Comme Lara Gut-Behrami, ces stars privées d'adieux
Fabian Cancellara avait terminé sa carrière sur un titre olympique aux JO 2016, Nicola Spirig en battant son record personnel sur semi-marathon devant sa famille et ses amis en 2022, et Roger Federer la même année par un double mythique avec Rafael Nadal en Laver Cup. Et Lara Gut-Behrami? La Tessinoise, qui fait elle aussi partie des légendes du sport suisse, aura-t-elle droit également de partir sous la lumière des projecteurs et les vivats du public?
C'est ce qui était prévu en juin 2025, lorsque «LGB» avait annoncé qu'elle tirerait sa révérence après les JO 2026, une scène à la mesure de celle qui a déjà remporté 1 titre olympique, 9 médailles aux Mondiaux (dont 2 en or), 21 globes (dont deux gros globes de cristal) et 48 succès en Coupe du monde. Mais tout s'est gâté depuis vendredi dernier et la chute dont la championne a été victime à l'entraînement.
Si le premier diagnostic du Dr Olivier Siegrist se confirme (il a confié au Nouvelliste que «son ligament croisé et son ligament interne sont déchirés»), et si la skieuse de 34 ans ne change pas d'avis en décidant de poursuivre sa carrière après les Jeux, elle serait privée de compétition pour ses adieux, et sortirait ainsi par la petite porte.
Est-ce si grave que cela? Pour vous, non. Nous vous avons posé la question dans un récent sondage: en cas de blessure grave au genou, «LGB» devrait-elle prolonger sa carrière un an de plus afin de recevoir les vrais adieux qu'elle mérite sur la piste? Vous avez été 63% à répondre non, estimant que «sa fin de carrière ne changera rien à se réputation», puisqu'elle a «déjà marqué l'histoire du sport suisse».
C'est sans doute vrai, mais il est tout aussi certain que les grands champions sont attentifs à la manière dont ils prennent congé de leur carrière, et qu'il n'y a rien de plus terrible pour eux, à ce moment-là, que de devoir partir sur une civière. Des blessures, ils en ont connu plusieurs et savent comment les surmonter. Mais une fin de carrière, il n'y en a généralement qu'une seule, et si elle est «ratée», c'est pour toujours.
Plusieurs stars ont vécu une fin de carrière dans l'ombre, après avoir pourtant passé toute une vie sous les projecteurs. C'est le cas par exemple du footballeur Marco van Basten, obligé de dire «stop» deux ans après son dernier match, une finale de Ligue des Champions de surcroît perdue face à l'OM (1993).
«Deux années de souffrance, de faux espoirs, d'opérations et de combat avec une cheville en lambeaux qui l'entraînera dans sa descente aux enfers», résumera So Foot. Le triple Ballon d'or aura bien droit à un tour d'honneur à San Siro, mais ce sera peu avant un match amical sans grand intérêt contre la Juventus. Le coeur n'y sera pas vraiment.
Lilian Thuram a aussi arrêté sur blessure (anomalie cardiaque) alors qu'il s'apprêtait à signer au PSG, tandis que Sergio Agüero, l'éternel homme du titre de Manchester City en 2012, a été victime d'un malaise lors de ce qui sera son dernier match de Liga avec le FC Barcelone.
Disputer son ultime partie sans le savoir, c'est aussi ce qu'ont vécu le basketteur Yao Ming (touché à la cheville), le hockeyeur Eric Lindros, parti en pleine intersaison sur un communiqué laconique de 5 lignes, «le corps en compote», ou encore l'ancien numéro 7 mondial de tennis Mario Ancic. Souffrant du dos, «Baby Goran» a rendu les armes un an après une défaite sans gloire au premier tour du tournoi de Miami face à Jérémy Chardy.
On peut imaginer ce qu'a dû être la déception de ces athlètes, ou on peut écouter Dustin Pedroia, gloire éternelle des Red Sox de Boston, obligé de s'en aller sur la pointe des pieds après une saison à six matchs, plombé par des blessures au genou. Peu de sportifs ont si bien résumé le chagrin que suscite une fin de carrière avortée quand on a été une immense star de sa discipline.
Mais l'histoire qui ressemble le plus à celle que pourrait vivre Lara Gut-Behrami si une blessure grave se confirmait est celle de Christophe Lemaitre. Comme elle, le sprinter français, quadruple champion d’Europe et médaillé de bronze olympique et mondial sur 200m, rêvait de partir dans la lumière aux JO (en 2024 à Paris), avant qu'une énième douleur au mollet ne finisse par le convaincre d'arrêter les frais quelques semaines avant l'évènement.
Et comme «LGB», Christophe Lemaitre avait déjà une idée de reconversion en tête (il est devenu coach sportif), ce qui a aussi participé à sa décision de ne pas s'acharner pour retrouver le très haut niveau. La skieuse tessinoise, elle, rêve de fonder une famille et avait déjà annoncé qu'elle rejoindrait l'an prochain son mari Valon en Angleterre, où il est devenu directeur technique du Watford FC. Ainsi, les chances qu'elle se batterait pour se remettre d'une blessure grave et pouvoir quitter la grande scène aux Mondiaux de 2027 en Valais sont très hypothétiques.
