On dit qu’il faut partir au sommet de sa gloire. Mais quand atteint-on vraiment ce point culminant? Est-ce lorsqu’un entraîneur remporte un doublé championnat-coupe aussi inattendu que retentissant? Ou alors quand il qualifie son équipe pour la Ligue des champions?
Cette question, Fabio Celestini a sans doute dû se la poser à de nombreuses reprises ces dernières semaines. L’entraîneur du FCB en est manifestement arrivé à la conclusion que la promesse d’un objectif ne suffit pas. La participation à la Ligue des champions n’est pas encore acquise: il faut d’abord franchir le tour de barrages. Celestini préfère s’en tenir à ce que personne ne pourra lui retirer: les deux titres remportés.
Surtout ce titre de champion de Suisse, qui manquait à son palmarès et qu’il convoitait ardemment. Une fois ce rêve exaucé, et avant de viser un nouveau défi – un poste à l’étranger –, l’homme du doublé a choisi de s’en aller. Tous les chemins lui sont désormais ouverts. Il a amplement mérité une telle sortie après son passage réussi à Bâle.
Peut-être aussi que trop de choses se sont passées ces derniers mois. Assez, en tout cas, pour que le technicien de 49 ans comprenne qu'il n'aurait aucune garantie d'être toujours en poste au coup d’envoi de la phase de groupes de la Ligue des champions, en septembre. Il savait aussi certainement qu'à Bâle, c'est le président David Degen qui décide du sort des coachs, comme ça a toujours été le cas avec les prédécesseurs – tous licenciés – de Celestini.
Trop souvent, le poste du Vaudois a vacillé – d’abord en automne, puis même au mois de mars alors que l’équipe était en tête du classement. À l’époque, Fabio Celestini avait fait part de son incompréhension – à juste titre. Les pressions et les incertitudes des dirigeants sur lui l’ont visiblement affecté. Qui pourrait le lui reprocher?
Ces mêmes dirigeants ont très récemment affirmé qu’ils souhaitaient ardemment conserver leur coach. Une déclaration qui intervenait après que le club a sondé le marché au printemps pour trouver un successeur potentiel.
Du point de vue de Celestini, son départ se comprend aisément.
Seuls cinq entraîneurs du FCB l’avaient fait avant lui. Et il part en héros: célébré par les supporters pour avoir repris un club à terre, l’avoir sauvé de la relégation et ramené au sommet du football suisse. Ce mérite, personne ne l’oubliera à Bâle. Xherdan Shaqiri a même qualifié Celestini de «légende» après la finale de Coupe. À tout seigneur, tout honneur.
Pour le FC Bâle, en revanche, ce départ est un coup dur. Les dirigeants ont répété avec insistance que leur souhait le plus fort était de continuer avec le technicien romand. Mais trop tard. Leur hésitation – ou plutôt leur refus de s’engager clairement, ainsi que leurs recherches de remplaçants – ont sans doute brisé quelque chose chez Celestini, homme sensible.
Peut-être les dirigeants rhénans voulaient-ils aussi le garder en sachant pertinemment ce que son départ risquait d’entraîner: une réaction en chaîne, avec les adieux d’une grande partie du staff technique.
Un staff que les joueurs – tout comme le directeur sportif Daniel Stucki – considéraient comme l’un des piliers de ce succès. Un staff composé de véritables experts, qui avaient auparavant travaillé dans les meilleurs championnats et avec les plus grands joueurs du monde.
La plupart d’entre eux – Carlos Menéndez, Luigi Nocentini, José Blesa – ont été attirés à Bâle par Celestini. Car l’ancien international suisse avait déjà, avant son doublé, un réseau mondial dans le football.
Davide Callà (entraîneur adjoint), la seule constante, a quant à lui entamé lundi une nouvelle aventure avec l’équipe nationale suisse. Le dernier repère des trois dernières années disparaît lui aussi.
Il va sans dire que, malgré leurs déclarations printanières en faveur de Celestini, les dirigeants du FCB ont continué à scruter le marché. Tout autre comportement aurait été peu professionnel. Mais ils ne pouvaient agir tant que la décision finale de Celestini n’était pas tombée. Une position initiale bien ingrate.
Cette situation complexe, c’est à la fois une mission délicate et une nouvelle opportunité pour le directeur sportif Stucki de renforcer son profil. Et pour le FC Bâle, l’occasion de se réinventer. Avant le début de la préparation estivale, avec un peu d’avance pour une fois et sans avoir à limoger son entraîneur.
Adaptation en français: Yoann Graber