De nombreux triathlètes vous le diront. Malgré tout le battage médiatique autour de la Seine, ce ne sont pas forcément les eaux les plus dégueulasses dans lesquelles ils ont dû tremper l'orteil. Comme le confiait déjà la médaillée de bronze suisse olympique Magali Di Marco à watson l'an dernier, «il y a plein d'endroits suspects dans lesquels on a plongé sans que les organisateurs ne procèdent à la moindre analyse. On a nagé dans des ports, des zones industrielles, des grandes villes».
Un constat partagé par de nombreux collègues, dont le Français Alexis Hanquinquant à 20 Minutes.fr: «On en a fait beaucoup sur la qualité de l’eau de la Seine».
«J'ai certainement nagé dans des plans d'eau beaucoup plus stagnants et douteux tout au long de ma carrière de triathlète professionnelle», a réchenrit l'Américaine Taylor Spivey la semaine passée, à The Athletic.
Et ce n’est pas le triathlète Jacob Birtwhistle qui dira le contraire. L'an dernier, après l'étape de natation des Championnats du monde de triathlon à Sunderland, au Royaume-Uni, l'Australien a souffert de diarrhées et de vomissements. Et poussé son coup de gueule dans la foulée sur les réseaux sociaux:
Jacob Birtwhistle n'était probablement pas le seul à le penser, alors que 57 participants au triathlon ont contracté des symptômes divers et variés après avoir nagé dans les eaux jugées d'une qualité suffisante par les organisateurs.
Mais les triathlètes en ont vu d'autres. Plusieurs participants ont déploré des problèmes gastriques après les Jeux de Rio, en 2016, et ceux de Tokyo, en 2021.
La bête noire des nageurs? La bactérie E. coli. Si elle est naturellement présente dans la microflore digestive de l'être humain, certaines souches de ces bactéries fécales sont pathogènes. Elles peuvent provoquer des troubles variés: d'une simple diarrhée à des crampes d'estomac, en passant par les vomissements, des diarrhées hémorragiques, voire de graves atteintes aux reins.
Faire attention à ne pas boire la tasse ne suffit pas. Le simple contact d'une eau contaminée et de ses germes peut provoquer des maladies cutanées, des otites ou encore une infection des voies urinaires. Joie!
Sommés de cohabiter avec les microbes, déchets humains, rats crevés et autres objets flottants non identifiés, les triathlètes doivent donc prendre leurs précautions avant chaque compétition, pour préserver leur santé et rester compétitifs. Lors de la Coupe du monde en 1996, Magali Di Macro l'a découvert avec surprise: «La novice que j'étais avait appris plus tard que la moitié des concurrentes avaient pris de l'Imodium avant l'épreuve, histoire de prévenir d'éventuels troubles gastriques».
Il est désormais connu que les triathlètes ont recours à une joyeuse combinaison de probiotiques, de médicaments anti-nauséeux, de sels d’argent ou encore de pastilles de chlore - le désinfectant chimique le plus répandu dans le monde pour rendre l’eau potable et lutter contre les bactéries et les virus, mais qui ne permet cependant pas d’éviter à coup sûr les maladies intestinales. D'ailleurs, le chlore peut se révéler néfaste pour l’organisme s'il est consommé régulièrement ou à haute dose.
La Britannique Georgia Taylor-Brown, de son côté, a indiqué au LondonTimes qu'elle associait le Pepto-Bismol, un médicament anti-nausée, à un bain de bouche directement après l'effort. Plus surprenant? Elle confesse s'enfiler une canette entière de Coca-Cola, qui aiderait à tuer les bactéries nocives dans le système digestif.
Stratégie un peu similaire à l'Américain Morgan Pearson, qui a déclaré utiliser les glucides pour développer la résistance de son estomac aux eaux sales et vaseuses.
Toutefois, aucune préparation ne saurait concurrencer celle du triathlète américain Seth Rider, qui a choisi une méthode nettement moins conventionnelle pour se préparer aux niveaux potentiellement élevés de bactéries dans la Seine. «Nous savons qu'il y aura une certaine exposition à E. coli, donc j'essaie simplement d'augmenter mon seuil d'E. coli en m'y exposant un peu dans ma vie quotidienne», a-t-il expliqué au New York Times.
C'est-à-dire?
Vous voilà prévenu s'il vous arrivait de croiser l'Américain à Paris et d'avoir envie de lui serrer la pince.
Pas sûr, toutefois, que la technique soit de grande utilité à Seth Rider. Après l'annulation de la dernière séance d'entraînement dans la Seine ce lundi, en raison de la mauvaise qualité des eaux du fleuve, le doute persiste quant à la tenue de l'épreuve de natation ce mardi. Les organisateurs des JO pourront toujours tenter de décaler les dates des compétition - le jour de contingence a été fixé au vendredi 2 août. Le cas échant, les 1500 mètres de natation seront annulés et l'épreuve se transformera en duathlon.
«Paris 2024 et World Triathlon rappellent que la priorité est la santé des athlètes», ont indiqué dans un communiqué conjoint les organisateurs des JO et l’instance dirigeante du triathlon lundi, qui se disent «confiants» à la veille des compétitions. A l'instar des quelque 110 participants du triathlon de Paris 2024, à l'estomac bien accroché.