Les actes de CR7 ont des conséquences incomparables, la star occupe l'espace médiatique de manière irrationnelle, ce qui peut avoir des effets positifs ou négatifs selon les joueurs portugais, dont certains se déchargent de toute responsabilité sur leur capitaine. L'avis d'Alexandre Carvalho:
«Il y a un problème de communication au sein de l'équipe nationale. À chaque conférence de presse, Fernando Santos rappelle que Cristiano Ronaldo est le meilleur joueur du monde, les joueurs postent des photos de CR7 sur leurs comptes Instagram comme des fans lambdas. Je les comprends, ils ont grandi en regardant Cristiano à la télé et ils se retrouvent sur le terrain maintenant avec lui, ça doit être fou. Mais au bout d'un moment, des joueurs du calibre de Bruno Fernandes, de Joao Felix ou de Bernardo Silva doivent prendre leurs responsabilités et se mettre à son niveau.»
«Franchement, c'est difficile pour moi de le critiquer. Il nous a tellement apporté.» En une phrase, Alex Carvalho vient de résumer les ambivalences de toute une nation: même s'il devient moins performant, CR7 jouira d'un totem d'immunité. On ne peut pas le mettre sur la touche ni même le sortir, sauf sur blessure: c'est interdit, assumé comme tel par le Portugal et les Portugais.
La décision devra venir du champion lui-même, comme l'explique Alexandre Carvalho.
Avec un tel ego, je pense que Ronaldo aura l'intelligence d'arrêter quand il sentira qu'il ne peut plus apporter autant qu'il le voudrait. Je ne le vois pas partir en laissant une mauvaise image»
Ce statut privilégié s'explique également par le fait qu'avant Cristiano Ronaldo, le Portugal n'avait presque rien gagné. Au contraire de l'Argentine, par exemple, qui a remporté des titres mondiaux et enfanté des génies bien avant l'arrivée de Lionel Messi.
CR7 a ramené des trophées au pays.Image: AP
France-Portugal, une affiche symbolique 🇫🇷🇵🇹
«Oui, c'est une affiche particulière et difficile à gérer sur le plain humain.» Alexandre Carvalho fait partie de ces presque deux millions de personnes aux origines portugaises vivant en France. «À chaque grande compétition internationale, il y a cette rivalité entre Français et Portugais. On encaisse passablement de critiques car on supporte le Portugal. J'aime la France, mais le Portugal, ce sont mes racines, la famille, mon pays. Ce qui est difficile, c'est que là-bas aussi, on subit certaines remarques, on est des emigrantes.» Cette rivalité est alimentée depuis quelques années par une tendance de la deuxième génération de Portugais à vouloir s'éloigner des clichés qui collent à la peau de leur communauté. «Là où nos parents disaient oui à tout, on dit non. On veut s'éloigner des idées reçues et obtenir le respect que mérite notre communauté.» Et forcément, cette rivalité se matérialise à travers le football.
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