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Ski alpin: Lara Gut-Behrami veut avoir des enfants

Lara Gut-Behrami of Switzerland poses during a press conference at the Alpine Skiing FIS Ski World Cup, in St. Moritz, Switzerland, Thursday, December 19, 2024. (KEYSTONE/Jean-Christophe Bott)
La Tessinoise est en Coupe du monde depuis plus de 17 ans.Image: KEYSTONE

«J'ai un mari merveilleux avec lequel je veux avoir des enfants un jour»

Dimanche dernier, Lara Gut-Behrami a été élue pour la troisième fois sportive suisse de l'année. Dans une interview exclusive, la jeune femme de 33 ans parle de la gestion des émotions, du rôle de ses parents, et révèle pourquoi elle ne veut devenir mère qu'après sa carrière de skieuse.
12.01.2025, 17:3915.01.2025, 11:47
Martin Probst
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Vous avez dit un jour que dans le sport, on oublie souvent la personne derrière la performance. D'où la première question: comment se porte l'être humain Lara Gut-Behrami?
Merci de me le demander. Je me sens bien.

Vous vouliez dire par là que la performance sportive n'est pas la seule à définir la façon dont vous vous sentez?
Exactement. Prenons par exemple mon forfait à Sölden. Il a suscité de nombreuses spéculatrions: a-t-elle fait un burn-out? Est-elle déprimée? On est même allé jusqu'à demander à mon mari si tout allait encore bien entre nous. En réalité, j'ai renoncé simplement parce que je ne me sentais pas prête sur le plan sportif.

Pour beaucoup pourtant, il s'agissait d'une crise existentielle.
Je me sentais bien mentalement. L'été avait été incroyable, octobre aussi. Mais sur les pistes, ce n'était pas pareil. Or en tant qu'athlète, il faut apprendre à faire la différence entre la vie personnelle et le ski. On a souvent le sentiment que la partie sportive est la plus importante dans la vie. Et ne vous méprenez pas: ce que je fais est extrêmement important pour moi. J'aime le sport, mais ce n'est qu'une partie de ma vie, et ce n'est pas toujours la plus belle ou la meilleure.

Vous me disiez avant: «Dans la vie normale, je me laisse beaucoup plus emporter par les émotions.» Mais pas dans le sport?
C'est devenu une protection que de contrôler mes émotions. Le fait de passer sans cesse de l'état de joie à celui de tristesse profonde en compétition coûte trop d'énergie à long terme dans une carrière. Je suis beaucoup plus calme dans le sport. C'est le moyen que j'ai trouvé pour y rester aussi longtemps. Je n'ai pas besoin de sourire tout le temps, mais à long terme, je veux être satisfaite. En privé, c'est différent, je peux vivre beaucoup plus directement les choses et profiter des moments sans déjà planifier à l'avance.

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La skieuse est en couple avec l'ancien footballeur Valon Behrami depuis 2018. Image: KEYSTONE

Sport de haut niveau et satisfaction sont-ils en quelque sorte incompatibles?
Un peu, oui. Même si vous êtes le meilleur skieur du monde, il y a plus de jours dans l'année où vous ne gagnez pas que de jours où vous terminez sur le podium.

«Je le vois avec Valon: la vie est plus paisible quand on n'a plus la pression d'être un athlète de haut niveau»

Vous avez 33 ans, la fin de votre carrière se rapproche lentement. Comment décidez-vous des choses importantes dans votre vie? Spontanément, sur un coup de tête, ou de manière planifiée de longue date ?
Avant, je pensais qu'un jour ou l'autre, je sentirais lorsque le moment de la retraite serait venu. Mais j'ai le sentiment que ce n'est pas aussi simple, les choses ont changé avec le temps.

Dans quel sens ?
Après mon terrible accident (réd: elle s'est gravement blessée au genou en 2017), je me suis dit que si je pouvais encore tenir jusqu'aux JO de Pékin en 2022, ce serait bien. Je ne pouvais pas imaginer que j'aurais encore de l'énergie pour continuer après cela. Mais ensuite, c'est devenu encore mieux qu'avant. Ce n'était pas comme si j'étais beaucoup plus détendue, mais j'ai trouvé un nouveau sens. Ce n'était plus une obligation, mais plutôt une possibilité, je m'autorisais à skier professionnellement aussi longtemps que j'y prenais plaisir.

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La skieuse de Comano en action.Keystone

Et quel est votre sentiment actuel ?
L'hiver dernier, j'ai souvent pensé que c'était probablement la fin. Mais l'été est arrivé et avec lui une nouvelle motivation. Et je me suis dit: «Pourquoi seulement une année de plus»? Les Jeux olympiques de Cortina en 2026 seraient tout de même une belle conclusion. À un moment donné, il faut se fixer un objectif à long terme pour ne pas penser tous les jours à la date de la fin. Mais le plus beau, c'est la certitude que j'ai quelque chose qui m'attend. J'ai un mari merveilleux avec qui je veux avoir des enfants un jour.

Il y a aussi des mères dans le sport de haut niveau. Cela n'a jamais été une option pour vous ?
Ma vie est rythmée par le sport. Or en tant que mère, je veux prendre du temps pour mes enfants, tout comme mes parents l'ont fait pour moi et mon frère.

