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«J'ai une peur bleue de l'algorithme»: interview avec Nico Vuignier

Bienvenue dans la tête du freestyler le plus geek de Suisse.
Bienvenue dans la tête du freestyler le plus geek de Suisse.image: nico vuignier
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«J'ai une peur bleue de l'algorithme»: Nico Vuignier, freestyler geek

Bienvenue dans la tête de Nico Vuignier, où des skieurs peuvent survoler Bernie Sanders, voguer dans des cubes de verre, briller dans la nuit ou danser avec le feu. Les images sont aussi dingues que ce Valaisan de 32 ans. Interview.
25.04.2023, 16:5905.05.2023, 13:10
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«Mais comment fait-il?» Telle est la question qui nous vient tout naturellement lorsqu'on se pose cinq minutes devant la page Instagram ou YouTube de Nico Vuignier.

Il a beau être skieur freestyle maintes fois médaillé et inventeur (entre autres) de la technique jamais brevetée dite du «centriphone», le Valaisan originaire de Crans-Montana ne se la pète pas pour deux sous, cultive un sens de la compétition proche de zéro et, surtout, un irrésistible besoin de créer des contenus frappadingues. Et ça lui réussit: ses vidéos alléchantes collectent des millions de vues.

Vidéo: watson

On l'a rencontré entre deux gingerbeers dans les Alpes bernoises, lors de Swatch Nines, évènement qui rassemble les meilleurs sportifs de l'extrême du monde. Le bon moment pour lui demander d'où viennent ses idées - et le vernis noir de son auriculaire.

watson: Nico, sur votre CV, vous avez inscrit skieur, artiste ou geek?
NICO VUIGNIER: Une combinaison des trois, je pense! Bien que je ne suis pas sûr que le mélange des trois mots soit très heureux. En tout cas, c’est un excellent résumé.

Est-ce que vous avez un CV, en fait?
Non. Le seul que j’ai jamais fait, je devais avoir 17 ou 18 ans, pour ma maturité.

Plutôt vous faire couper les jambes ou arracher les yeux?
Oh… pas facile! Je suis optimiste quant à l’avenir technologique, donc je dirais couper les jambes. Je demanderais juste à ce qu'on garde mes nerfs, pour pouvoir avoir des prothèses ou des jambes d’acier et continuer à skier. En plus, je n’aurais même plus besoin de genoux, ce serait parfait.

Prochaine étape, la cryogénisation?
Ça, je m’en fous un peu. En revanche, je suis hyper impressionné par ce que peuvent faire les athlètes paralympiques. Les yeux, ce serait plus difficile. Je serais trop triste de ne plus pouvoir regarder de films.

On vous croise où, quand vous n’êtes pas sur les pistes? Dans un musée?
Les musées… ça arrive. Si j’ai l’occasion d’y aller, j’aime bien la Design Week à Milan. On y voit les derniers trucs en vogue, c’est intéressant. Sinon, non. Quand je ne suis pas sur les skis, je suis plutôt derrière mon ordi. Pas très intéressant, non?

Bêtement, vous faites quoi un mardi soir? Vous errez sur Netflix?
Un mardi soir? Je suis certainement derrière mon ordinateur. Je travaille bien le soir, je suis efficace de nuit. Je regarde plutôt Netflix l’après-midi.

Vos séries préférées?
J’ai adoré Barry, sur HBO, à propos d'un serial killer qui veut devenir acteur à Los Angeles. Il faut que vous regardiez, c’est super. J'aime aussi beaucoup la série Atlanta, ou encore Fleabag de Phoebe Waller-Bridge, sur la vie d'une meuf au Royaume-Uni. En ce moment, je suis en train de regarder Les Soprano.

En parlant de musique, qu'est-ce qui vous inspire?
Avant les plateformes, j’étais constamment à la recherche de nouvelles musiques. Maintenant, je me laisse porter par l’algorithme. Ma situation musicale est insatisfaisante. J’aime beaucoup le piano. Sur Apple Music, j'écoute en boucle les mix de Frank Ocean.

Votre péché mignon, devant l’écran?
J’ai tout le temps une vidéo qui tourne sur YouTube. Que ce soit des podcasts, des trucs random, des vidéos de mecs qui construisent des trucs… Tout le temps.

Et vous grignotez un truc?
Pas trop. Mon péché mignon, ce sont les gingerbeers. J’évite de grignoter, pour ne pas en mettre partout sur le clavier.

