Avez-vous déjà réservé l'Helvetiaplatz pour fêter le titre de champion?
ANCILLO CANEPA: (rires) Je ne répondrai pas à ça. Bien sûr, de bons souvenirs me reviennent toujours quand je passe devant l'Helvetiaplatz. Je pense à la fois où on a fêté le titre avec 15 000 fans. Ou quand on est arrivé à Zurich à 2 heures du matin en tant que tout frais champions, après un match à l'extérieur, et qu'on a été accueillis par 5000 personnes sur l'Helvetiaplatz. Ce serait déjà un rêve de pouvoir revivre quelque chose de ce genre. Mais je ne suis pas un rêveur. Pour ce premier tour, c'est en tant qu'équipe qu'on a été les meilleurs. Et c'est donc à juste titre qu'on occupe la première place.
Voyez-vous des parallèles avec les équipes précédentes du FC Zurich qui ont été sacrées?
L'équipe championne de 2006 avait elle aussi un esprit de groupe exceptionnel. Et à l'époque aussi, on avait, avec Lucien Favre, un entraîneur qui travaillait très minutieusement. Comme en 2006, on n'a pas non plus aujourd'hui la superstar qui décide de tout à elle seule. C'est peut-être un peu plus facile de grandir ensemble en tant qu'équipe. Je n'ai pratiquement jamais vu un tel esprit collectif.
Aussi fort qu'en 2006?
Absolument. Ce qui est étonnant dans cette équipe, c'est la rapidité avec laquelle elle s'est adaptée au concept de jeu de l'entraîneur. Avant, ce qui m'agaçait, c'était le jeu en largeur et en arrière. Aujourd'hui, c'est fini: on joue vers l'avant, sans conditions.
Tout va bien au FC Zurich. Osez-vous affirmer que votre équipe sera candidate au titre jusqu'au bout?
Je ne veux pas m'aventurer. Ce n'est pas non plus un sujet qui me préoccupe au quotidien. Je suis simplement très reconnaissant qu'on n'aie pas de problèmes. Beaucoup me disent maintenant: «Hé Canepa, qu'est-ce qui te prend de parler de maintien?». Mais j'ai vécu dans cette peur du bas de classement pendant quelques années. Alors pouvoir enfin un peu respirer, c'est une satisfaction. Bien sûr, on veut tirer le meilleur parti possible de la situation, parce qu'on est ambitieux.
Ce succès, ce n'est pas comme si vous aviez tout à coup engager Cristiano Ronaldo. Le FCZ est en tête du classement avec une équipe presque identique à celle qui luttait contre la relégation l'année dernière.
D'un côté, je suis d'accord avec vous. Huit joueurs qui étaient déjà chez nous la saison dernière sont souvent titulaires. Mais de l'autre, on a fait une analyse très factuelle, objective et approfondie de l'effectif avec le directeur sportif Marinko Jurendic pendant l'été passé, et on a fait 28 transferts (ndlr: arrivées et départs, tout compris). On savait, par exemple, qu'on avait besoin de deux joueurs de couloir avec un grand volume de jeu. C'était essentiel. On les a trouvés, avec Nikola Boranijasevic et Adrian Guerrero. Et on a un Assan Ceesay qui, tout à coup, marque des buts.
Mais Ceesay n'est pas une nouvelle recrue.
Oui, mais il ne marquait pas la saison passée (ndlr: 2 buts en 32 matchs, contre 11 en 17 parties cette saison). Si les choses vont beaucoup mieux pour lui maintenant, c'est en grande partie grâce à l'entraîneur. André Breitenreiter n'est pas venu avec une idée préconçue, il a d'abord observé, mené des discussions avec les joueurs et ensuite seulement, il a fait des corrections.
Beaucoup de gens ont l'image d'un Canepa qui règne seul. Pourquoi n'êtes-vous pas intervenu plus tôt quand vous voyiez que vos entraîneurs ne parvenaient pas à faire performer Assan Ceesay, un investissement de 1,8 million?
