C'est la marque On de Roger Federer qui équipe à Paris les membres de la délégation helvétique. La collection, développée spécifiquement pour ces Jeux, comprend un total de 24 pièces. En plus d'un large choix de vêtements et de chaussures, on y trouve des accessoires tels que des casquettes, des chaussettes et des sacs d'entraînement. Une grande partie des produits sont disponibles chez Ochsner Sport, où l'on peut entendre que la collection n'est «pas vraiment bon marché».
La tenue portée par les athlètes de la délégation helvétique lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024, lors des remises de médailles (il y en a eu sept jusqu'à présent), et bientôt lors de la cérémonie de clôture, n'est en revanche pas commercialisée. Ces pièces sont réservées aux athlètes.
Quand on sait que la cérémonie d'ouverture sur la Seine a été vue par plus de deux milliards de personnes, on comprend volontiers que la marque helvétique On - présente dans 60 pays, notamment aux Etats-Unis, en Allemagne, au Japon, en Chine, au Vietnam, en Australie et au Brésil - ait investi beaucoup d'énergie dans la confection de ces tenues exclusives.
Les 930 kilos de déchets plastiques récupérés ont été réduits en flocons en Thurgovie puis transformés au Tessin. Du fil et des tissus ont ensuite été fabriqués en Suisse orientale et quelques mille vestes ont été produites au Portugal.
Sur le papier, ce procédé semble durable. Mais l'est-il réellement? Kai Nebel, ingénieur textile et directeur du pôle de recherche sur la durabilité et le recyclage à l'université de Reutlingen, se montre dubitatif. Certes, le recyclage est meilleur que la production de matière, mais le plastique doit être nettoyé chimiquement et transporté. Cela consomme de l'énergie et provoque des émissions de CO2.
Pour Nebel, le plus gros problème se trouve néanmoins ailleurs: «Si l'on fabrique des vêtements à base de bouteilles en plastique, on les retire d'un cycle qui fonctionne».
Les textiles en partie fabriqués à partir de PET (réd: polytéréphtalate d'éthylène, que l'on retrouve dans les bouteilles) ne sont pas recyclables. Pour y arriver, il faudrait séparer les différentes matières les unes des autres. «Les coûts seraient disproportionnés», explique Kai Nebel.
Qui plus est, ils ne seraient pas sans risque pour la santé. Les fibres synthétiques libèrent des microplastiques. Ceux-ci se retrouvent dans les eaux usées après les lavages, puis à moyen terme dans l'eau potable. Les conséquences exactes ne sont pas encore très claires. Il est néanmoins préférable de porter des vêtements qui ne contiennent pas de fibres synthétiques.
Aux yeux de Nebel, les marques qui vantent et communiquent sur leurs vêtements recyclés ne font que du greenwashing. Il s'agit uniquement de stimuler les ventes, ce qui ne fait qu'augmenter les montagnes de déchets. Car aujourd'hui déjà, des effets sont produits sans trouver preneur.
Les vestes rouges portées par les athlètes suisses à Paris seraient-elles donc un exemple de plus de greenwashing? Non, répond Kai Nebel. Ce n'est le cas que si les fabricants ne sont pas suffisamment transparents et ne déclarent pas la proportion de matériaux recyclés, celle-ci étant souvent infime.
La marque helvétique utilise pour sa part des quantités élevées de tissus recyclés ou renouvelables. Aujourd'hui, les articles de toutes les catégories en sont composés à un tiers, et cela peut atteindre les deux tiers pour certains vêtements et accessoires. On fait d'importants efforts pour confectionner ses produits de manière durable et s'est d'ailleurs engagé à minimiser la consommation d'eau, réduire l'utilisation de produits chimiques et diminuer les déchets, comme le révèle un rapport sur la durabilité.
La société décrit les fibres obtenues à partir des bouteilles en plastique comme sa «solution actuelle pour des tissus en polyester, recyclés de manière conventionnelle». Elle fait néanmoins savoir qu'elle privilégie, dans la mesure du possible, des matériaux recyclés avancés, et qu'elle travaille sans cesse sur des matières innovantes. Des matières qui, contrairement à celles qui composent les vestes des athlètes suisses à Paris, ne sont pas arrachées à un cycle fonctionnel.