«Personnellement, je ne serais pas en mesure de bien coordonner le sport de haut niveau et la maternité»

Vos propres parents sont très présents dans votre carrière. Quelle importance y accordez-vous ?
Une immense importance. Je pense que c'est aussi une des raisons pour lesquelles je suis toujours sur le circuit. J'ai toujours eu ma famille autour de moi, ma carrière est un projet commun. Nous y travaillons ensemble depuis de très nombreuses années, et nous pouvons tous en vivre. Mes parents ont toujours été présents, toujours là pour moi et mon frère. Je leur en suis extrêmement reconnaissant. Et j'ai déjà dit à mes parents que lorsque j'arrêterais, ils pourraient déjà se préparer pour leurs petits-enfants (rires).

Recommanderiez-vous à vos enfants de faire une carrière de sportif de haut niveau?
Le sport est un apprentissage pour la vie. Ne serait-ce que le fait de se lever le week-end et de faire quelque chose. Petite déjà, j'allais à la neige tous les week-ends. Cela me rend triste quand je vois des enfants qui ne bougent pas. Il n'est pas nécessaire de faire du ski, mais quand on est enfant, on devrait pouvoir passer beaucoup de temps dehors.

Qu'est-ce qui vous a particulièrement marqué dans l'éducation de vos parents ?
Mon père m'a dit très tôt: «Soit tu décides toi-même, soit d'autres le font à ta place ». Ce principe m'a marqué. Et j'en tiens compte encore aujourd'hui. Si je décide par moi-même, j'en assume les conséquences. Personne d'autre n'est à blâmer.

Il faut aussi savoir dire non de temps en temps.
Si d'autres personnes viennent sans cesse te dire ce qui serait bien, tu ne seras plus que sous l'influence d'autrui. J'ai appris à dire ce qui est bon pour moi et ce qui ne l'est pas, ce à quoi je participe et ce à quoi je ne participe pas. Il y a toujours des situations où l'on me dit: «Mais il faut faire ça comme ça». Et je demande alors: «Qui dit ça?» Et si je ne suis pas d'accord, je ne le fais pas. Avec le temps, j'ai ainsi pu éviter de nombreux conflits et vivre plus tranquillement.

Est-ce aussi un privilège de pouvoir dire non? Dans le domaine du marketing aussi, vous n'êtes pas prête à tout faire, sinon vous auriez déjà trouvé un nouveau sponsor pour votre casque.
Les sponsors sont une partie importante de la carrière d'un sportif, et je suis reconnaissante d'avoir eu de très bons partenaires à mes côtés. Mais s'il ne s'agissait que d'argent, je serais encore sur les médias sociaux, j'aurais vendu ma relation, ma vie privée et toutes sortes de choses. J'ai choisi une autre voie. J'aimerais faire quelque chose pour la prochaine génération. Le sport est tellement important, et ce serait merveilleux si je pouvais partager cette vision avec un nouveau sponsor.

Vous êtes sur le devant de la scène depuis l'âge de 16 ans. On a beaucoup écrit et dit sur vous. A quel point les jugements d'autrui vous dérangent-ils encore?
Avant, je pensais que ce que je disais ou pensais était important. Aujourd'hui, je sais que ce n'est pas le cas. Bien sûr, j'aime susciter des émotions chez les gens grâce au ski, j'aime la passion du public. Et quand je vois les images des Sports Awards, j'ai tout de suite envie de faire des courses. Mais nous ne sommes rien de plus que ça...

Pour terminer, j'aimerais revenir sur votre décision de ne pas prendre le départ à Sölden. Vous avez ensuite déclaré que vous ne vouliez pas prendre le risque qu'une blessure mette fin à votre carrière. La vision du risque du ski change-t-elle au cours d'une carrière?
Je dirais plutôt qu'on évalue beaucoup mieux le risque avec le temps. Au début de la carrière, il faut se heurter à ses limites pour savoir où elles se situent. C'est là que je vois un problème aujourd'hui: si l'on freine les jeunes trop tôt, comment pourront-ils découvrir ce qui est possible? Dans le sport de haut niveau, il faut toujours pouvoir faire un peu plus que les autres pour gagner. Si l'on dépasse les limites, on en tire des leçons en tant que jeune athlète.

«Aujourd'hui, c'est la qualité de mon entraînement qui compte, alors qu'avant, c'était la quantité. Je connais les pistes et je sais ce qu'il faut faire à tel endroit pour être rapide»

Seul celui qui connaît ses limites peut s'en approcher ?
Quand on est jeune, on doit en fait toujours essayer de donner le maximum, que l'on soit malade ou en pleine forme. On apprend ainsi que de bons résultats sont possibles même si tout n'est pas parfait. J'ai remporté ma première médaille aux championnats du monde en 2009, bien que j'aie eu la grippe. Si j'avais renoncé à prendre le départ à l'époque, je n'aurais peut-être plus jamais participé à une course si je ne me sentais pas à 100 %. On ne peut pas se permettre cela dans le sport de haut niveau.

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