Il y a foule sur le parvis de la Lonza Arena de Viège, à plus d'une heure du coup d'envoi de l'acte deux dans le barrage qui oppose le club haut-valaisan au HC Ajoie.
Très vite, les mêmes questions reviennent. La première, le capitaine Daniel Eigenmann est-il remis, après être sorti sur blessure à mi-match deux jours plus tôt? La deuxième, «Visp» va-t-il conserver l'avantage de la glace? Trop tôt pour pouvoir répondre à cette interrogation, on préfère se tourner vers la buvette extérieure, où il commence à y avoir la queue, signe qu'il fait encore chaud et que la patinoire valaisanne s'apprête à enregistrer l'une de ses meilleures affluences. On ne reçoit pas tous les jours une équipe de National League.
Il suffit de prêter l'oreille ici et là pour percevoir régulièrement des conversations en français. Des Jurassiens, cela s'entend, qui ne manqueraient pour rien au monde cette partie capitale dans la vie de leur club. Mais ils sont aussi nombreux à arborer une écharpe rouge, comme Jérémy, originaire de Sierre et habitué de la Lonza Arena. Le jeune homme prévient, taquin: «Il y aura beaucoup de Sierrois ce soir. Mais au fond, ils préfèrent qu'Ajoie reste en National League».
Ce n'est pas tout à fait vrai. Ceux du Valais central que nous rencontrons ont à cœur de voir le HC Viège réaliser l'exploit, preuve que l'ancienne grande rivalité avec Sierre s'est apaisée, que la récente confrontation en quarts de finale a vite été oubliée et que les deux clubs cohabitent bien. «On supporte Sierre. Mais on aime aussi Viège. Et puis ils sont quand même champions de Swiss League. On vient voir du beau hockey», souffle un quinquagénaire. Un autre détenteur de ticket abonde: «On est Valaisan avant tout. Et Sierre est en vacances».
Certains vont plus loin et assurent avoir changé de camp. «On a longtemps soutenu le HC Sierre. Mais on ne supporte plus les courants d'air de la patinoire de Graben. On est aussi des amis de Sébastien Pico (réd: le directeur général du HC Viège)», raconte une femme originaire du Val d'Anniviers. Son père à la retraite confirme. Il se souvient avoir encouragé il y a longtemps le HC Sierre à Porrentruy en Ligue nationale B et ne croit pas réellement au projet d'une grande arène porté par McSorley.
La vétuste patinoire du HC Sierre est évoquée à chaque discussion ou presque. Comme celle du HC Viège, faisant l'unanimité auprès de tous. «Vous allez voir, la patinoire est vraiment très belle. Elle est moderne et il y a un important service de restauration. On passe toujours une belle soirée», promet notre quinquagénaire, lui aussi vêtu d'une écharpe aux couleurs du club haut-valaisan. Il n'a pas tort. En regardant la bâtisse de l'extérieur, on se demande qui de Viège ou du HC Ajoie défend réellement sa place en National League, tant l'infrastructure, qui a accueilli Genève-Servette en Ligue des champions et des matchs de la Nati, est digne de la 1re division.
Certains ont fait encore plus de route, comme cet autre duo père et fille. Ils sont originaires du Valais, mais établis depuis longtemps à Genève. «On est avec des amis de Martigny. On vient voir un beau match. On est en vacances depuis longtemps. Et on ne veut surtout pas aller voir le LHC», plaisante le paternel, habitué des Vernets.
Il y a aussi cette Jurassienne présente en Valais depuis des années et venue assister au match en famille. Son cœur balance entre les deux équipes, mais pas celui de son fils, qui imagine déjà Viège recevoir Gottéron ou encore Lausanne. «N'empêche, ce serait fou.» Deux autres jeunes débarquent, prêts à chambrer le HC Ajoie en tribunes. Seraient-ils de ceux qui estiment que les Jurassiens n'ont pas leur place en National League et doivent enfin la céder? «Non, on aurait préféré un club alémanique en face», assurent-ils.
Le temps file et le coup d'envoi de la rencontre se rapproche. Les retardataires se pressent vers la Lonza Arena, non sans regarder l'imposant convoi militaire empruntant la route qui jouxte la patinoire. Serait-ce un match à très haut risque? Rien de cela. Les chars et les véhicules blindés se succèdent et poursuivent leur chemin à toute vitesse. Vacarme oblige, il est tout de suite plus laborieux d'entendre des conversations en français.
Le puck est lâché quelques minutes plus tard et la réponse à la première des deux questions d'avant-match obtient très vite une réponse. Daniel Eigenmann figure bien dans l'alignement viégeois. Il fait même soulever la foule après 13 minutes de jeu en s'empoignant avec Adam Rundqvist, suite à la violente charge du Jurassien Jannik Fischer sur Adam Brodecki. Pénalisé, on ne le reverra plus. Il faudra ensuite attendre la prolongation pour apprendre que le HC Ajoie a récupéré l'avantage de la glace.