Le rugby change la taille du ballon et ça fait débat
C'est une petite révolution pourtant passée inaperçue: depuis 10 jours, les femmes ne jouent plus de la même manière sur le circuit mondial de rugby à 7. Elles s'affrontent en effet avec un ballon plus petit que celui des hommes. Ce dernier est passé de la traditionnelle taille 5 à la taille 4.5. Objectif: adapter le ballon des rugbywomen à la taille de leurs mains et poignets, afin de leur permettre une meilleure maîtrise et donc une plus grande aisance technique.
Manager général du club genevois des Switzers, dont l'équipe féminine à 7 est triple championne de Suisse, Gianni Di Martino voit ce changement d'un bon oeil. Il rappelle qu'au départ, le ballon a été conçu pour des mains d'hommes et que les filles ont dû s'adapter, ce qui n'a jamais été simple pour certaines
Capitaine des Switzers, Lea Badel joue au rugby à 7 depuis dix ans et avoue qu'elle a déjà pensé, par le passé, que «ce serait tellement plus simple de jouer avec un ballon plus petit». Elle n'y voit que des avantages sur le terrain: «Ce changement devrait améliorer la précision des passes, car leur qualité dépend aussi de la prise en main du ballon. Le jeu pourrait ainsi gagner en vitesse, en précision et, au final, en spectacle.»
«Si les passes vont plus loin, il y aura plus de décalages», anticipe déjà Gianni Di Martino, précisant que son équipe n'a pas encore reçu les fameux ballons plus petits. Les instances mondiales pourraient décider d'introduire cette nouveauté dans tous les championnats au terme de la saison du circuit à 7 en juin prochain, en fonction des retours des joueuses.
Si ce changement est entériné, le manager général espère que ses joueuses ne le prendront pas personnellement. «Il est vrai qu’elles joueraient avec un ballon plus petit que celui des garçons, mais pas parce qu’elles seraient moins capables. Simplement, si leur sport avait été pensé pour elles dès l’origine, la taille du ballon aurait été adaptée depuis longtemps.»
Si elle se réjouit de disposer d’un outil de travail plus facile à manier, Lea Badel s’interroge tout de même sur les conséquences de cette évolution pour l’égalité entre hommes et femmes.
«Quand les nouveaux ballons ont été introduits à titre de test, certaines de mes amies ont réagi de manière très différente. L’une d’elles m’a même confié: "On sait très bien jouer avec un ballon de taille 5. Ce nouveau ballon pourrait changer la place des femmes dans le rugby, créer une distinction avec le rugby masculin...” Elle l’a assez mal vécu, et j’ai compris son point de vue.»
La présidente du Comité de haute performance de la pratique féminine chez World Rugby, Melodie Robinson, a pour sa part estimé que le rugby féminin devait «tracer sa propre voie, adaptée aux joueuses, et non se contenter de suivre l'histoire du rugby masculin».
