Vous avez sûrement vu passer la série Sprint: The World’s Fastest Humans (ou simplement Sprint) sur Netflix. Vous avez découvert Sha'Carri Richardson, Shericka Jackson, Shelly-Ann Fraser-Pryce en pleine préparation, participer aux Mondiaux de Budapest et rêver des JO de Paris, l'objectif suprême d'une carrière. Ce sont elles qui vont lever les foules et faire briller le sprint féminin lors des ces joutes olympiques.
Elles se donnent rendez-vous une première fois ce samedi 3 août à 21h20 sur la ligne droite des Jeux de Paris, à l'occasion de la finale du 100 m. Tout d'abord pour se parer d'or, mais aussi pour courir plus vite que Florence Griffith-Joyner et son record stratosphérique: 10''49 à Indianapolis en 1988, lors des sélections américaines pour les JO. L'Américaine détient également la marque du 200 m avec 21''34, établie en finale des Jeux de Séoul en 1988. Le 200 mètres féminin à Paris aura lieu le mardi 6 août (21h40).
Ces deux chevauchées fantastiques seront à jamais entachées par le doute. «Personne ne peut courir aussi vite, la chaleur a dû perturber le chrono», arguera le commentateur du 100 m, ce 16 juillet 1988 à Indianapolis. Même Omega mènera son enquête, avant de valider la performance.
Viendra le spectre du dopage qui entourera ces deux records jugés inhumains. Le décès prématuré de Florence Griffith-Joyner à l'âge de 38 ans (après une attaque cérébrale) appuiera les soupçons. «Madame Turbo», comme l'avait surnommée le New York Times, a, pour beaucoup, couru trop vite...
Depuis ces deux records, 36 ans se sont écoulés. Des progrès technologiques (matériel) et techniques/physiques chez les athlètes ont été réalisés. Les Jamaïcaines et les Américaines, en tête de liste, pourraient ainsi mettre à mal les deux marques mythiques de Griffith-Joyner.
Shelly-Ann Fraser-Pryce s'en est approchée en juin 2021, à Kingston, grâce à un chrono de 10''63. Avant que sa compatriote Elaine Thompson-Herah ne claque un temps supersonique de 10''54 à Eugene (Etats-Unis) deux mois plus tard. Hélas, «ETH» a déclaré forfait pour les JO de Paris après une déchirure du tendon d'Achille.
En ce qui concerne Shelly-Ann Fraser-Pryce, à un âge plutôt avancé pour une sprinteuse (37 ans), la chance semble être passée. Pour preuve, elle n'est que la 11e performeuse mondiale de l'année.
Même constat pour Shericka Jackson: 2024 n'est pas une année faste pour l'autre Jamaïcaine supersonique qui est également restée discrète avant ces joutes olympiques.
Mais en année olympique, la tendance est de cacher son jeu avant de tout donner le jour J. Alors les stars du sprint pourront-elles combler à Paris ces quelques centièmes de seconde, qui sont un véritable Everest dans l'athlétisme féminin?
Sha'Carri Richardson (24 ans) rappelle beaucoup sa compatriote Florence Griffith-Joyner, en partageant des similitudes: la posture, les ongles démesurés, les looks excentriques, les relations tendues avec la presse et, bien sûr, le talent. La jeune Américaine (24 ans) a été capable de courir en 10''57 en 2023. Ne serait-elle pas l'héritière?
Sha'Carri Richardson est sûrement l'athlète, aujourd'hui, qui peut courir plus vite que son illustre compatriote. Son caractère affirmé lui confère une confiance inébranlable et une impression d'arrogance; l'Américaine a la rétine assassine et l'insolence pour effacer le chrono de Florence Griffith-Joyner, le temps d'une série parfaite, d'une foulée déchaînée.
Le 200 m est le record de Griffith-Joyner qui sera le plus difficile à battre. La Jamaïcaine Shericka Jackson s’est placée à onze centièmes. C'est si proche et si loin à la fois... A 30 ans, Jackson est dans une maturité physique qui pourrait lui permettre de passer sous les 21''40. Néanmoins, elle ne devrait pas battre le record de 21''34 réalisé à Séoul en 1988.
Gabby Thomas, l'autre star de la discipline, paraît trop tendre pour s'en approcher. Et ce malgré qu'elle soit la meilleure performeuse mondiale en 2024 sur la distance, avec sa foulée tout en souplesse.
Alors, reste la grande question: verra-t-on tomber un jour les records de la regrettée Florence Griffith-Joyner?
Le cardiologue et professeur de physiologie français, Jean-François Toussaint, est pessimiste. Dans Libération, il met en avant d'inévitables «limitations liées à la physiologie humaine» qui interviendront.
Sha'Carri Richardson, Shelly-Ann Fraser-Pryce et leurs consœurs n'en ont cure: elles donneront tout ce samedi et mardi prochain pour détrôner Florence Griffith-Joyner.