Le jeune Suisse Franjo Von Allmen, 21 ans, s'illustre en ce moment même au Canada. Le Bernois a glané trois médailles d'argent en trois courses – descente, super-G et combiné. Une belle moisson qui rappelle celle d'un certain Marco Odermatt, en 2018, avec pas moins de quatre médailles remportées – cinq avec le Team event.
Des médailles et des titres qui pleuvent, et des attentes qui s'ensuivent, inévitablement. Ces apprentis champions font montre d'un talent et attirent l'attention des médias. Marco Odermatt, après sa razzia de 2018, avait été taxé de prodige – et à raison. Mais la pression, pour des jeunes d'une vingtaine d'années, peut rapidement faire virer à la débandade.
You might be in trouble with your luggage guys until the end of the World Junior Championships @panoramacanada2022 😬
— FIS Alpine (@fisalpine) March 6, 2022
Both Giovanni Franzoni🥇🥉🥇 and Franjo von Allmen🥈🥈🥈 already snatched their third medal in the third race#fisalpine #panorama2022 pic.twitter.com/9xGiX8q2cW
De grands noms ont donc raflé des titres juniors, mais des skieurs (très) talentueux n'ont jamais pu confirmer au plus haut niveau. Si nous prenons depuis le début des années 2000, il est intéressant de relever les noms inscrits au palmarès. Henrik Kristoffersen, par exemple, a glané trois titres en géant et deux en slalom; Alexis Pinturault a été sacré deux fois en géant, alors que la légende Marcel Hirscher en compte deux en géant et un en slalom.
A bien étudier, et si nous nous attardons sur les palmarès de toutes les disciplines, il y a bien des enseignements à en tirer: les vainqueurs dans les disciplines de vitesse se sont moins illustrés par la suite. Hommes et femmes confondus.
Les experts, entraîneurs et observateurs nous le diront tous: le slalom géant est la base du ski alpin. Le véritable socle d'un bon skieur. Il est particulièrement instructif de remonter le fil des courses et de comprendre que la discipline du géant est annonciatrice d'une belle carrière. Du côté masculin, même si Kristoffersen, Pinturault et Hirscher se partagent sept titres à eux trois, sur 20 ans, nous retrouvons aussi des Meillard, Kilde, Albrecht ou Faivre. Alors qu'en vitesse, les lauréats n'ont pas réussi à s'imposer dans le cirque blanc.
Du côté féminin, l'exemple de la descente de 2010 est le plus notable, quand Jéromine Géroudet s'est imposée devant Jessica Depauli et Lotte Smiseth Sejersted. Les trois skieuses n'ont jamais réussi à s'installer en Coupe du monde. Alors qu'en géant, les Rebensburg, Weirather, Veith-Fenninger, Mancuso ou encore Robinson sont présentes.
Mais pourquoi ce grand écart entre la vitesse et la technique? Une première hypothèse est liée au format de la descente et du super-G où tout se joue sur une seule manche. La vitesse est aussi une histoire de bagage et d'expérience, que les jeunes n'ont pas ou peu avec les longs skis. Une autre hypothèse, des plus logiques: peu de jeunes skieurs ont l'occasion de participer à des descentes et super-G. Rien ne remplace «les kilomètres» de course, comme on aime le dire dans le jargon.
En Suisse, il est contraignant pour les organisateurs de mettre en place des courses de vitesse: ils doivent réserver une semaine entière une piste et des infrastructures importantes pour la sécurité. Et dans le calendrier, les juniors n'ont souvent qu'une semaine de course consacrée à ces disciplines. L'accent est davantage mis sur la technique et les bases fondamentales du ski. C'est souvent plus tard, avec une accession à la Coupe d'Europe, que des techniciens s'intéressent sérieusement à la descente.
Pour rappel, Beat Feuz – champion olympique de descente à Pékin – avait claqué deux médailles en slalom, aux Mondiaux juniors de 2005 et 2007.