Lausanne a appris la nouvelle un peu par hasard; mais comme dit l'adage, les cocus sont toujours les derniers informés: elle n'accueillera pas les Mondiaux de hockey en 2026. Pas après avoir perdu ceux de 2020, tout organisé et tout préparé pour rien, jusqu'à leur annulation de dernière minute pour cause de Covid.
«La fédération suisse de hockey sur glace a échangé des mails avec Chris Wolf, le CEO du Lausanne HC. Nous avons appris par ces échanges que le choix s’était finalement porté sur Fribourg», révèle Patrice Iseli, chef du service des sports à la Ville de Lausanne et président du comité d’organisation local en 2020.
En privé, le comité central critique durement la culture de travail instaurée à Lausanne: trop d'interlocuteurs, trop de complications, trop d'ego. Trop de problèmes. «Plus jamais Lausanne», aurait juré un membre excédé au cours d'une séance.
Ce comité est constitué à parts égales de Swiss Ice Hockey et de la société Infront. Selon nos informations, il aurait privilégié Fribourg, notamment, pour «ses décisions rapides» et la possibilité de «traiter directement avec les autorités, en cercle restreint», des facilités qu'il n'espérait plus obtenir de Lausanne.
Sauf que ce n'est apparemment pas le discours officiel. «Le comité d'organisation local que je dirigeais réunissait de nombreuses parties: le LHC, la patinoire de Malley, la police, les pouvoirs publics. Nous n’avons jamais entendu la moindre plainte sérieuse de la part de Gian Gilli, le CEO des Mondiaux 2020. Il y a eu de très nombreuses séances, sans problème particulier. Les aller-retour permanents entre nos deux entités sont toujours restés extrêmement fluides. Dans ces conditions, je suis stupéfait de lire dans la presse que tout était compliqué avec Lausanne. C’est de la diffamation!»
Lausanne s'estime d'autant plus lésé qu'il a déjà œuvré trois ans sur ce projet. «Et sans le moindre accrochage, du moins pas à ma connaissance, poursuit Patrice Iseli. Je défie quiconque à la fédération de mettre nos supposés problèmes sur la table. Je pourrais éventuellement comprendre et accepter des reproches si quelqu’un en avait formulé. Mais en l’occurrence, il n’y a rien. Nous n’avons reçu que des louanges.»
Sans pensée complotiste (ou alors juste une arrière-pensée...), Lausanne ne tait pas ses doutes et ses soupçons. «Dès le départ, il y a eu une volonté de nous mettre hors-jeu, observe Patrice Iseli. La fédération a écrit à plusieurs sites en Suisse pour les encourager à présenter leur candidature, mais ni la Ville de Lausanne, ni la Vaudoise aréna n’ont reçu ce courrier. Nous avons appris la chose incidemment, puis nous nous sommes dépêchés de déposer notre dossier.»
Patrice Iseli le reconnaît, le comité central ne lui avait rien promis. «Quand le Championnat du monde 2020 a été annulé en raison du Covid, personne ne nous a jamais dit que Lausanne «récupérerait» ceux de 2026. Mais ça paraissait tellement légitime… Nous avions déjà travaillé trois ans sur ce projet. Nous avions un dossier hyper solide, avec de gros soutiens financiers.»
Fribourg aurait également bénéficié de structures mieux adaptées, avec de nombreux bâtiments adjacents, et du soutien amical de René Fasel, ancien président de la Fédération internationale de hockey sur glace. Les conditions financières, en revanche, n'ont pas filtré. Une personnalité influente du hockey suisse n'exclut pas qu'elles aient pu peser, tout en doutant que «Lausanne n'ait pas eu les moyens de s'aligner si nécessaire».
«Je peux tout à fait entendre qu’il y a eu des problèmes. Mais alors, qu’on nous dise lesquels, s'étrangle Patrice Iseli. Cette façon de procéder n’est absolument pas professionnelle ni fair-play. Nous sommes tous fous de rage, le LHC, la Ville, le Canton. Nous le prenons comme un manque de respect pour le travail accompli pendant trois ans et pour Lausanne, capitale olympique. Nous exigeons de la fédération suisse d’avoir connaissance de la procédure et des critères d’attribution, s’ils existent…»
Collaboration: Klaus Zaugg