En hockey, ce changement fait toute la différence
La destitution d’un entraîneur a été, est et restera le remède de crise le plus populaire. Nulle part ailleurs son effet n’est aussi salutaire que dans le hockey sur glace. Dans aucun autre sport d’équipe, l’entraîneur n’exerce une influence comparable: il peut sans cesse modifier la composition de ses lignes et, durant le match, houspiller, ignorer ou galvaniser ses joueurs à tout moment. Un véritable commandant, que ce soit au niveau de la stratégie ou des émotions.
C’est pour cela qu’on le surnomme aussi le «général de la bande». Qu’il soit chaotique, classique ou logique, son limogeage produit toujours un effet. À l’automne 2025, celui-ci est même spectaculaire: Ambri et Genève-Servette viennent d'enchaîner deux victoires consécutives après avoir changé d’entraîneur, tandis que le CP Berne, sous la houlette de Heinz Ehlers, s’est libéré de sa camisole tactique et a déjà offert plus de spectacle en trois matchs qu’il ne l’avait fait depuis le début de la saison sous Jussi Tapola.
Le classement actuel:
Les contextes ne pourraient pourtant pas être plus différents: le licenciement du coach en place depuis le début de saison a été vécu comme un renouveau à Berne, un choix logique à Genève et un drame à Ambri. L’entraîneur Luca Cereda et le directeur sportif Paolo Duca — appréciés et respectés des joueurs — ont démissionné à la suite d’une intrigue révélée par watson, impliquant leur président Filippo Lombardi, qui avait secrètement négocié dans leur dos avec Christian Dubé.
Confusion et silence au Tessin
Depuis, le désarroi est tel que, avec l’accord de la ligue, un silence médiatique temporaire («silenzio stampa») a été décrété jusqu’à ce lundi. On ne sait même pas clairement qui est désormais l’entraîneur principal. Les adjoints Eric Landry et René Matte assurent l’intérim, mais aucun ne souhaite être le supérieur de l’autre.
Comme le règlement impose un responsable officiel, Matte porte le titre — par obligation juridique, non par conviction. Et puisque le président Lombardi a lui aussi remis son mandat, le directeur de la ligue, Denis Vaucher, doit aller inspecter la situation en Léventine vendredi. Sous la direction collégiale de Landry et Matte, Ambri a tout de même remporté deux matchs (3–2 contre Ajoie, 2–1 à Zurich).
Mais la ligue exige un retour à l’ordre dans le club tessinois, alors que le grand ménage n’est peut-être pas terminé: le directeur général Andreas Fischer serait impliqué dans l’intrigue, avec pour but de succéder au directeur sportif. Ironie du sort, cette manœuvre pourrait désormais lui coûter sa place.
Berne revit
À Berne, le scénario est plus classique, puisque le changement d’entraîneur a été envisagé comme un électrochoc. Les joueurs s’étaient discrètement rebellés contre Jussi Tapola: contre sa discipline de fer, contre son hockey mécanique et sans émotion, qui avait culminé avec une défaite 0–4 à Ajoie. Le renvoi du Finlandais était donc inévitable. Sous son successeur Heinz Ehlers, on rejoue désormais au hockey — on ne se contente plus d’exécuter.
Ehlers affirme humblement qu’on ne reconnaît pas encore sa patte. Pourtant, rarement un changement n’a été aussi visible: sous la direction du Danois, les Bernois jouent plus vite, plus directement, avec un mélange de puissance et de légèreté qui redonne de l’air autant aux joueurs qu’aux supporters. Les Ours déclenchent désormais leurs attaques avec rapidité, rendant leur jeu plus dynamique, plus spontané, plus émotionnel et plus spectaculaire. Rien que lors du match de samedi contre Zoug (3–0), on a vu plus d’actions spectaculaires que durant les neuf dernières rencontres de l’ère Tapola.
Ce qui a fonctionné face à l’équipe quasi amateur de Belfast en Ligue des champions (7–0) et contre Zoug (3–0) a également suffi pour pousser Davos dans ses retranchements jusqu’aux dernières secondes lors d’une courte défaite (1–2) dimanche.
Des effets scientifiquement prouvés
Ambri vacille, Berne danse tandis que Genève, lui, se réorganise sobrement. Aux Vernets, le changement d’entraîneur relevait de la logique. Le directeur sportif Marc Gautschi avait déjà engagé le coach prévu pour la saison prochaine — le sélectionneur suédois Sam Hallam. En attendant, Yorick Treille devait assurer l’intérim, passant du rôle d’adjoint à celui d’entraîneur principal. Mais après deux humiliations (0–11 à Lausanne, 0–8 à Bienne), la rupture s’imposait. C’est désormais l’ex-adjoint Ville Peltonen qui tient les rênes, et il a remporté ses deux premières rencontres: une victoire 4–1 à Zoug, suivie d’une revanche sur Lausanne (5–3).
Que les changements d’entraîneur produisent un effet n’a plus rien d’une superstition: c’est même scientifiquement démontré. Une étude intitulée «The Effect of Mid-Season Coach Turnover on Team Performance: The Case of the National Hockey League 1989–2003» a montré que la moyenne de points («available points») passait d’environ 0,35 avant le changement d’entraîneur à quelque 0,45 après celui-ci.
Et même la saison suivante, une nouvelle progression a été observée, la moyenne atteignant environ 0,51 point. Et cela, dans la NHL, où les «généraux de la bande» disposent d’une autorité et de moyens bien supérieurs pour secouer leurs joueurs.