Je sépare strictement les aspects sportifs et économiques. Alors oui, avec ma femme, on a assuré la pérennité du club avec quelques millions. Mais Héliane et moi n'avons jamais fait ça pour des raisons d'investissement. Il s'agissait uniquement d'assurer les liquidités et la pérennité du club. Je n'ai jamais exigé d'un entraîneur ou d'un directeur sportif qu'il force avec tel ou tel joueur parce que le FC Zurich a investi des sommes importantes pour lui. On ne discute jamais de ça. Bien sûr qu'on est contents quand la valeur marchande d'un joueur du FCZ augmente. Mais ça n'a jamais été un objectif fixé à un entraîneur ou un directeur sportif.
Le contrat de Ceesay se termine à la fin de la saison...
Son intention est identique à la nôtre. On veut le prolonger. Et il veut rester avec nous.
Êtes-vous confiant quant à cette prolongation? Après tout, Ceesay pourrait toucher beaucoup d'argent s'il était transféré gratuitement cet été.
Il y a des joueurs intègres et loyaux, et il y a les autres. Ceesay fait partie de la première catégorie.
Mais il y a aussi eu des joueurs qui, sachant que leur transfert à l'étranger était imminent, ont prolongé leur contrat avec le FCZ, histoire que toutes les parties puissent profiter de ce transfert. C'était le cas pour Rüegg et Sohm, par exemple.
Qui sont les joueurs pour lesquels la porte du FC Zurich est définitivement fermée?
Toni Domgjoni nous a quittés l'année dernière, libre de tout contrat. Il y a plus longtemps, Brunner, Buff et Koch aussi. Ils semblent avoir oublié à qui ils devaient leur carrière professionnelle et qui a beaucoup investi en eux durant toutes ces années.
Vous aurez 70 ans l'année prochaine.
Vraiment? Je ne ressens pas l'âge, ni physiquement, ni mentalement. Et à la question de savoir combien de temps Heliane et moi serons encore à la tête du FC Zurich: je ne sais pas. On restera aussi longtemps qu'on estime pouvoir amener quelque chose. Et quand on laissera le FCZ, on trouvera une solution qui convienne au club, aux fans et à la ville. Une chose est sûre: on ne laissera pas le FC Zurich se transformer en club-ferme.
Après le derby du 23 octobre dernier, les ultras du FCZ ont lancé des fumigènes sur les fans de GC. Depuis, deux délinquants ont été identifiés. Un bilan satisfaisant?
Ce serait un bon bilan si 50 personnes avaient pu être identifiées. Mais l'identification est extrêmement difficile quand tous portent des cagoules. Maintenant, on en a deux, c'est déjà ça. C'est positif. Dans beaucoup d'autres cas, les casseurs s'en sortent indemnes. Maintenant, on va, nous aussi, réagir.
De quelle manière?
On va poursuivre en justice les deux personnes identifiées, pour obtenir des dommages et intérêts.
Pourront-ils un jour revenir voir un match du FC Zurich à domicile?
Plus jamais. On va leur infliger une interdiction de stade à vie. Même si cette décision sera probablement critiquée par des experts juridiques.
Qu'est-ce qui vous rend si sûr qu'ils ne viendront plus jamais à un match à la maison du FCZ?
Niveau sécurité, l'infrastructure du Letzigrund n'est effectivement pas optimale. Du coup, il n'y a aucune garantie.
Il y a aussi la volonté de fermer les secteurs visiteurs.
On vit dans un système social libéral. Si quelqu'un peut regarder un match de football dans ce pays, il doit avoir la possibilité de le faire dans le secteur visiteur.
Et je voudrais encore dire quelque chose à ce sujet...
Allez-y!
Si la police accueille les supporters visiteurs dès leur arrivée en gare en tenue complète et avec des canons à eau, ça peut provoquer une réaction. Il est peut-être temps d'y réfléchir.
Du coup, vous souhaitez un retrait de la police?
Non, mais elle pourrait peut-être se montrer un peu plus discrète, en tout cas tant qu'il ne se passe rien. Comme c'est le cas en Allemagne, par exemple.
Vous fêterez probablement votre prochain titre de champion avant de déménager dans le nouveau stade.
Je ne sais pas. Mais ce que je sais, c'est que le stade sortira de terre un jour. La seule question, c'est: quand? 2025 est une date réaliste. Après l'obtention du permis de construire, il ne faudra plus que deux ans pour que le stade soit construit.
Adaptation en français: Yoann Graber