J'en déduis que vous êtes maniaque?
Non, vraiment pas! C’est un vrai bordel chez moi. Mon bureau est clean un jour, et après, le bazar s’accumule jusqu’à ce que je n’aie plus de place et que je sois forcé de tout nettoyer. Un vrai yoyo.

On doit vous poser la question douze fois par jour, mais d’où viennent vos idées bizarroïdes?
Je suis vachement curieux. J’ai au moins cinq applications de notes différentes et de mood boards pour enregistrer mes idées. Je ne les re-regarde pas forcément, mais c’est une manière pour moi de les enregistrer dans mon cerveau. Parfois, il m'arrive de les récupérer, même des années plus tard. Je ne regarde pas de vidéos de ski ou de snowboard. C'est très varié.

«Au final, ce que je fais, ce n’est que de la copie, mais j’essaie de la masquer, jusqu’à ce qu’on ne reconnaisse plus la source»

Il vous arrive d’avoir l’angoisse de la page blanche? Ou vous avez toujours une idée en tête?
Je touche du bois, pas trop. En revanche, quand je crée un truc, j’ai une peur bleue de l’algorithme, que ça ne «prenne» pas. Si la personne qui regarde ma vidéo n’accroche pas ou switche direct… Oui, ça me décourage. Il faut que j’apprenne à oublier et à mettre ça de côté. Il y a presque toujours quelqu’un pour me rassurer, m’encourager et me dire qu’il a aimé ma vidéo. Mais je cours après les chiffres. J’ai la chance d’avoir des sponsors qui me soutiennent et s’en foutent, mais il y a quelque chose de personnel. Tu veux que ça marche. Ce n’est donc pas vraiment comme l'angoisse de la page blanche, mais ça me bloque dans ma création.

«Pour que ça marche, je n’aurais qu’à faire quelques reels avec la dernière musique TikTok à la mode. Mais ça me fait vraiment chier»

Un projet fou que vous rêvez d’accomplir, mais qui est encore irréalisable à l'heure actuelle?
Toutes mes idées sont logistiquement et physiquement irréalisables. J’en ai eu une, il y a plus de dix ans, que je vais enfin pouvoir mettre en oeuvre cette année. On vient de faire les premiers tests. Je ne peux pas en dire plus.

Roh! Pas même un petit indice? Du feu, des étoiles, des feux d’artifice, de la neige?
De la neige! (Rires). Il y a certaines choses que j’aimerais beaucoup faire, mais qui ne sont pas encore faisables d’un point de vue technologique ou qui coûtent encore trop cher. Je ne perds pas espoir.

Dans vingt ans, vous vous voyez où?
J'espère que ce sera toujours dans le ski, et que je ne serai pas un vieux con! (Rires) Plus sérieusement, j'aimerais pouvoir encourager d'autres jeunes à rêver, à ne pas se limiter à la pure compétition, où tu dois être meilleur que les autres. Pouvoir s’exprimer en faisant du ski, du skate ou du snow. C’est pour cela qu’on a des évènements comme The Nines, qui encouragent à ne pas s'arrêter à la seule performance, à se lancer des challenges plus artistiques. On peut être le meilleur, certes, mais en testant de nombreux styles différents. Un peu comme de la danse.

Pour l’instant, vous êtes tout seul dans votre créneau. Vous ne craignez pas la concurrence, l’arrivée d’un nouveau petit jeune qui vous fasse perdre votre monopole?
Non. Si plus de gens le font, c’est super! Le truc qui me gênerait, c’est que quelqu’un me pique mes idées et devienne plus connu. Là, ça serait nul. Ça m’est déjà arrivé - pas dans le ski, mais pour d’autres sports, et c’est frustrant. Mais si quelqu’un débarque avec quelque chose d’original et de créatif, ça apportera beaucoup à la culture du sport. Ils sont les bienvenus, c’est un appel!

Dernière question: pourquoi vous avez un seul ongle verni, à l'annulaire droit?
Je l'ai coincé dans la porte de ma voiture comme un gamin. Il est en train de repousser, mais il est encore dégueulasse. Alors, la soeur de ma copine a une machine à ongles et j'ai testé le vernis au gel. C'est bien fait, non?

Englouti par la neige, ce skieur a eu beaucoup de chance
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