Il pleut des cordes lorsque Paolo Gallivanone se met en route en direction du supermarché de Buchs (SG) en ce lundi matin. Cet Italien de 47 ans est le chef-soigneur de l'équipe suisse Tudor Racing. En fait, c'est l'homme à tout faire. Ce jour-là, il fera les courses, cuisinera, conduira, organisera, massera, lavera, nettoiera et rangera. Mais chaque chose en son temps.
Les sacs de courses pleins, Gallivanone retourne au grand camion de l'équipe. Celui-ci est divisé en une zone pour les vélos et une zone pour la cuisine. Deux tiers de l'espace servent au stockage des cycles et aux mécaniciens comme atelier. Le dernier tiers abrite la cuisine, y compris la machine à laver et le sèche-linge.
Le chef-soigneur sait exactement où trouver ce dont il a besoin dans les nombreux tiroirs. Chaque geste est parfait. L'Italien doit préparer 14 salades et sandwichs pour le staff de l'équipe. Les coureurs sont, eux, approvisionnés par leur propre cuisinier selon un plan alimentaire strict et élaboré. Paolo Gallivanone, qui travaille chez Tudor depuis la création de l'équipe en 2023, connaît désormais sur le bout des doigts les préférences culinaires de ses collègues et s'efforce d'apporter le plus de variété possible dans les menus.
Après avoir soigneusement portionné et emballé le gâteau de riz fait maison et rangé la cuisine, il prend la route avec son van plein à craquer en direction de Regensdorf (ZH), où se terminera la 2e étape du Tour de Suisse. Au même moment, le chef-cuisinier part de Buchs avec son petit camion. Un peu plus tard, ce sera au tour du grand camion de prendre la route.
Une heure et demie plus tard, Paolo Gallivanone arrive à Regensdorf devant l'hôtel Mövenpick. C'est là que l'équipe Tudor passera les deux prochaines nuits. Et c'est aussi là que le casse-tête commence pour le chef-soigneur. Avec, d'abord, la répartition des chambres, qui est l'une de ses tâches principales. En règle générale, l'Italien se rend dans les hôtels choisis une semaine avant les courses afin de procéder aux premières vérifications. Y a-t-il suffisamment de place de parking pour les dix véhicules de l'équipe, y compris le camion et le car? Les chambres sont-elles aussi proches que possible les unes des autres? Peuvent-elles être occupées suffisamment tôt?
A la réception, il faut s'armer de patience. La collaboratrice avec laquelle Gallivanone s'est entretenu au préalable n'est pas là. Ses remplaçantes doivent d'abord se faire une idée de cette véritable jungle des chambres et des souhaits. L'Italien reste patient, se perd parfois lui-même dans la liste des visiteurs, avant de retrouver le fil.
«La répartition définitive n'est fixée que lorsque j'ai vu personnellement chaque chambre», explique le chef-soigneur. Il est sur la route pendant 180 jours de course par an et visite presque tous les continents. Autant dire que ses trois semaines de vacances en novembre sont méritées. «Le cyclisme ne s'arrête jamais», sourit l'Italien. Sa femme et son fils de 18 ans se sont habitués depuis longtemps à ces longues absences.
«Tant que tout va bien à la maison, le travail ne pose pas de problème. Mais si quelque chose ne va pas, c'est difficile de ne pas être là», témoigne Gallivanone, qui travaille depuis dix ans dans le cyclisme professionnel. Il a notamment été au service de Swiss Cycling lors de quatre championnats du monde. C'est par ce biais que le contact avec l'équipe Tudor s'est établi. Auparavant, il a travaillé pendant plusieurs années en Italie avec la relève.
Entre-temps, le grand camion est arrivé à Regensdorf. Avec lui, les valises de tous les collaborateurs de Tudor. Paolo Gallivanone décharge le matériel avec le chauffeur. Puis la distribution des bagages commence. Le chef-soigneur procède déjà à une première sélection dans le hall devant l'ascenseur. Les valises doivent être réparties sur différents étages, il faut éviter tout déplacement inutile.
Les tables de massage et autres objets auxiliaires sont également transportés dans les étages de l'hôtel. Un vrai remue-ménage. Paolo Gallivanone a du pain sur la planche. Le premier objectif? Tous les chauffeurs et les masseurs doivent avoir leurs chambres au même étage et les trajets doivent être réduits au maximum. Grâce à une petite rocade, le chef-soigneur parvient à créer le scénario parfait.
L'hôtel Mövenpick offre beaucoup d'espace et de confort. Tudor est la seule équipe du Tour de Suisse à y passer deux nuits. Gallivanone a donc le temps et l'espace pour s'étendre. Mais ce n'est pas toujours ainsi. L'Italien, qui habite près de Vérone, sourit à nouveau:
Dans les chambres attribuées aux quatre masseurs, le chef-soigneur de Tudor installe une table de massage entre chaque lit. Ici aussi, il y a de l'espace et du confort. Gallivanone est donc satisfait. Peu avant 14h00, le puzzle est complet, tout est là où il doit être. C'est l'heure de la pause de midi.
La journée de travail est cependant loin d'être terminée. Après le dîner, Paolo Gallivanone se rend à nouveau dans la cuisine mobile où il prépare un gâteau de riz pour le lendemain. Pourtant, les cyclistes professionnels se nourrissent depuis longtemps majoritairement de barres énergétiques et de gels. «Le gâteau de riz, c'est de la vieille école», reconnaît le soigneur-cuisto. «Mais c'est un bon changement pour les coureurs».
Le passage de la cuisine à la table de massage montre à quel point le métier de soigneur dans une équipe cycliste est varié et nécessite de la flexibilité. Une heure après l'arrivée des coureurs à Regensdorf, ceux-ci sont déjà allongés sur la couchette. Paolo Gallivanone en traite deux chaque jour. Leurs jambes fatiguées sont massées par les mains de l'Italien. Ces mains qui, il y a quelques instants encore, maniaient la cuillère de cuisine.
Ce n'est qu'une fois que les cyclistes ont tous reçu leur traitement que le chef-soigneur et ses collègues peuvent penser au souper. Mais ce n'est pas encore la fin du boulot: le linge doit encore être lavé et séché. «Ce n'est que lorsque tout est rangé et nettoyé que mon travail de la journée est terminé», rappelle Paolo Gallivanone, qui fait son travail avec une passion et un cœur incroyables.
Vous voulez une autre preuve de la polyvalence requise dans son job? Si vous n'avez ni le permis poids lourd ni le permis bus, inutile de postuler. Cuisinier, logisticien, masseur, chauffeur: oui, le soigneur chez Tudor doit être un véritable caméléon. Et il accomplit ses tâches entièrement dans l'ombre, loin du monde scintillant des cyclistes pros.
Adaptation en français: Yoann Graber