Avril 2022. Louise Butcher, une Britannique de 51 ans, mère de deux enfants et habitante de Braunton, un village côtier du Devon, reçoit un diagnostic de cancer du sein lobulaire. Le ciel lui tombe sur la tête.
Ironie cruelle, trois semaines plus tôt, une mammographie l’avait rassurée. Mais une autopalpation attentive, suivie d’une échographie, révèle une tumeur de cinq centimètres nichée près de la paroi thoracique. Celle qui admet avoir toujours vécu dans l'anxiété de la maladie et de la mort voit ses pires cauchemars se réaliser, et ce, alors qu'elle s'est mise au défi de courir son premier marathon.
S’ensuivent deux mastectomies, en juin puis en août, et cinq séances de radiothérapie. Louise refuse la reconstruction mammaire, malgré la «pression» que subissent souvent les femmes qui traversent un tel drame. «Je savais instinctivement que je ne voulais pas d’implants», confie-t-elle dans la presse britannique.
Courir devient alors son exutoire, sa manière de tromper la peur. Six semaines après sa deuxième opération, elle termine son premier marathon. Un marathon virtuel, certes, mais symbolique; celui de Londres, le 2 octobre 2022. Et ce, cinq jours seulement après avoir terminé son traitement de radiothérapie.
Sur le site de la course londonienne, elle explique qu’elle en avait tout simplement besoin. «Je ne savais pas comment faire face à un tel traumatisme et je savais que la course avait été là pour moi.»
Peu à peu, Louise Butcher commence à courir topless sur les plages du nord du Devon. Pas pour choquer, mais pour apprivoiser son nouveau corps, ses cicatrices qui remplacent ses seins.
En 2023, la Britannique court à nouveau le marathon virtuel de Londres. Et elle ne va pas s’arrêter là, bien au contraire.
En avril 2024, Louise Butcher devient la première femme à courir le marathon de Londres torse nu. Ses cicatrices de mastectomie? Elles ne les cache pas; elles sont là, bien visibles. Les réactions sont nombreuses et puissantes: des femmes pleurent en la voyant passer, les médecins l’applaudissent, des inconnus crient son nom, se mettent à la suivre sur les réseaux sociaux et louent sa positivité.
Elle décrit cette course comme quelque chose de «magique». «On ne peut pas plaindre quelqu'un qui court un marathon, n'est-ce pas?», sourit-elle un jour sur le plateau de l’émission britannique This Morning.
Ce marathon marque un tournant. Louise Butcher ne cache plus rien. Depuis, elle court topless à travers le Royaume-Uni et partage son parcours sur les réseaux sociaux. Elle devient un symbole de résilience, de liberté corporelle, et de normalisation des cicatrices pour de nombreuses femmes après un cancer du sein. «Ces cicatrices m’ont sauvé la vie, pourquoi les cacher?», explique-t-elle auprès de la chaîne britannique.
Louise Butcher ne court pas pour battre des records, même si elle détient désormais celui de la femme la plus rapide ayant subi une double mastectomie, reconnu par le Guinness World Records. Elle court pour briser les tabous, pour que d’autres femmes se sentent autorisées à exister pleinement, sans honte.
Dans son livre Going Topless, à paraître en juin prochain, la sportive de 51 ans retrace ce chemin de douleur, de peurs, d’acceptation et de puissance. Elle y raconte comment elle est passée de l’angoisse à la liberté, de la peur du regard des autres à la fierté d’être vue. Ses mémoires qui, elle l’espère, encourageront les lecteurs à affronter leurs propres peurs et à «accepter les cicatrices de la vie».
Aujourd’hui, Louise Butcher court toujours, torse nu, sur les plages du Devon, ou récemment dans les rues de Londres, puisqu’elle a à nouveau participé au marathon de la capitale anglaise, en avril dernier. Dans un monde où l’on cache les cicatrices, elle choisit de les montrer. Pas pour choquer, mais pour inspirer.
La sportive continue aussi d'encourager ceux qui la suivent à faire des dons pour Breast Cancer Now. L’an dernier, lors du marathon de Londres, la Britannique avait réussi à récolter quelque 3500 livres sterling (environ 3900 francs suisses) en faveur de l’association, qui soutient les personnes atteintes d’un cancer du sein et leurs proches. Elle a réitéré cette année; les dons sont d'ailleurs toujours possibles via le site du marathon.