Lorsque Tadej Pogacar prend le départ d'une course, il a toujours deux adversaires: le reste du peloton et l'histoire du cyclisme. Il n'en sera pas autrement dimanche, lorsqu'il s'élancera pour la première fois sur la reine des classiques, Paris-Roubaix. Depuis le Français Bernard Hinault en 1981, aucun vainqueur sortant du Tour de France n'a gagné dans le vélodrome de Roubaix.
Ce sera peut-être pour cette année. Le Slovène de 26 ans a prouvé qu'il était dans une forme éblouissante en remportant de main de maître sa deuxième victoire dans le Tour des Flandres dimanche dernier. Il s'est ensuite entraîné dans plusieurs secteurs pavés de Paris-Roubaix, réalisant les meilleurs temps enregistrés sur Strava. De quoi effrayer un peu plus la concurrence, même si ces résultats sont à prendre avec précaution: d'abord parce que les conditions ne sont pas comparables à celles d'une course, ensuite parce que plusieurs vidéos ont révélé que «Pogi» avait profité de l'aspiration derrière une moto.
C est officiel, Pogacar a triché en faisant du derrière moto afin de prendre des koms sur Strava!
— Philippe Gilbert (@PhilippeGilbert) April 6, 2025
Et tout le monde pensait qu il était en grande forme 😂😂😂! pic.twitter.com/eaff4CFPbn
Celui qui a déjà remporté huit Monuments du cyclisme n'a pourtant pas besoin d'impressionner ses adversaires avec de telles démonstrations. Même Adrie van der Poel, ex-coureur et père de Mathieu van der Poel, considère que le Slovène sera clairement favori dimanche:
Outre ses qualités, Pogacar peut aussi compter sur un petit coup de pouce du destin: son plus sérieux adversaire (Mathieu van der Poel) était malade la semaine dernière et la météo devrait être de son côté dimanche. «Si on avait annoncé de la pluie et du froid, cela l'aurait désavantagé», songe Adrie van der Poel. Mais dimanche, le temps devrait être chaud et surtout sec. «Dans ces conditions, son gabarit n'est pas un inconvénient.»
Le poids lourd de l'histoire du cyclisme pèse 66 kilos. Comparé à ses adversaires sur Paris-Roubaix, le Slovène est donc un poids plume. Or depuis le début du millénaire, tous les vainqueurs, à une exception près, affichaient au moins 75 kilos sur la balance.
Pour trouver un vainqueur de Paris-Roubaix dans la catégorie de poids de Pogacar, il faut remonter loin à 2001, lorsque le Néerlandais Servais Knaven (68 kilos) avait remporté en solitaire une course chaotique disputée dans l'humidité et le vent. Cette année-là, seuls 55 des 190 coureurs au départ avaient vu Roubaix.
En raison de l'absence de montées abruptes, les coureurs ne doivent pas beaucoup se lever de leur selle. «Les muscles supérieurs, au-dessus du bassin, jouent donc un rôle plus primordial qu'ailleurs», souligne Eurosport, précisant que «le déhanchement d'un Van der Poel et sa capacité à emmener beaucoup de vitesse sans se mettre en danseuse sont ainsi un atout inestimable».
Alors que la forme parle en faveur de Pogacar, van der Poel, avec ses 75 kilos, a le poids et l'expérience de son côté. Sur ses quatre participations à Paris-Roubaix, il a remporté deux victoires, a terminé une fois 3e et une autre fois 9e. Le coureur de 30 ans pourrait également forcer les portes de l'Histoire ce week-end puisque seuls Octave Lapize (1909 à 1911) et Francesco Moser (1978 à 1980) ont réussi l'exploit de s'imposer trois fois de suite dans «l'enfer du Nord».